×

LOPJ

Danger. Le Sénat adopte une mesure facilitant l’espionnage des appareils électroniques

Le Sénat a adopté mercredi dernier l’article 3 de la LOPJ, permettant l’activation à distance d’appareils d’électronique dans le but de géolocaliser ou surveiller des personnes à leur insu dans le cadre d’enquête grâce aux micros et caméras.

Léa Luca

12 juin 2023

Facebook Twitter
Danger. Le Sénat adopte une mesure facilitant l'espionnage des appareils électroniques

Crédit photo : Jonathan McIntosh

Mercredi 7 juin, le Sénat examinait en première lecture le projet de loi « Orientation et programmation du ministère de la Justice 2023-2027 » (LOPJ). Au cours de cette séance, a été adopté l’ article 3 du projet de loi porté par le garde des sceaux Eric Dupont-Morettin, prévoyant « l’extension des techniques spéciales d’enquête pour permettre l’activation à distance des appareils connectés aux fins de géolocalisation et de captations de sons et d’images ».

Grâce à cette mesure, les appareils électroniques pourront tout d’abord permettre de géolocaliser précisément en temps réel et à distance tous les suspects visés par des enquêtes pour infractions punies d’au moins dix ans d’emprisonnement (une durée prévue de cinq ans dans le texte initial). Le texte autorise également l’activation à distance des appareils électroniques d’une personne à son insu pour devenir des outils d’écoute et surveillance, via l’activation des micro et caméras. Ce, même si l’appareil est éteint.

Cet article concerne en particulier les téléphones et ordinateurs, mais aussi tous les appareils électroniques dotés de micro, caméra ou système de localisation : soit les ordinateurs de bords en voiture, baby phones, télévisions connectées, trottinettes connectées, montres connectées, caméras de sécurité, assistants vocaux, etc. Si les services de police et de renseignement, disposent déjà de très nombreux et extensifs outils de surveillance, cet article de la LOPJ, facilitera encore et sécurisera juridiquement l’espionnage policier.

Dans la lignée des précédentes des attaques autoritaires et liberticides, le terrorisme est brandi pour justifier la mise en place des mesures, notamment celles d’activation à distance des micros et caméras. L’activation des micros et caméras serait réservée aux affaires de « terrorisme et de délinquance et criminalité organisées » : autant de catégories dans lesquelles l’Etat fait, on le sait, rentrer sans peine toutes les formes de contestation.

Il y a une semaine à peine, une quinzaine de militants écologistes ont ainsi été perquisitionnés dans plusieurs villes de France avec l’aide d’unité anti-terrorismes – la BRI (Brigade de recherche et d’intervention de la police) et la SDAT (Sous-direction antiterroriste de la Direction centrale de la police judiciaire) d’après Reporterre – dans le cadre d’une enquête pour « destruction en bande organisée » et « association de malfaiteurs ». Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, lui, qualifiait il y a quelques mois les militants opposés au projet de méga-bassines d’écoterroristes ou encore assimilait encore récemment dénonciation des violences policières à du « terrorisme intellectuel ».

Par ailleurs, pendant le mouvement contre les retraites, les casserolades ont été interdites par des arrêtés préfectoraux en s’appuyant sur une loi antiterroriste (loi SILT). La criminalisation des mouvements sociaux ne se limite pas là cependant à ce terrain. En 2018, les sept de Briançon, avaient par exemple été inculpés pour avoir participé à une marche de solidarité avec des migrants pour « aide directe ou indirecte en bande organisée à l’entrée irrégulière d’étrangers sur le territoire national ». Ainsi, on voit que de nombreuses actions militantes sont déjà poursuivies en tant qu’« infractions graves ».

Par ailleurs, la catégorie d’« infractions considérées comme graves »,à laquelle renvoie le projet de loi, est des plus extensible, puisque comme le souligne à nouveau l’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN), sont compris dedans, la production et la vente de stupéfiant, mais aussi le proxénétisme, pouvant inclure l’aide à une personne travailleuse du sexe ou les vols en bande organisée. Dans un communiqué daté du 31 mai 2023 signé notamment par la Ligue des Droites de l’Homme, le Syndicat des Avocats de France, le Syndicat de la Magistrature, la Quadrature du Net, l’association dénonce : « permettre de prendre le contrôle de tous les outils numériques à des fins d’espionnage policier ouvre la voie à des risques d’abus ou d’usages massifs extrêmement graves. »

Cette nouvelle attaque liberticide s’inscrit directement dans la l’offensive autoritaire menée par le gouvernement, incarnée par la répression de la mobilisation contre la réforme des retraites ou des mouvements écologistes, les menaces de dissolutions d’organisations, la mobilisation d’unités anti-terroristes contre les militants, etc., mais aussi par la loi JO 2024 qui prévoit le déploiement d’un arsenal répressif de grande ampleur et mais aussi la mise en place de la vidéosurveillance algorithmique (VSA), permettant de renforcer la surveillance des quartiers populaires.


Facebook Twitter
Mumia Abu Jamal, plus vieux prisonnier politique du monde, fête ses 70 ans dans les prisons américaines

Mumia Abu Jamal, plus vieux prisonnier politique du monde, fête ses 70 ans dans les prisons américaines

La manifestation antiraciste du 21 avril autorisée : tous dans la rue ce dimanche à Paris !

La manifestation antiraciste du 21 avril autorisée : tous dans la rue ce dimanche à Paris !

Répression des GJs, soutien au meurtrier de Nahel : le policier préféré des médias rejoint le RN

Répression des GJs, soutien au meurtrier de Nahel : le policier préféré des médias rejoint le RN

Peines contre les parents, internats : Attal s'en prend encore aux jeunes de quartiers populaires

Peines contre les parents, internats : Attal s’en prend encore aux jeunes de quartiers populaires

Des AED condamnés à de la prison avec sursis pour avoir dénoncé la répression syndicale et le racisme

Des AED condamnés à de la prison avec sursis pour avoir dénoncé la répression syndicale et le racisme

Marche antiraciste du 21 avril interdite à Paris. Face à la répression, faisons front !

Marche antiraciste du 21 avril interdite à Paris. Face à la répression, faisons front !

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

« Place Nette » à Mayotte : le gouvernement relance l'opération Wuambushu pour des expulsions de masse

« Place Nette » à Mayotte : le gouvernement relance l’opération Wuambushu pour des expulsions de masse