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Instrumentalisation

Accusations de menaces sur un proviseur : une instrumentalisation au service de l’offensive islamophobe

Suite à l'exclusion de sa fille portant une abaya, un parent d'élève, accusé d'avoir proféré des menaces de mort visant un proviseur, a été placé en garde à vue avant d'être relâché. Alors que les faits ne sont pas encore clairement établis, le gouvernement, la droite et l'extrême-droite se sont quand bien même empressés de se saisir de l’affaire.

Alexis Taïeb

8 septembre 2023

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Accusations de menaces sur un proviseur : une instrumentalisation au service de l'offensive islamophobe

Crédits photo : capture d’écran BFM-TV

Ce jeudi, à Clermont-Ferrand, une élève portant une abaya s’est vue refuser l’entrée du lycée Ambroise-Brugières. Dans la foulée, le père de l’adolescente a appelé l’établissement et est accusé d’avoir proféré des menaces de mort à l’égard du proviseur. Après le dépôt d’une plainte, il a été interpellé par la police puis placé en garde à vue, avant d’être relâché dans l’après-midi. Il est poursuivi pour « menace en vue d’intimidation d’une personne chargée d’une mission de service public » et devrait faire l’objet d’une « convocation directe avec contrôle judiciaire » selon la magistrate chargée de l’affaire.

Si l’affaire a rapidement fait la une des médias, les faits ne sont pour l’heure pas encore clairement établis.D’après des informations de Libération et du journal local La Montagne, l’altercation serait survenue en plusieurs temps : la jeune fille aurait d’abord été refusée d’accès à l’établissement en raison de sa tenue en début de semaine, ce qui a entrainé un échange entre son père et le proviseur. Ensuite, jeudi 7 septembre, la même élève est à nouveau interdite d’accès pour les mêmes raisons.

C’est à cette occasion que le père de la jeune fille aurait proféré des menaces contre le proviseur, lors d’un appel téléphonique avec un agent puis un conseiller principal d’éducation du lycée. La nature des propos n’est pas encore clairement établie. Si le père de l’adolescente a reconnu avoir téléphoné au lycée, il nie avoir menacé de mort le proviseur comme l’a indiqué ce vendredi Dominique Puechmaille, procureure de la République de Clermont-Ferrand.

Une altercation immédiatement instrumentalisée par les tenants de l’offensive islamophobe

Le flou qui entoure encore cette affaire n’a pas dérangé le gouvernement, la droite, l’extrême-droite et les médias, qui se sont empressés de l’instrumentaliser. Le ministre de l’Education nationale, Gabriel Attal, s’est précipité devant les caméras de BFM-TV pour saluer les services de police et leur « réactivité, puisque le suspect a interpellé dès hier », et « adresser et apporter tout [son] soutien aux chefs d’établissement » avant de rajouter « qu’ils [le] trouveront toujours à leurs côtés ». Il a en a de même profité pour revendiquer la décision du Conseil d’Etat validant la mesure gouvernementale, estimant que l’interdiction de l’abaya : "C’est la loi, rien que la loi". De nombreux députés de la majorité ont adopté le même discours.

Dans la même veine, le président républicain de la région d’Auvergne Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, en a profité pour revendiquer le dispositif sécuritaire déployé autour de cette rentrée afin de faire appliquer l’interdiction de l’abaya : « J’ai toujours été très clair sur ces sujets, les lycées doivent être des sanctuaires. Cela montre l’intérêt des équipes de sécurité que nous avons créées pour cette rentrée. Nous allons en déployer une sur le lycée Brugière, afin d’apporter de l’apaisement et de la sécurité. » a-t-il déclaré.

Des déclarations du gouvernement, de la droite, et de l’extrême-droite, qui visent à tirer profit de cette affaire pour poursuivre l’offensive islamophobe et la répression qui l’accompagne, et faire perdurer aussi longtemps que possible leur campagne raciste.

Un climat de tension attisé par l’offensive du gouvernement

Cette altercation intervient dans un contexte où le gouvernement, bien aidée par les médias, ne cesse d’attiser les tensions : entre le fichage et le profilage raciste des élèves musulmanes ou supposées comme telles, les remarques sexistes et islamophobes qu’elles subissent, jusque dans les médias de grande écoute, comme BFM-TV, tout est fait pour humilier avec violence les élèves et des parents.

Alors que se succèdent sur les réseaux sociaux les témoignages d’élèves ayant été exclues de leurs établissements pour leurs tenues, le gouvernement cherche également au travers cette instrumentalisation à retourner l’accusation en violences. « A la télé, ils disent ‘dialogue, dialogue,’ mais ils emploient des mots crus, des mots durs, ils n’ont aucune pitié et aucune compassion. Il y avait un gros manque de respect envers nous et les autres filles voilées. » explique Sarah*, lycéenne. Avant d’ajouter : « C’est trop humiliant. Qu’est-ce-que ça veut dire ? Qu’à chaque fois, ils vont contrôler mes tenues ? ». Sa mère explique, quant à elle, avoir été menacée par le directeur de l’établissement, après qu’elle soit partie demander des explications : « Il ne savait pas quoi me dire. A la fin il s’est levé, il est parti. J’ai dit ‘Il est hors de question que je sorte du lycée’, il m’a dit ‘On va appeler la police.’ »

Autant de situations qui illustrent la réalité de l’offensive en cours. Contre toutes manœuvres, une réponse claire doit être opposée au gouvernement, en exigeant le retrait de l’interdiction du port de l’abaya, et plus globalement de la loi de 2004 interdisant le port du voile à l’école, et de toutes les lois et mesures islamophobes.

Face à ces nouvelles attaques du gouvernement, le comité éducation de Révolution Permanente et le Collectif d’Action Judiciaire organise une réunion publique jeudi 14 septembre à 19h à l’AGECA à Paris. Venez rencontrer nos militants, organisons-nous, et préparons la riposte.


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