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Extrême droite

Immigration, répression : Le Pen tente de capitaliser sur l’offensive contre les quartiers populaires

Discrète au plus fort de la révolte, Marine Le Pen a fait son retour sur les plateaux TV. Face à l’offensive de Macron contre les quartiers populaires, elle entend bien tirer les marrons du feu et avancer son programme xénophobe et antisocial.

Seb Nanzhel

7 juillet 2023

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Immigration, répression : Le Pen tente de capitaliser sur l'offensive contre les quartiers populaires

Crédits photo : Capture d’écran France TV Replay

Discrète au plus fort de la révolte des quartiers populaires, Marine Le Pen sort du bois. Invitée dans les 4 vérités sur France 2 jeudi matin, elle a détaillé un programme 100% réactionnaire qui cherche après-coup à capitaliser sur la crise ouverte par les révoltes, notamment sur le « maintien de l’ordre », en cherchant criminaliser la jeunesse de quartiers populaires.

Le silence a été long. Marine Le Pen a laissé au cours de ces derniers jours les sorties les plus tonitruantes à ses subordonnés, à l’image du député Romain Baubry. Cet ancien policier a cherché, sans succès, à rendre visite en prison au tueur de Nahel. Ou encore de Jean-Philippe Tanguy, qui a invoqué la notion de « nationalité faciale », et plaidé en faveur du retour du service militaire.

Sur France 2, conformément aux antiennes de l’extrême droite, elle a fustigé « une haine de la France et tout ce qui peut représenter l’Etat », et un « problème d’immigration dans notre pays depuis 40 ans ». Alors que le gouvernement déploie une justice ainsi que des dispositifs répressifs d’exception à l’encontre des quartiers populaires et que l’extrême droite rend millionnaire le meurtrier de Nahel via une cagnotte en ligne, Le Pen est consciente que la séquence pourrait lui être favorable. Dans ce contexte, elle cherche à utiliser sa légitimité historique sur le sujet de l’immigration, qu’elle avait pourtant mise de côté, préférant depuis plusieurs mois se concentrer hypocritement sur la question du « pouvoir d’achat ». « J’ai tenté de concentrer l’intégralité des problèmes que nous dénonçons depuis 40 ans et qui explosent aujourd’hui aux yeux de tous avec ces émeutes terribles qui secouent le pays depuis 5 jours », a-t-elle ainsi expliqué.

Ce discours offensif peut s’appuyer dans la situation sur la politique répressive gouvernementale – que Le Pen a d’ailleurs saluée avant d’appeler à la durcir encore – ou encore sur le traitement médiatique sécuritaire de la révolte des quartiers populaires. Le tout au service d’un programme en forme d’offensive à l’encontre des plus précaires et de toute une partie des étrangers. En premier lieu, et dans la lignée de Ciotti des LR, Le Pen appelle à la fin du droit du sol, et à la mise en place systématique de la double peine pour les jeunes de parents étrangers qui atteignent leur majorité : « Je supprimerai le droit du sol. A 18 ans la personne qui est née en France de parents étrangers doit demander la nationalité française et je ne me m’obligerai pas à lui accorder ».

Elle emboite également les pas du gouvernement dans sa rhétorique de « responsabilisation des parents ». Sur ce point, elle considère comme « un vrai levier » la suspension des allocations familiales des familles des jeunes mobilisés. Une mesure de chantage qui vise à profiter de la précarité des familles pour acheter la paix sociale, mais qui est surtout au service d’un discours stigmatisant les populations des quartiers populaires comme gavées d’aides publiques. Une manière de monter le reste de la population contre ces dernières. La mesure est par ailleurs une surenchère vis-à-vis de Macron, qui appelait lundi soir à « sanctionner financièrement les familles à la première infraction ». Dans la même lignée, elle appelle à sanctionner les familles en vertu du non-respect de « leurs obligations éducatives ». Une manière de dépolitiser la révolte et la colère de la jeunesse des quartiers et de l’assimiler à un défaut d’éducation et « d’intégration ».

