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Moyen-Orient

Piraterie et tirs de missiles : au Yémen, comment les Houthis veulent profiter de la guerre à Gaza

Avec le détournement d’un navire commercial par les Houthis, les tirs de missile et incidents avec les forces armées américaines déployées en Mer Rouge se multiplient. En jouant sur la crainte d’un embrasement régional, les Houthis veulent peser sur les négociations de paix avec l’Arabie Saoudite, affirmer leur rôle sur la scène régionale et renforcer leur légitimité en interne.

Sayf Zalil

27 novembre 2023

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Piraterie et tirs de missiles : au Yémen, comment les Houthis veulent profiter de la guerre à Gaza

L’abordage du Galaxy Leader par les forces armées houthis le 19 novembre dernier en Mer Rouge.

Dimanche 19 novembre, les forces armées houthistes au Yémen ont détourné le Galaxy Leader, un navire commercial appartenant à la société Ray Car Carriers dirigée par l’homme d’affaires israélien Abraham Rami Ungar, pendant qu’il naviguait en Mer Rouge en provenance de Turquie vers l’Inde. Les images de l’assaut diffusées par les houthistes sont spectaculaires et expriment leur volonté de publiciser ce coup d’éclat.

Sur les vidéos, on peut ainsi voir une dizaine d’hommes, armés d’AK-47, largués sur le cargo par un hélicoptère floqué des drapeaux palestinien et yéménite. Une fois que le navire est sous contrôle et escorté par des vedettes, l’un des assaillants scande le slogan du mouvement chiite : « Dieu est grand, mort à l’Amérique, mort à Israël, malédiction sur les Juifs, victoire à l’Islam ».

Cette attaque a été revendiquée dans le cadre de la déclaration de guerre du mouvement Houthi à Israël, en représailles à l’offensive militaire menée par Tsahal contre Gaza après le 7 octobre. Dans un message posté sur X, Yahia Sarei, le porte-parole des forces armées houthistes, a ainsi mis en garde « tous les navires appartenant ou traitant avec l’ennemi israélien » et affirmé qu’elles « continueront à mener des opérations militaires contre l’ennemi israélien jusqu’à ce que l’agression contre Gaza cesse ».

« Aucun israélien à son bord » a cependant affirmé le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, alors que le cargo était exploité par la société japonaise Nippon Yusen Kaisha (NYK). Les vingt-cinq membres d’équipage retenus en otage sont quant à eux de nationalités bulgares, ukrainienne, philippine ou encore mexicaine.

Une semaine plus tard, ce dimanche 26 novembre, c’est le Central Park, un pétrolier appartenant à une société britannique elle aussi dirigée par un homme d’affaire israélien, qui a été la cible d’une tentative de détournement dans le Golfe d’Aden. L’armée américaine qui est intervenue pour déjouer cette attaque, a dans un premier temps pointé la responsabilité des houthistes, accusés d’avoir menacé le pétrolier de représailles s’il ne se détournait pas vers le port yéménite de Hodeïda, et d’avoir tiré des missiles balistiques en direction de la zone où se trouvait le navire. Cependant, ce lundi le Pentagone a finalement accusé « des pirates armés somaliens » d’être à l’origine de l’attaque et non les Houthis qui ne l’ont d’ailleurs pas revendiquée.

Toujours est-il que si depuis le 7 octobre, l’impact des tirs de missiles et de drone Houthis vers Israël, avait jusque-là été plutôt limité puisque les projectiles avaient été interceptés par le système de défense israélien ou les destroyers américains déployés en Mer Rouge, le détournement du Galaxy Leader au niveau du détroit de Bab Al-Mandeb et la multiplication des incidents en Mer Rouge, constituent un pas de de plus dans l’escalade vers un potentiel embrasement régional consécutif de la guerre à Gaza. Profitant de la situation, le mouvement Houthi affirme sa position tant en interne sur la scène politique yéménite que dans les rapports de force régionaux en menaçant un axe central du commerce maritime international.

Houthisme, populisme et lutte contre Israël

Le mouvement Houthi – du nom de son fondateur Hussein Al-Houthi – prend ses racines chez les notables de la communauté zaydiste, une des branches de l’islam chiite, au Nord du Yemen dans la région de Saada. Dans Orient XXI, Laurent Bonnefoy explique que d’un mouvement culturel initialement porté pour « redynamiser le zaydisme » qui avait été marginalisé au sein de la République Arabe du Yémen après avoir dirigé le Nord-Yémen pendant près d’un millénaire, les houthistes vont commencer à incarner l’opposition au pouvoir.

