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Antiracisme

Des milliers contre les violences policières à Paris malgré l’interdiction : une victoire face à Macron !

Alors que le gouvernement avait interdit la marche organisée chaque année à Beaumont-sur-Oise, plusieurs milliers de personnes ont manifesté pour la justice et la vérité pour Adama et toutes les victimes de violences policières à Paris ce samedi. Une victoire pour l’ensemble de notre camp social.

Joachim Bertin

9 juillet 2023

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Des milliers contre les violences policières à Paris malgré l'interdiction : une victoire face à Macron !

Ce samedi, des rassemblements contre les violences policières étaient appelés dans différentes villes de France en réponse à l’offensive du gouvernement contre les révoltes dans les quartiers populaires et à l’occasion de la marche annuelle pour Adama à Beaumont-sur-Oise. Une manifestation qui pour l’occasion avait été interdite par un État aux abois, prétextant la crainte de troubles pour écraser le droit de manifester et empêcher que ne se tienne une mobilisation contre les violences policières et le racisme d’État rejoint par un large front d’organisations.

Ni les menaces, ni la répression n’auront raison de la lutte contre les violences policières

Les menaces de l’État, la répression n’ont cependant effrayé ni le Comité Adama, ni ses alliés, ni plusieurs milliers de personnes venues se rassembler place de la République à Paris. Face à l’interdiction de la marche par le préfet de l’Oise, Assa Traoré avait appelé ce vendredi soir à tenir une manifestation à 15h Place de la République. Une mobilisation, rapidement interdite elle aussi par le préfet de Paris. Aussi, samedi, avant même le rassemblement, un large dispositif policier avait été déployé tout autour de la place de la République, quadrillée de policiers contrôlant le moindre groupe s’apparentant à des manifestants et imposant des amendes de 135€ à toute personne aperçue avec un t-shirt réclamant « Justice pour Adama ».

Sur place, une conférence de presse a ouvert l’après-midi. Assa Traoré y a dénoncé une « interdiction politique » : « Ils ne veulent pas que le comité Adama puisse s’organiser et qu’on puisse rassembler nos colères ». « Il y a des hélicoptères à Beaumont-sur-Oise. Avec la complicité de la SNCF, ils ont bloqué les trains, ils ont bloqué les bus. Mais ils ne nous feront pas taire » a-t-elle ensuite expliqué, évoquant tous les efforts déployés par l’Etat pour intimider et réprimer les participants à la marche.

Un discours tenu sous une grosse pression policière, les intervenants étant quasiment nassés par la police. « Aujourd’hui la France ne peut donner de leçon de morale à aucun autre pays. Sa police est raciste, sa police est violente. Même dans la mort, ils pourchassent nos morts, ils veulent les empêcher d’exister » a poursuivi Assa Traoré. Au micro se sont ensuite succédées les prises de parole d’un large front d’organisation des quartiers populaires mais aussi de syndicats (la CGT, Solidaires, l’UNEF étaient présents, ainsi que des militants FSU) ou encore Attac. De nombreuses organisations politiques ont également soutenu l’initiative de cette marche pourtant interdite, à l’image de la FI, de EELV, du NPA, de Lutte Ouvrière ou de Révolution Permanente.

Après la conférence de presse, les manifestants ont réussi à se dégager du dispositif policier pour rejoindre le centre de la Place de la République, avant de partir en manifestation sauvage sur le Boulevard Magenta. Dans le cortège, plusieurs milliers de personnes se sont agrégées, scandant « Justice pour Adama », « Justice pour Nahel », « Pas de justice, pas de paix » ou encore « Tout le monde déteste la police ». Une démonstration de force face aux tentatives d’interdiction et au dispositif pensé pour empêcher toute mobilisation réussie, qui viendrait mettre à mal le discours du gouvernement sur l’impossibilité de tenir la marche.

« C’est pas le gouvernement qui décide si on doit marcher pour nos morts, pour dénoncer l’impunité policière. Vous avez eu le dernier mot, aujourd’hui vous décidez ! » a finalement harangué Assa Traoré à la fin de la manifestation, depuis le sommet d’un arrêt de bus. « Quand on nous refuse de marcher, c’est pour que le monde entier ne puisse pas voir comment on peut s’organiser, cette organisation qui est importante pour sauver des vies » a-t-elle conclu, appelant à mettre fin à la manifestation pour éviter la répression après cette victoire.

