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Répression

Amendes, menace d’intervention policière : la direction de Tisséo à l’offensive pour casser la grève

Pour leur 11ème jour de grève, les salariés de Tisséo restent fortement mobilisés. Depuis Biarritz, le directeur général et Moudenc durcissent le ton, et assignent les syndicats en justice pour une amende de 45 000 euros par syndicat. De plus, une menace d'intervention policière aurait été formulée par la direction afin de déloger les piquets dès mercredi. Une politique de criminalisation de la grève et des méthodes de lutte qui doit être largement dénoncée.

Alberta Nur

16 juin 2023

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Amendes, menace d'intervention policière : la direction de Tisséo à l'offensive pour casser la grève

Crédits photo : Révolution Permanente Toulouse

Ce 14 juin et 15 juin à l’aube, les grévistes de Tisséo continuaient leur combat pour la défense de leurs salaires. Pendant que le directeur général était en vacances à Biarritz, ce sont 60% des agents qui étaient en grève. Dès 5h du matin sur les dépôts de Langlade, Atlanta, Colomiers et Garossos, les grévistes tiennent les piquets avec détermination.

Une direction qui durcit son offensive pour casser la grève

Après avoir tenté de diviser les grévistes en proposant ce lundi une prime misérable, le directeur général a assigné les syndicats devant la justice. La direction demande 45 000 euros à chaque syndicat pour les blocages du 30 mai au 2 juin. Une assignation scandaleuse, qui cherche à mettre un coup de pression aux directions syndicales pour briser la grève. Si la direction ne veut pas « perdre d’argent à cause de la grève », qu’elle réponde aux revendications des grévistes, au lieu d’agiter des problèmes de budget et de les réprimer.

« C’est un outil classique des directions, d’assigner en justice les grévistes pendant ou à l’issue d’une grève afin de tenter de leur faire payer le coût de leur grève, qui plus est lorsque ce coût est important, comme c’est souvent le cas dans le secteur des transports en commun car il y a des pénalités dues par les régies aux mairies. » explique Louisa Lamour, élève avocate en droit du travail. « Mais l’objectif est aussi de tenter de saper le moral des grévistes, de leur faire passer l’envie de se mobiliser. Pour ça les employeurs ont tout un tas d’outils à leur disposition, c’est important que l’ensemble des grévistes en ait conscience et puisse s’organiser pour anticiper ces coups et y faire face. » poursuit-elle.

En plus des provocations, les grévistes doivent faire face à une répression dure de la part de la direction et de ses alliés, comme dernièrement des convocations par la gendarmerie des représentants syndicaux pour avoir envahi le « Salon des Mobilités ». Face à cette intimidation, de nombreux syndicalistes et étudiants étaient rassemblés devant la gendarmerie du Mirail, en solidarité. De plus, des salariés de Tisséo nous ont fait remonter une menace d’envoi des CRS par la direction contre les piquets censés avoir lieu ce mercredi. Une menace extrêmement grave contre l’ensemble des salariés de Tisséo et tous ceux qui souhaitent lutter pour leurs salaires et leurs conditions de travail. La direction et Moudenc essaient de faire de la répression des Tisséo un exemple : il faut montrer toute notre solidarité et notre force pour lutter contre le délogement des piquets par la police.

Face à ce coup de pression de la direction, deux types de réponses ont été opposées par les directions syndicales. D’un côté, les syndicats CGT et SUD ont rétorqué qu’ils ne céderaient pas aux intimidations et qu’ils se défendraient en justice. De l’autre, Franck Delperier, secrétaire général de la FNCR expliquait à La Dépêche que le syndicat a « appelé à la grève » et « à venir au piquet de grève » devant les dépôts ce vendredi « mais en aucun cas au blocage ». Il assure par ailleurs que les constats d’huissiers sur lesquels s’appuie la direction « prouvent que la FNCR n’a jamais bloqué les dépôts ».

