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Ami des dictateurs

Macron rencontre Ben Salmane : le prince-boucher, ami de l’impérialisme français

Depuis décembre 2021, c’est la troisième fois que le prince héritier saoudien et le chef d’Etat français se rencontrent officiellement. En macronie, le boucher saoudien est plus que jamais fréquentable. Pétrole, guerre en Ukraine et marché d’armes obligent.

Nathan Deas

20 juin 2023

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Macron rencontre Ben Salmane : le prince-boucher, ami de l'impérialisme français

Crédit photo : Wikimedia Commons

Vendredi 16 juin, pour la deuxième fois en un an (la troisième depuis décembre 2021), Mohammed Ben Salmane (MBS), le prince héritier d’Arabie saoudite, a franchi le perron de l’Elysée après une chaleureuse poignée de main avec Emmanuel Macron. On savait les démocraties occidentales capables de s’accommoder d’à peu près tout. La guerre en Ukraine, les changements géopolitiques qu’elle entraîne, les problèmes d’approvisionnement en pétrole et en gaz ou encore la situation instable au Moyen-Orient (notamment au Liban) ont eu raison des dernières réticences des dirigeants impérialistes et de la France vis-à-vis de MBS.

Il y avait pourtant des raisons d’en avoir. Assassinat et démembrement de Jamal Khashoggi en 2018 (un journaliste du Washington Post critique du pouvoir), pratique de la torture et arrestations arbitraires, décapitations, dictature moyenâgeuse et charia : la « morale » occidentale s’arrête au portefeuille de son interlocuteur. Tout comme la cabale islamophobe de Macron et son gouvernement (qui semblent donc juger les porteuses d’« abaya » moins fréquentables que les « décapitateurs » du droit islamique saoudien).

Il faut dire que le portefeuille de MBS a quelques arguments de poids. Le prince héritier saoudien ambitionne en effet que son pays soit plus qu’un exportateur de pétrole et se dirige plutôt vers une véritable économie de production. Sur le plan bilatéral, les deux chefs d’Etat entendent donc « développer et approfondir le partenariat entre les deux pays » et la France se dit disposée à « accompagner l’Arabie saoudite dans le renforcement de ses capacités de défense ». Comprendre : maintenir des relations fructueuses avec le premier client des marchands d’armes français, avec 703 millions d’euros de commandes en 2020. Quand bien même ces « ventes » servent à mener la guerre au Yémen, qui a fait plusieurs centaines de milliers de morts depuis 2015. Realpolitik oblige.

Emmanuel Macron a rappelé en outre « la volonté des entreprises françaises de continuer d’accompagner l’Arabie saoudite dans la mise en œuvre de son ambitieuses Vision 2030 », un programme de réformes économiques et sociales. Et de mettre en avant : « le savoir-faire reconnu des entreprises françaises, notamment en matière de transition énergétique, de transport, de santé et dans les nouvelles technologies ». En résumé, derrière le paravent de comédie diplomatique, il est surtout question de « gros billets » et de maintenir l’inféodation de l’Arabie saoudite aux puissances impérialistes.

Pour cause, alors que la pétromonarchie saoudienne tente de multiplier ses partenariats, face au retrait nord-américain du Moyen-Orient et à l’émergence de nouveaux acteurs dans la région (notamment la Turquie) la France entend maintenir ses positions. Depuis sa création en 1932, le pays est en effet, une place forte régionale des impérialismes occidentaux. Armé jusqu’aux dents par les Etats-Unis et ses alliés européens, notamment la France et le Royaume-Uni, le régime saoudien joue un rôle de gendarme au Moyen-Orient en y défendant les intérêts de ses donneurs d’ordres et en faisant bénéficier de ses considérables réserves d’hydrocarbures les compagnies pétrolières américaines.

Dans ce cadre, Ryad et Paris ont d’ailleurs fait de la situation au Liban l’un des points chauds de leur entrevue, communiquant sur leur volonté partagée de faire émerger un autre pouvoir capable de mettre en œuvre une feuille de route complète de réformes et de sauvetages économiques. En d’autres termes, de maintenir le pays sous ingérence « occidentale », notamment face à l’influence chiite grandissante du Hezbollah et de la République islamique d’Iran.

MBS est donc venu grossir le rang des dictateurs « amis de la France » reçus avec les honneurs de l’Elysée. S’il restait quelques jours de plus, il aurait eu l’occasion, le 14 juillet prochain, de rencontrer le président égyptien Abdel-Fattah al-Sissi et le premier ministre de l’Inde, Narendra Modi, invités pour l’occasion. Après tout, la boucherie est un art de vivre à la française.


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