L’État réprime mais ne pourra pas effacer cette victoire

La mobilisation réussie s’est conclue sur une violente répression contre un des frères de Adama Traoré et un membre du Comité Adama. Dans une vidéo publiée sur les réseaux, on peut voir Youssouf Traoré violemment plaqué au sol avant de subir un plaquage ventral par quatre policiers de la BRAV, dont un policier qui lui presse le dos avec son genou. Des images qui rappellent directement la mort d’Adama Traoré, tué suite à un plaquage ventral par les gendarmes en 2016. Youssouf a ensuite été menotté puis interpellé pour être amené au commissariat du 5ème arrondissement, d’où il est sorti en début de soirée pour être hospitalisé.

Au même moment, le militant des quartiers populaires Samir Elyes était lui aussi interpellé et placé en garde-à-vue. Selon l’ONG d’investigation indépendante Index présente sur place, des violences policières ont également été perpétrées contre des journalistes.

Une violente répression face à laquelle il faut exiger la libération des deux militants, mais qui n’effacera pas la démonstration de ce jour. Alors que plusieurs milliers de personnes se sont également mobilisées dans différentes villes du pays, notamment à Angoulême, Marseille, Metz, Strasbourg, Bordeaux, cette manifestation parisienne est une victoire politique contre les offensives de l’État, des éditorialistes, et des tribunaux face à la révolte des quartiers populaires. Alors que le gouvernement trouve absolument insupportable que des jeunes de quartiers populaires, des prolétaires noirs et arabes, relèvent la tête face aux violences de sa police, la manifestation de ce samedi a montré, en plein cœur de Paris, que toutes les mesures autoritaires du gouvernement ne pourront faire taire cette révolte.

Ce d’autant plus qu’à la différence de 2005, des organisations politiques, syndicales et associatives se sont liées ce 8 juillet à une marche interdite par l’État, que l’ensemble des médias bourgeois présentaient comme un quasi-acte de sédition face à leur République. Alors que la bourgeoisie et son État pèsent de tout leur poids pour inciter les forces politiques et syndicales à se dissocier et à condamner tout mouvement contre les violences policières, la présence de députés de la FI et de EELV, de figures syndicales de la CGT, de Solidaires, de militants de la FSU est un acquis pour le mouvement antiraciste et pour préparer les luttes de demain.

Une unité face à laquelle certaines organisations de la gauche institutionnelle, telles que le PCF ou le PS, avaient cependant choisi de se dissocier de la marche. « On a fait la démonstration de l’unité la plus large » s’est ainsi félicité Anasse Kazib sur place, avant de noter : « il y a des organisations de gauche qui n’ont pas appelé, qui ont même dit qu’il ne fallait pas manifester : ces gens-là ne sont pas des alliés, ils ont choisi leur camp. Aujourd’hui c’était pas uniquement la question des violences policières, du racisme ou de l’affaire Adama mais c’était une question de principe fondamental, de base, celui de la liberté de manifester dans ce pays. Que des organisations n’appellent pas à dénoncer ce qui est en train de se passer c’est assez scandaleux. »

Mais pour combattre Macron, comme nous le notions à propos de l’appel unitaire « Notre pays est en deuil et en colère », ce front devra se doter de perspectives à la hauteur de la situation, en commençant par exiger l’amnistie de l’ensemble des jeunes interpellés, l’abrogation de l’ensemble des lois sécuritaires et racistes et l’abandon de la loi immigration, et en portant un programme qui permette de construire une riposte d’ensemble. Celui-ci devrait articuler la lutte contre le durcissement du régime à la question de l’augmentation générale des salaires et leur indexation sur l’inflation, la lutte contre la casse des retraites et des services publics, le partage du temps de travail, pour nouer de façon durable l’alliance entre les quartiers populaires et les organisations du monde du travail qui n’a pas été rendue possible au cours des derniers mois.

Face à un gouvernement radicalisé, un tel programme ne pourra être défendu que dans la rue et par les méthodes de la lutte des classes. De ce point de vue, il y a urgence de discuter avec l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier, de la gauche et du mouvement social d’un plan de bataille pour construire la contre-offensive à la rentrée, autour d’une stratégie à même d’unifier notre classe et de créer un véritable rapport de forces contre Macron.


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