Cette transition va s’effectuer d’abord avec la critique de l’alliance militaire mise en place par le régime avec les Etats-Unis dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme » au début des années 2000. Puis en affrontant la répression lors de la guerre civile de 2004 dans le Nord-Yémen.

Plus tard, ils profiteront du mécontentement populaire à l’origine des soulèvements des Printemps Arabes qui poussent l’ancien président, Ali Abdallah Saleh, à quitter le pouvoir en 2012. Ainsi, en 2014, les rebelles houthistes marchent sur la capitale Sanaa en s’appuyant sur un discours populiste contre le gouvernement, mais aussi pour « le retour des subventions aux produits pétroliers qui ont conduit au doublement du prix des carburants, menaçant le pouvoir d’achat des yéménites ».

Cependant en accédant au pouvoir, le mouvement houthiste met en place un mode de gouvernance non moins autoritaire et corrompu que le précédent gouvernement. Détournement de l’aide humanitaire, répression des oppositions, rackets, non-respect des droits démocratiques élémentaires, Maysaa Shuja Al-Deen décrit le régime Houthi comme « un pouvoir fragile, aux racines familiales ». Alors que le blocus mis en place par l’Arabie Saoudite et ses alliés affame la population et que les fonctionnaires ne perçoivent que très partiellement leur salaire, il doit désormais renforcer sa base sociale pour parvenir à se maintenir.

A ce titre, la cause palestinienne apparaît comme une opportunité pour les houthistes de gagner en légitimité. Par ailleurs, à l’heure de la normalisation entre les régimes arabes et Israël, cette position permet de gagner le soutien des masses populaires du Maghreb et du Moyen-Orient, qui s’inscrivent en porte-à-faux avec leur gouvernement et sont largement solidaires de la lutte du peuple Palestinien.

L’axe de la Résistance, l’Arabie Saoudite et Israël : la concurrence pour le leadership régional

Le mouvement Houthi revendique ses opérations militaires contre Israël en tant que composante de « l’axe de la Résistance » dirigé par le régime iranien et qui inclut également le Hezbollah libanais. Ainsi depuis le 7 octobre, les houthistes participent à une guerre de basse intensité contre l’Etat sioniste, principalement en envoyant plusieurs drones et missiles de longue-portée vers le Sud d’Israël.

Avec peu de chances de parvenir à toucher leur cible située à plus de 2.000 km de la frontière yéménite, ces actions s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie visant à attirer l’attention des défenses de Tsahal sur d’autres fronts, à l’instar des opérations militaires du Hezbollah à la frontière libano-israélienne. L’objectif officiellement poursuivi consiste à empêcher Israël de concentrer toutes ses forces armées contre Gaza et faire pression sur ses alliés en menaçant d’un potentiel embrasement régional.

« Les Houthis déclarent la guerre à Israël, mais leur véritable cible est ailleurs », décryptait cependant l’analyste Zoran Kusovac pour Al Jazeera. En effet, si l’impact des tirs de missile Houthis sur l’appareil de défense israélien est resté jusque-là largement symbolique, dans les faits, il pèse surtout sur les rapports de force régionaux. En particulier vis-à-vis de l’Arabie Saoudite voisine, qui dirige la coalition armée par les puissances impérialistes au Yémen, et qui est en phase de négocier un accord de paix avec le mouvement houthiste.

Et pour cause, après l’échec de cette coalition pour maintenir au pouvoir l’ancien président Abdrabbo Mansour Hadi, le prince héritier Mohamed Ben Salman tente désormais de tourner la page de la guerre au Yémen pour se concentrer sur les grands projets économiques et culturels censés permettre au Royaume de s’ouvrir sur l’Occident. « L’Arabie saoudite n’a aucune envie de voir des missiles et des drones survoler son territoire en direction d’Israël, ni de voir ses plans Vision 2030 pour le tourisme et le commerce en mer Rouge compliqués par une menace maritime accrue » explique ainsi Elisabeth Kendall, chercheuse à l’Université d’Oxford, dans L’Orient-Le Jour

Les opérations militaires menées contre Israël permettent donc aux houthistes de faire pression pour obtenir le maximum de concessions de la part de l’Arabie Saoudite dans le cadre d’un accord pour un cessez-le-feu permanent, notamment le versement des salaires des fonctionnaires yéménites impayés depuis le début de la guerre civile et la reprise des exportations de gaz et de pétrole. « Les Saoudiens comprennent qu’ils sont dans une situation de vulnérabilité énorme : les houthistes tiennent en otage leur développement économique » conclut le politiste canadien Thomas Juneau dans Le Monde.

