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Crise politique

Rishi Sunak, 42 ans, 730 millions de livres : le Royaume-Uni a un nouveau Premier ministre

Rishi Sunak devient ce mardi le nouveau leader du parti conservateur et Premier Ministre du Royaume-Uni. Il est ainsi le quatrième premier ministre britannique en 6 ans, prenant la succession de Liz Truss après 44 jours au pouvoir, sur fond de crise politique et économique.

Olive Ruton

25 octobre 2022

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Crédits photo : JUSTIN TALLIS / AFP

Depuis cet été, la crise du régime au Royaume-Uni s’accélère. Après la démission de Boris Johnson, Liz Truss a fait un passage éclair au 10 Downing Street, en restant 6 semaines au pouvoir. Le mouvement de grèves massives pour les salaires continue de s’approfondir depuis la fin du printemps, et la colère gronde face à l’explosion des prix de l’énergie. C’est dans ce contexte que Rishi Sunak, le nouveau leader du parti conservateur et Premier Ministre prend ses fonctions ce mardi, après une audience avec le roi Charles. Depuis la démission de Liz Truss, il était le principal favori pour le poste, et le seul à avoir finalement atteint le chiffre des 100 avis favorables des députés du parti conservateur. L’ex-ministre de l’Economie, qui en quittant son poste n’a pas été pour rien dans la chute de Boris Johnson (tous deux ont été épinglés dans l’affaire du Party Gate), n’a en effet connu aujourd’hui aucune concurrence. Alors qu’il avait dû s’incliner face à Truss le 6 septembre dernier, cette fois, Penny Mordaunt et Johnson lui-même, qui disait envisager un retour, ont finalement renoncé à la course au titre.
 
Alors que la population subit une inflation de 10 % en moyenne (quand les salaires nominaux n’ont augmenté que de 7 % en un an), c’est le premier ministre le plus riche de l’histoire du pays qui vient d’être désigné. Sa fortune est estimée à 730 millions de livres sterling (environ 860 millions d’euros) ! Un pactole obtenu par la spéculation financière de la part de cet ancien de chez Goldman Sachs et du fonds de pension Theleme Partners, et par son mariage avec Akshata Murty, fille de la cinquième fortune indienne, Narayana Murthy. Rishi Sunak enchaîne les records : premier ministre non-blanc à la tête du Royaume-Uni, plus jeune Premier ministre et surtout le plus riche ! Et c’est bien cette caractéristique ainsi que son passé de financier qui compte pour les capitalistes britanniques.

Cette fortune tapageuse illustre toute la déconnexion entre la classe dominante britannique et le quotidien des travailleuses et des travailleurs du Royaume-Uni qui font face à une chute brutale de leur niveau de vie. Les premiers scandales ont d’ailleurs déjà éclaté à ce sujet, à commencer par celui autour du statut fiscal de sa femme « non-domiciliée » au Royaume-Uni, qui permet au couple d’économiser 20 millions de livres d’impôts, mais aussi sur des sujets comme le coût énergétique annuel de la piscine personnelle que Sunak vient de se faire construire, équivalent à 6 fois la facture énergétique moyenne d’une famille !
 
Alors que le navire Liz Truss a coulé à pic sur le programme économique, Rishi Sunak est attendu au tournant par un parti conservateur extrêmement divisé, en mauvaise posture pour les prochaines élections générales. L’échec ridicule de Liz Truss, désavoué par les marchés financiers qu’elle voulait pourtant servir, a illustré toutes les limites et illusions d’un retour au « thatcherisme ». La baisse massive des impôts pour les plus riches qu’elle proposait avec son ministre des Finances Kwasi Kwarteng, qui aurait coûté entre 100 et 200 milliards de livres à l’État, a été torpillé par les capitalistes des marchés financiers, agravant l’effondrement de la valeur de la livre sterling, et renforçant la colère qui s’exprime dans la rue. Autant de réactions qui ont précipité le retrait de la mesure, du ministre et de la cheffe du gouvernement, contestée jusque dans son propre parti.
 
Sunak va devoir prendre une autre voie que celle de l’ex-première ministre. Très critique depuis le début du programme de Truss, qu’il qualifiait de « conte de fée », Sunak a acquis par là une certaine crédibilité aux yeux de ses partisans et des spéculateurs des places boursières. Il appuie cela en se présentant comme plus orthodoxe et pragmatique pour faire face à la flambée des prix. Des défis pour lesquels à la fois les élus du parti conservateur et les marchés semblent lui accorder plus de confiance, le passé de financier de Sunak étant pour les derniers un signal plutôt favorable.

Face aux difficultés du parti conservateur, le Labour multiplie les appels du pied à la bourgeoisie pour apparaître comme l’alternative responsable d’un point de vue économique. Sa politique d’extrême tiédeur, pour ne pas dire de rejet, vis-à-vis des grèves va dans ce sens.
 
Face à la crise, non seulement économique, mais aussi politique qui traverse le Royaume-Uni et met en grande difficulté la classe dirigeante, la classe ouvrière du Royaume-Uni a un rôle à jouer. Pour ces travailleurs qui se sont mobilisés depuis cet « été du mécontentement » avec des grèves historiques, inédites depuis 40 ans, qui ont mobilisé autant de secteurs clés que les cheminots, les dockers, les travailleurs du pétrole, les postiers ou les travailleurs de la santé, la méthode de la grève doit continuer de se développer et de s’organiser, de se coordonner, pour mettre à mal ce nouveau gouvernement. Le mouvement qui a fait trembler Johnson doit se donner les moyens de s’attaquer aux milliardaires qui dirigent toute la vie économique et politique du pays. Et pour cela l’heure doit être à la coordination et à la construction d’un vrai plan de bataille, qui unisse les différents secteurs en lutte, en dépassant les directions syndicales qui ont jusqu’ici travaillé à maintenir chaque secteur isolé. Aux passations successives de pouvoir entre des politiciens qui cherchent tous les moyens de faire payer la crise aux travailleurs, il faut répondre par l’amplification de la grève et dans la rue.


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