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Etats-Unis : après Columbia, la colère étudiante contre le génocide s’étend

Alors que l'administration Biden vient de voter une nouvelle aide financière à Israël, elle tente d'éteindre par la répression une colère qui s'étend et qui pourrait la mettre en grande difficulté.

Alberta Nur

24 avril

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Etats-Unis : après Columbia, la colère étudiante contre le génocide s'étend

Crédit photo : Columbia Students for Justice in Palestine

Après l’arrestation jeudi dernier d’une centaine d’étudiants de l’université de Columbia pour leur soutien à la Palestine, l’indignation s’est répandue comme une traînée de poudres dans les campus étasuniens Yale, MIT, Université de Caroline du Nord, Emerson, Harvard UNC Chappel Hill, Vanderbilt, Berkeley : loin d’éteindre le mouvement, la répression a fait entrer dans la danse les étudiants d’au moins une douzaine de nouveaux campus. Le campement sur le campus de Columbia a même fait des émules dans d’autres pays, au Royaume-Uni ou encore en Australie.

Comme à Columbia, ils revendiquent la fin des accords entre leurs universités et les fabricants d’armes et les entreprises israéliennes qui prennent part à la colonisation et au génocide. A l’université de Yale (Connecticut), les étudiants chantent ainsi « Salovey (président de l’université) ne te cache pas, tu finances un génocide » - pour dénoncer son refus de couper les liens entre l’université et les marchands d’armes

Dès lors, les universités sont devenues le point chaud de la mobilisation en soutien au peuple palestinien aux États-Unis. Face à la solidarité qui s’est immédiatement exprimée, l’administration Biden, qui vient de réaffirmer aux yeux du monde entier son soutien inconditionnel à Israël, a fait le choix de poursuivre la répression brutale de toute contestation de sa politique.

Suspension des droits étudiants, expulsion des résidences universitaires, expulsion des professeurs : alors qu’à Columbia étudiants et personnels ont envoyé un message fort en installant un nouveau campement ce lundi, les présidences d’université ont décidé de sanctionner fortement certains des étudiants mobilisés à travers le pays.

Symptomatique du niveau de pression exercé par le gouvernement sur les présidences d’université, l’Université de Columbia est allé encore plus loin ce mercredi en menaçant d’envoyer l’armée pour déloger les nouveaux occupants.

Entre temps à Yale, ce sont 49 étudiants qui ont été interpellés lundi matin suite à une occupation d’une partie du Campus. Dans la même journée, des étudiants et des professeurs de l’université de New York ont été interpelés, tandis que mardi matin neuf étudiants de l’Université du Minnesota ont été arrêtés.

Face à la répression, la question de l’abandon des sanctions à l’encontre des étudiants et des personnels mobilisés est devenue une des revendications phare du mouvement.

Malgré les menaces, les radiations, les expulsions de logement étudiant et les arrestations, le comité de mobilisation pour la Palestine l’affirme : « Nous resterons mobilisés malgré les intimidations [...] Nous refusons d’accepter un monde où le massacre des Palestiniens est considéré comme acceptable, normal et rentable ».

Face à la répression : une mobilisation inédite dans le corps enseignant

En outre, loin de concerner seulement les étudiants, cette répression tend à radicaliser le corps enseignant et le personnel universitaire. Dans ce sens, un appel au boycott universitaire de Columbia et du Barnard College a déjà été signé par plus de 1400 universitaires tant que les sanctions prises contre les étudiants n’auront pas été levées.

Ce boycott fait suite à plusieurs mobilisations du personnel. Au Barnard College, un membre du personnel a démissionné après s’être vu demandé d’accompagner un étudiant expulsé de sa chambre pendant les 15 minutes qui lui étaient allouées pour rassembler ses affaires. Dans cette même université, une grève de 3 jours a été organisée contre la répression. A Columbia, de nombreux professeurs ont rejoint les étudiants mobilisés , en soutien face à la répression.

« Bien que ces dernières années aient été marquées par de nombreuses grèves de diplômés et d’enseignants auxiliaires, il est très inhabituel que les enseignants se mobilisent à ce point en dehors du contexte de la négociation collective » souligne Oliva Wood, pour Left Voice

Cette mobilisation voit ainsi des enseignants prêts à mettre leur poste et leur carrière en jeu, par rejet de la complicité de leur Etats et de leurs institutions avec le massacre en cours à Gaza, ou bien révoltés par la censure académique et politique qui l’accompagne.

La brutalité du génocide et la répression maccarthyste qui s’abat sur ceux qui le dénoncent a éveillé une mécontentement profond dans de larges couches de la population. Mais cette politisation qui touche aujourd’hui les plus grandes université de l’élite américaine, comme Columbia ou NYU, épicentres actuels de la mobilisation pour la Palestine, ont des racines plus profondes dans la polarisation politique de la société américaine. Dernièrement, dans le cadre des vagues de grève qui ont touché les Etats-Unis, ces universités avaient déjà connu des campagnes de syndicalisation inédite.

Le 23 avril, ce sont également 28 syndicats de travailleurs qui ont exprimé leur solidarité avec les étudiants mobilisés de Columbia, énième démonstration qu’une politisation profonde traverse la première puissance du monde.

Une génération anti-impérialiste au cœur de la bête

La perspective d’une union entre travailleurs et étudiants terrifierait n’importe quel gouvernement. En l’occurrence, la remise en cause actuelle du soutien bipartisan des Etats-Unis à Israël (17 milliards de dollar d’aide militaire viennent d’être débloqués par le Sénat pour Israël) intervient dans le sillage des mobilisations historiques de Black Lives Matter, des grandes grèves pour les salaires et des campagnes de syndicalisation. C’est une génération entière qui fait l’expérience que c’est la même classe dominante, qu’elle soit démocrate ou républicaine, qui est la cause de la persistance du racisme, de la baisse des conditions de vie et des catastrophes sociales, du désastre écologique et des massacres et des guerres sur l’ensemble de la planète.

Sans en atteindre pour le moment l’intensité et la profondeur, impossible de ne pas voir un parallèle entre la situation actuelle et les luttes des années 1960 contre la ségrégation et la guerre au Vietnam. C’est bien le spectre d’une telle perspective qui inquiète les classes dominantes américaines qui font tout pour séparer les étudiants mobilisés, en les traitant d’antisémite, du reste de la population.

L’offensive démocratique et l’atteinte à la liberté d’expression aux Etats-Unis ressemble en tout point, à un niveau d’intensité encore différent, à la répression du mouvement social en France. Ce qu’il se passe aux Etats-Unis est regardé dans le monde entier, une extension de la mobilisation là-bas serait un signal puissant pour le reste du monde. C’est pourquoi, dès aujourd’hui, nous devons exprimer toute notre solidarité avec les étudiants et les personnels mobilisés d’Outre-atlantique et continuer de plus belle la lutte pour la libération de la Palestine et contre la criminalisation du mouvement.


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