C’est d’ailleurs l’un des objectifs du rapprochement entre Ryad et Téhéran parrainé par Pékin, le régime iranien étant considéré comme le principal soutien à l’international du mouvement Houthi. Les houthistes ne sont donc pas les seuls à renforcer leur position dans cette affaire. Alors qu’avant le 7 octobre le Royaume wahhabite cherchait à obtenir un pacte militaire avec les Etats-Unis en échange de la normalisation de ses relations avec Israël, la République islamique d’Iran peut désormais profiter de la situation pour mettre en place une forme de chantage sur la sécurité de ses voisins dans la région en faisant jouer son influence sur les groupes qui forment « l’axe de la Résistance ».

Embrasement régional, choc pétrolier : quels risques pour une escalade ?

Les actions des forces armées houthistes dans la Péninsule Arabique et la déstabilisation de la Mer Rouge notamment au niveau du détroit de Bab Al-Mandeb pourraient avoir des conséquences multiples. D’abord, elles pourraient impacter le commerce mondial, et en particulier provoquer de nouvelles augmentations du prix des hydrocarbures, renforçant la dynamique inflationniste actuelle, à l’instar des chocs pétroliers.

« Les analystes ont averti que si les pourparlers de paix avec les miliciens houthis soutenus par l’Iran au Yémen venaient à échouer, cela pourrait entraîner des perturbations dans l’approvisionnement pétrolier de la région », développe ainsi le journal spécialisé Energynews. Et pour cause, l’action des forces armées houthistes dans le cadre de la guerre civile au Yémen menace non seulement le commerce fluctuant par le canal de Suez, mais aussi les installations pétrolières saoudienne et émiratis en riposte à l’intervention militaire de la coalition.

Une autre conséquence pourrait être une réaction des EtatsUnis ou de l’Arabie Saoudite qui aille dans le sens de l’escalade vers un potentiel embrasement régional. Si le redéploiement américain au Moyen-Orient après le 7 octobre a été présenté par Joe Biden comme essentiellement dissuasif, il n’en reste pas moins un facteur d’embrasement dans la région. L’envoi du destroyer américain USS Carney en Mer Rouge, de plusieurs milliers de soldats et de deux porte-avions en Méditerranée orientale et dans le Golfe d’Oman, constituent autant d’éventuelles cibles, qui, si elles étaient touchées, pourraient pousser la première puissance mondiale à riposter ouvertement pour conserver sa crédibilité.

Sans aller jusque-là, mais toujours dans une logique d’escalade, l’impérialisme américain pourrait également durcir les sanctions contre le régime Houthi et la population yéménite, voire relancer la guerre par procuration, en armant et en finançant comme il le fait depuis le début de la guerre civile les forces des pays de la coalition : l’Arabie Saoudite, mais aussi les Emirats Arabes Unis ou Bahreïn. A ce titre, le fait que l’administration de Joe Biden envisage de réintégrer le mouvement Houthi parmi la liste des « organisations terroristes » montre que cette hypothèse peut être envisagée.

Guerre de basse intensité et statu quo : l’aveu de faiblesse de « l’axe de la Résistance »

Cependant, ni les Etats-Unis et leurs alliés, ni l’Iran, ni les houthistes et « l’axe de la Résistance » ne semblent avoir intérêt à relancer une guerre ouverte dans l’immédiat. Du côté des Américains, Joe Biden est fragilisé en interne par les mobilisations anti-guerre dans la rue et au sein du Parti Démocrate, alors que les élections sont prévues dans moins d’un an. Se lancer dans une nouvelle guerre dans ces conditions semble compliqué, d’autant plus que l’OTAN est déjà engagée en Ukraine et que les Etats-Unis ont redéfini leur stratégie depuis plusieurs années pour se concentrer prioritairement sur le front asiatique face à la Chine.

