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La répression au sein des universités a fait naître la colère

Inde. La révolte des étudiants bouscule le gouvernement de droite

Léo Serge Pour presque tous les étudiants des campus indiens, même les plus à droite, le gouvernement dirigé par Modi et le parti ultranationaliste hindou BJP (Parti du Peuple Indien) est allé trop loin. Le mouvement étudiant qui s'est créé a pris une ampleur inédite depuis au moins 1975, s'étendant à tous les campus indiens. Les étudiants et les journaux de gauche s'accordent pour dire que la tentative de répression de la liberté de parole et d'action syndicale dans les universités a échoué.

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Tout est parti d’une tentative grossière de répression, puisque le président d’un syndicat étudiant de l’université très prestigieuse Jawaharlal Nehru University (JNU) de Delhi, a été accusé d’avoir tenu des « propos antipatriotes » ou même d’avoir encouragé le terrorisme dans un meeting sur la question du Cachemire – région déchirée entre l’Inde et le Pakistan – tenu le 9 Février. Ce syndicaliste étudiant, Kanhaiya Kumar, président du JNUSU, a été arrêté pour « sédition ». L’accusation légale de « sédition » date du temps de la colonisation britannique ! Ces accusations d’apologie du terrorisme islamiste – et même de complicité avec les services secrets pakistanais - ne sont crédibles pour personne puisque l’étudiant en question est un membre d’un syndicat proche des communistes. Il est donc apparu à tous que le BJP tentait d’écraser par la force les voix syndicales étudiantes.

C’est ainsi que le gouvernement a déclenché une vague de soulèvement universitaire contre la répression et pour la liberté d’expression. En effet, lors du procès de l’étudiant en question, des soi-disant avocats du BJP, et même un député du BJP – ils ont été filmés - ont été jusqu’à frapper les étudiants présents qui ont été hospitalisés. Le ministre de l’intérieur a même déclaré qu’il avait une preuve puisqu’un groupe terroriste pakistanais avait « tweeté » son soutien aux étudiants. Le tweet était bien sûr un faux. Le ministre ne s’est même pas excusé. Les déclarations des proches du BJP, ou gouvernement, déclarent ainsi que les « gauchistes » sont « sortis du bois » et qu’on peut voir ainsi leur « soutien au Djihad »... Mais tout ceci ne trompe personne en Inde. Et les étudiants du tout nouveau syndicat de droite ABVP, proche du BJP, démissionnent en masse. Pour les étudiants indiens il s’agit de lutter contre la tyrannie et la répression, et pour la défense du droit élémentaire à la liberté d’expression.

Le parti du Congrès, classé au centre-gauche – et qui en 1975 avait été jusqu’à emprisonner des étudiants pour leur liberté de parole – soutient les manifestations qui se succèdent sur tous les campus et dans toutes les grandes villes. Plus de 450 universitaires connus, présents dans le pays ou à l’étranger, ont signé une pétition qui déclare notamment : « JNU symbolise un imaginaire vital de l’espace universitaire – un imaginaire qui embrasse la pensée critique, la dissidence démocratique, le militantisme étudiant et la pluralité des opinions politiques, écrivent les signataires. C’est cet imaginaire critique que le pouvoir actuel cherche à détruire.  » Les manifestations étudiantes demandent à ce que Kanhaiya Kumar soit relâché, ce que le gouvernement ne semble pas prêt à faire. Cependant il a du faire arrêter l’un des avocats qui a attaqué les étudiants en pleine cour de justice – mais qui a pu payer une caution pour sortir libre. Surtout, cinq autres étudiants de la JNUSU ont été arrêtés ce mercredi 24 février, toujours pour « sédition ». La question désormais est la suivante : la répression ne va-t-elle pas pousser encore plus loin la révolte étudiante ? D’autant plus que la caste fermière des Jats a organisé d’immenses manifestations pour obtenir des quotas d’emplois dans les services publics, visiblement avec succès ; le gouvernement ne pouvant affronter plusieurs révoltes en même temps.

Les manifestations étudiantes ont réuni au moins 10 000 étudiants à Delhi, ailleurs il y a des affrontements avec les étudiants d’extrême-droite proche du BJP. Pour l’instant les étudiants ne montrent aucun signe de fléchissement, au contraire.

Le gouvernement Modi vient de perdre énormément de crédit politique auprès de la population et de la jeunesse, d’autant plus qu’il avait essayé de relancer les négociations avec le gouvernement pakistanais, notamment sur les questions de terrorisme et sur le Cachemire. Évidemment, les négociations sont désormais suspendues.


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