Depuis le 17 octobre, 39 postières et postiers sont en grève, soit 95% du personnel, au bureau de Poste de Millau (Aveyron). « Les revendications principales des agents concernent l’emploi et l’arrêt des dégradations des conditions de travail » explique un communiqué de SUD PTT. A l’origine du mouvement se trouvent un plan de réorganisation du bureau de poste. « C’est un plan social déguisé » explique pour Révolution Permanente le secrétaire départementale de SUD PTT 81, Julien Danton.
Le plan de réorganisation prévue par la direction a pour principal objectif de transférer la charge de travail qu’effectuait Médiapost, filiale du groupe La Poste spécialisée dans la distribution de papiers publicitaires, aux postiers et postières. Comme nous l’explique Didier Gomez, secrétaire régionale SUD PT 81 : « Il y a plusieurs mois, la direction disait qu’elle ne nous transférerait pas cette charge de travail car elle était accidentogène. Aujourd’hui elle le fait, alors que les postiers ont déjà une charge de travail importante. En plus de cela, ils veulent supprimer cinq postes dès maintenant et trois plus tard ».
Une situation typique dans de nombreux bureaux de poste, où des grèves liées au sous-effectif éclatent régulièrement. « Ils font des plans de réorganisation tous les deux ans. Ce sont des plans sociaux déguisés, explique Julien Danton. Il faut savoir que les consignes nationales de La Poste prévoit d’emblée de pas pourvoir en effectif l’équivalent de 10% des périmètres à recouvrir. ».
Pour compenser cela et faire un maximum d’économie, le groupe La Poste à recours à des intérimaires afin de combler la charge de travail sans avoir à embaucher de CDI, ce qui dégrade considérablement les conditions de travail. « Pour donner un exemple, sur cinq tournée ils embauchent quatre CDI et un intérimaire. Quelques mois après, ils suppriment l’intérimaire et les quatre CDI doivent se redistribuer la charge de travail. » explique Monsieur Gomez. A Millau, six tournées sur trente-et-une sont ainsi assurées par des intérimaires. « Les facteurs se retrouvent ainsi toujours sous pression. Il y a même des logiciels qui calculent le temps que doit faire un facteur pour sa tournée. Mais ces calculs sont effectués de manière beaucoup trop aléatoire par rapport à la réalité du terrain » ajoute le syndicaliste.
C’est d’ailleurs l’une des revendications centrales des grévistes : « Les revendications sont vraiment centrées sur la réorganisation. On demande des CDI à la place d’intérimaires. Ils ont dit qu’ils étaient d’accord pour faire un CDI. Mais c’est insuffisant. Lorsqu’ils font un projet, ils ne comblent jamais tous les besoins de travail » complète le secrétaire départemental.
Une direction inflexible qui fait tout pour entraver le droit de grève des salariés
Depuis le début de la grève, la direction refuse catégoriquement d’accéder aux revendications des grévistes. « La direction régionale nous a bien fait comprendre qu’elle comptait atteindre ses objectifs de productivité. Ils disent vouloir sortir du conflit mais ne veulent rien concéder » confie Didier Gomez. Plusieurs fois par semaine, elle convoque ainsi les grévistes pour leur faire de fausses propositions. Suite à un rassemblement appelé par les grévistes le lundi 6 novembre, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées devant la sous-préfecture de Millau pour exiger d’elle une médiation afin de sortir du conflit.
En fin de semaine dernière, un médiateur a été assigné. Une manœuvre hypocrite que dénoncent les syndicalistes : « On a l’habitude d’avoir une médiation lors des conflits à la Poste. Mais cette fois c’est particulier. La sous-préfecture a dépêché un ancien expert-comptable qui ne connaît rien à la Poste. Lors des négociations en fin de semaine dernière, on a vraiment perdu notre temps alors que ça fait plusieurs semaines qu’on demande une médiation ».
D’un autre côté, la direction fait tout pour entraver le droit de grève des salariés. Pour cela, elle fait venir des postiers d’autres régions pour faire les distributions. « Le groupe La Poste a des équipes de facteurs remplaçant prêt à remplacer des grévistes. Ces derniers ont un coût très important, il faut leur payer l’hôtel, le déplacement, etc. A Millau, ils ont ainsi monté un site de tri parallèle en trois jours. » explique l’un des syndicalistes.
Une situation qui a amené plusieurs habitants locaux à soutenir directement les grévistes, en allant empêcher les distributions opérées par ces postiers venus remplacer les grévistes : « Des habitants locaux ont vu des postiers qu’ils ne connaissaient pas sur un parking de La Cavalerie (une commune environnante) trier des colis. Ils sont donc allés les voir pour leur dire d’arrêter » raconte Didier Gomez, avant d’ajouter qu’il y a « une bonne partie de la population qui soutient la grève ». « Nous en sommes à 28 jours de grève aujourd’hui, et nous avons redemandé encore ce matin à la Préfecture d’intervenir pour trouver un compromis honorable pour tout le monde. Il faudra bien sortir tôt ou tard de ce conflit » conclue-t-il.
Pour soutenir les grévistes : envoyez vos dons à SUD PTT, 59 rue Raymond Sommer 81000 ALBI / IBAN FR80 2004 1010 1605 6486 6B03 701