Du côté des pays arabes de la coalition, les réactions de solidarité populaire massive en faveur du peuple palestinien ont paralysé les régimes dans leur entreprise de normalisation avec Israël – à l’exception des Emirats-Arabes-Unis. Par ailleurs, les mobilisations pro-palestiniennes ont également été le lieu d’expression des aspirations sociales et démocratiques, comme en Egypte ou en Jordanie.

La fébrilité des régimes arabes dans cette situation les oblige donc pour l’instant à une forme de retenue vis-à-vis d’éventuelles aventures guerrières menées avec le soutien de l’impérialisme américain et Israël. D’autant plus après l’échec de la coalition au Yémen qui a montré la faiblesse militaire du leadership saoudien, et surtout la superficialité de sa stratégie ainsi que son absence d’intelligence politique.

Enfin le régime iranien et les forces qui composent « l’axe de la Résistance » dont se réclame le mouvement Houthi, n’ont pas plus d’intérêt à un conflit ouvert avec Israël, l’impérialisme américain ou les forces régionales qu’il soutient. La situation ouverte depuis le 7 octobre a mis à nu la faiblesse et la brutalité à l’égard des Palestiniens de l’Etat sioniste, tout en décrédibilisant encore davantage les régimes arabes en voie de normalisation avec lui. Dans ce cadre, « l’axe de la Résistance » sort déjà renforcé sur la scène régionale, à l’instar des houthistes en position de force pour négocier avec l’Arabie Saoudite.

C’est ce qui ressort par exemple de la position exprimée par le leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui peut être considéré comme le porte-parole de l’axe dans le monde arabe. Tout en cherchant à incarner l’unité face à Israël, en dépassant les divisions entre sunnites et chiites et en se posant en alternative aux régimes en voie de normalisation plus ou moins avancée avec l’Etat sioniste, le « Parti de Dieu » veut s’en tenir à une guerre de basse intensité en respectant les « règles d’engagement » dans le Sud-Liban malgré les bombardements de Tsahal qui ont touché y compris des civils libanais.

Comme le mouvement houthiste, le Hezbollah et le régime iranien sont en effet minés par leurs contradictions internes, consécutives à l’accompagnement pour l’un et la mise en place pour l’autre des politiques néo-libérales, au clientélisme, à la corruption et la répression brutale des mobilisations sociales. Dans ce contexte, s’engager dans une guerre ouverte qui serait coûteuse tant en vies humaines que financièrement peut s’avérer risqué et au-delà du rapport de force.

Le régime houtiste est-il vraiment un allié de la cause palestinienne ?

Si le mouvement Houthi revendique les tirs de missiles vers Israël ainsi que le détournement du Galaxy Leader comme des actes de solidarité avec la cause palestinienne, il faut donc cependant remettre ces actes dans le contexte des négociations avec l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis, ainsi que des faiblesses du gouvernement réactionnaire qu’ils forment au Yémen. A ce titre, les houthistes s’inscrivent dans la continuité des régimes qui ont pu, en fonction des opportunités, instrumentaliser la cause palestinienne pour gagner en légitimité populaire et peser sur la scène géopolitique régionale.

Par ailleurs, leur recours à un discours populiste qui confond antisionisme et antisémitisme, appuyé par une lecture confessionnelle du conflit, voire dans certains cas sur des références eschatologiques, contribue à la confusion entretenue par l’Etat d’Israël et ses alliés impérialistes pour nier la nature coloniale du conflit en cours. Il constitue un obstacle vers l’alliance entre les palestiniens et les classes populaires juives israéliennes opposées au gouvernement de Benjamin Netanyahou et au sionisme, pour l’édification d’une société dans laquelle les deux peuples pourraient coexister pacifiquement, projet dont la réalisation n’est possible qu’à travers la construction d’un Etat laïc et socialiste qui s’étende de la mer au Jourdain.

En fin de compte, la mobilisation des masses populaires en toute indépendance des régimes autoritaires et corrompus est la seule perspective conséquente pour s’opposer à l’Etat colonial d’Israël, à l’intervention des puissances impérialistes au Moyen-Orient et à leurs relais dans la région. Depuis le 7 octobre et le retour fracassant de la lutte du peuple Palestinien sur le devant de la scène, les manifestations de soutien face au génocide en cours, les appels au boycott et à la grève dans les entreprises collaborant avec Israël se multiplient un peu partout dans le monde. C’est cette dynamique qu’il s’agit de renforcer et d’étendre en s’organisant à la base.


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