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Economie

Moody’s dégrade la dette israélienne : le front économique se complique pour Netanyahou

Moody’s, une des plus grandes agences de notation internationale, a annoncé rabaisser la note de la dette d'Israël de A2 à A1. Cette dégradation est directement liée à la poursuite de la guerre génocidaire depuis le 7 octobre.

Mariam Amel

12 février

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Moody's dégrade la dette israélienne : le front économique se complique pour Netanyahou

Pour la première fois de son histoire, la note de la dette d’Israël a atteint le niveau A2 selon l’évaluation de l’agence Moody’s, l’une des principales agences de notation internationales, chargées d’évaluer la crédibilité d’un gouvernement en matière d’obligations financières et de dette. L’agence a abaissé la note d’Israël en soulignant que celle-ci pourrait encore baisser étant donné la volonté du gouvernement de poursuivre sa guerre, subordonnant ainsi son économie à sa politique coloniale.

Tandis que les agences de notations avertissaient déjà des risques économiques en Israël, liés au projet gouvernemental de réforme judiciaire et aux troubles internes, dans son communiqué l’agence Moody’s se concentre principalement sur les dommages économiques causés par la guerre à Gaza. Moody’s explique que la principale raison de cette décision est « l’évaluation selon laquelle le conflit militaire en cours avec le Hamas, ses conséquences et ses répercussions plus larges accroissent sensiblement le risque politique pour Israël et affaiblissent ses institutions exécutives et législatives ainsi que sa force budgétaire ».

Cette dégradation de la note de crédit à A2, cinq crans au-dessus de la catégorie d’investissement spéculatif, rendra les emprunts plus coûteux pour Israël, aggravant ainsi les répercussions économiques post-guerre. Moody’s rajoute que « bien que les combats à Gaza puissent diminuer en intensité ou s’arrêter, l’absence actuelle d’accord durable met en lumière l’incertitude ». L’agence anticipe également une augmentation significative du fardeau de la dette d’Israël et estime que les dépenses de guerre pourraient presque doubler d’ici à la fin de l’année (en comparaison aux niveaux de 2022) dans son scénario de référence.

Face à cette annonce, le gouverneur de la banque d’Israël Amir Yaron a déclaré dimanche qu’Israël était capable de se remettre des conséquences de la guerre et que l’économie du pays est forte : « Nous avons su nous relever des moments difficiles du passé et revenir rapidement à la prospérité, et l’économie israélienne a la force de garantir que ce sera également le cas cette fois-ci ». Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réagi de son côté, au rapport de Moody’s vendredi dernier : « La dégradation de la note n’est pas liée à l’économie, elle est entièrement due au fait que nous sommes en guerre. La côte remontera dès que nous gagnerons la guerre – et nous gagnerons la guerre ».

Le ministre ultranationaliste des Finances, Bezalel Smotrich a de son côté répondu à Moody’s en rapportant qu’« elle n’incluait pas d’arguments économiques sérieux et constituait complètement un manifeste politique basé sur une vision géopolitique pessimiste et infondée qui reflétait un manque de confiance dans la force d’Israël ». Il a ajouté : « nous ne tirons pas notre force nationale, sécuritaire, sociale et économique de la façon dont nous sommes jugés dans le monde, mais d’une foi profonde dans la justesse de [notre] voie ».

Bien que le bilan économique post-guerre demeure incertain et que l’évaluation de Moody’s ne représente qu’une estimation chiffrée qui ne prend pas en compte du soutien des plus grandes puissances économiques mondiales à Israël, cela ne suffit pas à écarter la possibilité d’une crise économique qui pourrait peser très lourd sur l’Israël. Depuis le 7 octobre, l’économie israélienne est mobilisée pour soutenir une guerre meurtrière et coûteuse. Certains économistes comparent l’impact sur l’économie à la pandémie de coronavirus de 2020, voire pire. Les dépenses et les emprunts publics ont augmenté, tandis que les recettes fiscales ont chuté. Selon la Banque d’Israël, le produit intérieur brut devrait passer de 3 % de croissance prévue en 2023 à 1 % en 2024.

Le coût de la guerre ne se limite pas au matériel militaire, mais englobe également la mobilisation de plus de 200 000 réservistes, la baisse des investissements étrangers en raison de l’instabilité politique et de la crise qu’a constitué l’évacuation de plus de 200 000 Israéliens vivant près de Gaza et à la frontière libanaise. L’ancien gouverneur adjoint de la Banque d’Israël, Zvi Eckstai, rapporte que le budget gouvernemental pour le quatrième trimestre de 2023 était de 10 milliards de dollars et pourrait atteindre 20 milliards de dollars au premier trimestre de 2024. D’après les indications de la Banque Centrale, les frais quotidiens de la guerre s’élèvent à 260 millions de dollars. À cela s’ajoutent des dépenses de l’ordre de 600 millions de dollars par semaine, couvrant les coûts liés aux réservistes, aux évacuations d’Israéliens, au chômage, ainsi que les conséquences du départ d’un nombre considérable de travailleurs étrangers et de la suppression des permis de travail pour environ 160 000 ouvriers palestiniens.

Tous ces éléments soulignent la difficulté pour Israël de surmonter ces défis économiques. D’autant plus alors que la crise politique interne s’intensifie avec un mécontentement social croissant. Après le grand mouvement déclenché par la contestation contre la réforme judiciaire, la défiance à l’égard du gouvernement s’exprime actuellement autour de la question des otages, mais aussi sur les objectifs inatteignables de Netanyahou dans la poursuite de la guerre, avec l’objectif d’évacuer les Palestiniens à Rafah sans aucun plan de sortie de guerre qui puisse garantir une stabilité économique et politique. Compte tenu de ces difficultés, la question économique, avec ses conséquences dans l’attitude de la population, est ainsi en train de devenir un front très inquiétant pour Israël.


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