Dans la lignée également du gouvernement et de la circulaire Dupont Moretti, elle entend durcir la répression judiciaire sur les mineurs, fustigeant la soi-disant « impunité totale des mineurs ». Les condamnations massives actuelles de personnes très jeunes sur des dossiers vides ne satisfont apparemment pas Le Pen, qui appelle à « taper fort, serrer la vis ».

Dans une envolée finale, elle récapitule sur France 2 son programme pour la période : « il faut reprendre la main sur l’intégralité de ces quartiers. Il faut arrêter l’immigration anarchique, il faut construire des places de prison de manière urgente. Il faut revoir le fonctionnement de la justice. Il faut s’attacher à ce que l’école redevienne le creuset républicain qu’elle n’est plus aujourd’hui. Il faut restituer l’autorité parentale aux parents. Aux parents. » Un programme de mise au pas de la jeunesse et d’offensive xénophobe et sécuritaire, qui peut progresser aujourd’hui sur le dos de la politique gouvernementale.

La stratégie de Le Pen, qui a laissé passer la tempête à l’abri en envoyant batailler sa garde rapprochée, pour en tirer profit à posteriori en capitalisant sur l’offensive sécuritaire du gouvernement, semble pour l’instant profiter à son parti. Selon un sondage ELABE pour BFM TV, 50% des interrogés voient Le Pen et le RN renforcés à l’issue des révoltes, 46% la mettent en tête des politiques renforcés, largement en avance de LR (20%) et de la NUPES (11%). Des sondages qui, s’ils expriment une dynamique générale du RN, restent à prendre avec des pincettes tant ils sont fortement dépendants de la conjoncture, mais aussi des questions posées par les sondeurs.

Qui plus est, le danger du Rassemblement National reste une coordonnée structurelle de la période. Sa dynamique dépendra essentiellement de la dynamique de la lutte de classe, et de la capacité du mouvement ouvrier à faire front contre la politique gouvernementale et l’extrême-droite. De ce point de vue, la façon dont le mouvement ouvrier répondra à la répression gouvernementale contre la révolte actuelle, ainsi que l’offensive autoritaire en cours sera déterminante pour la suite. La séquence récente, avec la mobilisation de la BRI pour réprimer des militants écolos ou encore la dissolution des Soulèvements de la terre a prouvé que sans réponse du mouvement ouvrier, malgré la faiblesse de la macronie, l’exécutif continuera son offensive. Dans ce sens, malgré ses nombreuses limites politiques, l’appel large à rejoindre la marche pour Adama, signé par plus de 90 organisations syndicales, politiques et du mouvement social est un aspect progressiste de la situation, s’il n’en reste pas là.

Face à un gouvernement radicalisé et des nuances de droite à l’offensive, il nous faut chercher à bâtir dès aujourd’hui la riposte, par l’action et la grève. Une riposte qui ne peut être organisée qu’autour d’un programme offensif, qui réponde aux enjeux posés par la situation et permette d’unifier les différents secteurs du monde du travail et du mouvement social.

Un programme qui doit partir des tâches immédiates face à la répression et l’offensive sécuritaire, en exigeant l’amnistie pour tous les réprimés de la révolte des quartiers populaires et du mouvement des retraites, mais aussi le retrait des lois racistes et sécuritaires à l’image de la loi Séparatisme et Sécurité globale et celui de la loi de 2017 sur l’élargissement du cadre légal de l’utilisation des armes par la police. Alors que la colère reste vive à l’issue de la bataille des retraites, il s’agit de revendiquer un départ à 60 ans et 55 ans pour les métiers pénibles sans conditions d’annuité, tout en revendiquant des hausses des salaires et l’indexation des salaires pour faire face à l’inflation. Enfin, face à la radicalisation du pouvoir et à la surenchère de l’extrême droite, ce programme doit s’élargir à des revendications qui posent la question de la fin du régime autoritaire de la Vème République et l’exigence de mesures démocratiques radicales


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