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Offensive sécuritaire

Marche pour Adama : la macronie attaque des députés LFI et invite le RN à les poursuivre en justice

Après la réussite de la manifestation contre les violences policières du 8 juillet, qui a pu se tenir malgré l’interdiction, le gouvernement mène une offensive contre les députés Insoumis et écologistes qui y ont participé, jusqu’à les menacer de sanctions et poursuites judiciaires.

Antoine Weil

12 juillet 2023

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Marche pour Adama : la macronie attaque des députés LFI et invite le RN à les poursuivre en justice

Crédit photo : O phil des contrastes

La tenue de la marche contre les violences policières à l’appel du Comité Adama, de la Cgt, ATTAC, Solidaires et de nombreuses organisations, qui a réuni plusieurs milliers de personnes à Paris le 8 juillet malgré l’interdiction, a constitué un véritable pied-de-nez au gouvernement et à la préfecture. Devant cet affront, la macronie a immédiatement cherché à faire payer le Comité Adama, en arrêtant deux de ses membres dont Youssouf, frère d’Adama Traoré, conduit à l’hôpital après une arrestation ultra-violente. Désormais, le gouvernement, aidé par l’extrême-droite, s’en prend aux organisations politiques et syndicales qui ont participé à la marche.

Menaces de sanction et de poursuites judiciaires : la Macronie veut faire payer les députés LFI

Les députés de la France Insoumise en particulier sont dans le viseur de la macronie. Déjà la semaine précédente Elisabeth Borne et Olivier Véran ont estimé que l’organisation ne faisait plus parti de « l’arc républicain », coupable de ne pas avoir suffisamment condamné les émeutes et appelé au calme.

A la suite de la manifestation Adama le 8 juillet, cette offensive est montée d’un cran : les trois présidents des groupes parlementaires de la majorité, à savoir Aurore Bergé pour Renaissance, Jean-Paul Mattei du MoDem et Laurent Marcangeli pour Horizons ont adressé un courrier à la présidence de l’Assemblée nationale pour lui demander de sanctionner les députés ayant participé à la marche.

Dans cette lettre, ces poids lourds du camp présidentiel mettent en cause la participation d’élus à la manifestation du 8 juillet interdite par la préfecture, dans laquelle ont été entonné les slogans « tout le monde déteste la police », ce qui aurait constitué un « trouble » qui doit selon eux faire l’objet de « peine disciplinaires ». Ils citent ensuite 9 députés de la France Insoumise et Sandrine Rousseau d’Europe Ecologie Les verts qui ont participé à cette manifestation. Une tentative inédite de faire sanctionner par l’Assemblée des élus pour des agissements politiques, qui marque la volonté des macronistes de ne pas laisser impunie la tenue d’une manifestation contre le racisme et les violences policières.

Si la présidence l’Assemblée a finalement rejetée cette requête, la majorité présidentielle a dans le même temps activement tenté de diaboliser l’opposition. Gérald Darmanin a ainsi estimé que participer à la marche en mémoire d’Adama Traoré, tué par les gendarmes en 2016, revenait à « donner publicité à des extrémistes qui crachent sur la tombe des policiers », quand son collège Dupond Moretti a fait un pas de plus pour criminaliser le mouvement Insoumis. Interrogé par un député RN sur la participation de députés LFI à cette marche, le ministre de la Justice a partagé l’émoi de l’élu d’extrême-droite, et l’a invité à porter plainte pour signaler au procureur de la République l’infraction de participation à une manifestation. Une déclaration accueillie sous les applaudissements de Marine Le Pen et du Rassemblement National.

Une rhétorique en phase avec la ligne fixée par le président de la République sur les « factieux » et par son ministre de l’Intérieur sur « l’ultra-gauche » et la défense à tout prix de l’institution policière au sortir du mouvement contre la réforme des retraites. La ligne est ainsi clairement posée : dans la continuité de l’offensive répressive et judiciaire de ces derniers jours il s’agit de polariser les débats sur les « violences » des émeutiers en cherchant à incarner toujours plus le parti de l’ordre, à s’en prendre violemment aux habitants de quartiers populaires et à leurs révoltes en surenchérissant sur la droite, et à préparer le terrain à de nouvelles attaques qui pourraient concerner l’ensemble du mouvement social et dont l’ampleur dépendra du rapport de force dans les semaines et mois à venir.

Les attaques contre LFI, signe du nouveau tournant autoritaire du macronisme

Des menaces qui mettent en évidence à quel point le succès de la marche du 8 juillet a constitué un coup dur pour la macronie. L’interdiction de la marche initiale à Persan puis de la seconde Place de la République à Paris, les moyens démesurés utilisés, avec la suppression d’arrêtes de transilien pour empêcher de se rendre à Persans puis le harcèlement policier pour empêcher de se rendre à la marche à Paris n’ont pas suffi ; l’acharnement continue avec des menaces de poursuites pour les participants.

Cette offensive contre LFI de diabolisation et criminalisation de l’opposition de gauche aux côtés de l’extrême droite symbolise le nouveau saut dans le tournant autoritaire opéré ces derniers mois. La séquence de la réforme des retraites avait déjà montré que le gouvernement était prêt à tout pour faire taire la contestation, entre 49-3, arrestations massives, et dissolution de l’organisation écologiste les Soulèvement de la Terre. Après la révolte des banlieues, cette répression passe un cap avec 3400 arrêtés, des centaines de jeunes condamnées, des mesures de couvre-feu, et la présence inédite de brigades anti-terroristes pour réprimer des émeutes sur le territoire métropolitain. Signe de cette accélération, les menaces de poursuites judiciaires de la macronie visent désormais des députés et des organisations institutionnelles comme la France Insoumise, sous prétexte qu’elle ne s’aligne pas avec le discours réactionnaire dominant.

L’Etat a voulu isoler les quartiers populaires pour les réprimer en tout impunité, et s’en prend désormais à toutes les organisations qui limitent cet isolement en appelant ou participant à des manifestations contre les violences policières. Malgré les désaccords que nous entretenons avec la France Insoumise, et notamment à propos de sa participation aux rassemblements devant les mairies aux côtés de l’ensemble des forces politiques, macronie et droite réactionnaire comprise, et l’insuffisance du programme défendu par l’appel « Notre pays est en deuil est en colère » qui a appelé à la marche du 8 juillet que nous évoquions dans un article précédent, il est essentiel de faire front face aux attaques du gouvernement, des médias et de l’extrême-droite et ne pas laisser le champ libre à la macronie dans son offensive autoritaire.


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