Une déclaration qui, loin de dénoncer l’offensive de la direction, s’y adapte et ouvre une brèche dans le front intersyndical, alors même que, face à l’offensive répressive de la direction, l’unité face aux intimidations est plus importante que jamais. En réalité, elle est révélatrice de la stratégie de ce syndicat, qui cherche depuis le début de la mobilisation à canaliser la colère des agents. A l’inverse, face à une telle offensive patronale, il s’agirait d’opposer l’unité des organisations de la gauche politique et syndicale de Toulouse, mais y compris de l’ensemble du pays. Face à l’offensive répressive, il faudra faire front pour maintenir la grève et le rapport de force, tout en opposant une réponse qui dépasse le terrain juridique et qui pose le durcissement de la grève afin de faire reculer la direction.

Ces dissensions au sein de l’intersyndicale FNCR-CGT-SUD-CFDT illustrent en définitive des désaccords qui existent sur la stratégie à adopter. « On le sait que la FNCR ne veut pas faire plus, ils voulaient attendre jusqu’à la coupe du monde du rugby » nous confie un gréviste avant d’affirmer : « certains de leurs syndiqués sont déterminés et font grève. Mais leurs élus restent très frileux quand ça parle de durcir le mouvement, ça freine la dynamique dans l’intersyndicale ». De leurs côtés, les syndicats SUD et CGT ont la volonté de durcir le mouvement mais restent soucieux de conserver l’unité syndicale.

Pourtant, pour faire plier une direction inflexible, la nécessité qui s’impose est celle de durcir le rapport de force par la grève reconductible. Ces débats sur le futur de la grève imposent que les équipes syndicales combatives défendent un plan de bataille conséquent, pour faire reculer la justice et les assignations et faire reculer le patron. Toutes ces discussions doivent être accessibles à l’ensemble des grévistes afin de les rendre maîtres de leur mouvement, et de donner le droit à tous ceux qui se battent contre la direction de choisir la façon dont ils veulent le faire. Si l’unité par en haut a permis la mise en place d’une grève et d’un rapport de force réel avec la direction, elle doit devenir un point d’appui pour construire l’unité de l’ensemble des grévistes, tous syndicats confondus et non-syndiqués, autour d’un plan de bataille combatif qui refuse toute demi-mesure avec la direction.

Préparer la reconductible pour dire non aux assignations et faire plier Wischnewski

De plus, le temps presse à l’approche des vacances et la pression financière commence à peser chez les salariés. D’autant que le développement d’une grève reconductible implique de se donner les moyens de la préparer et d’entraîner une majorité de salariés. Pour cela, les grévistes disposent d’un certain nombre d’acquis.

Déjà, la détermination est toujours présente au sein des agents, les taux de grève au cours des quatre journées de mobilisation consécutives du 30 mai au 2 juin et des différentes journées de la semaine dernière démontrent également que la colère ne faiblit pas. Devant les menaces multiples de répression et le durcissement du ton de la direction il n’y a qu’une alternative : une véritable grève reconductible pour faire plier Moudenc et la direction de Tisséo.

De plus, la caisse de grève récemment lancée constitue un acquis important pour construire et renforcer la grève puisqu’elle adresse directement la question de son financement. Si cette dernière est militée et prend de l’ampleur, notamment grâce au soutien de la population, elle pourrait convaincre de nombreux salariés qui font grève seulement quelques heures ou restent passifs dans les dépôts à se mobiliser aux côtés de leurs collègues pour une défense de leurs intérêts collectifs.

« Financièrement ça devient compliqué de poser des journées complètes. Avec des collègues on serait prêts à faire des assemblées générales pour discuter de comment étendre le mouvement et mobiliser davantage » explique Nicolas, travailleur à la maintenance au dépôt de Colomiers. Cette difficulté financière n’est pas un obstacle insurmontable à condition de la mettre au centre des discussions.

Pour cela et pour adresser bien d’autres questions posées par la grève, comme celle de convaincre les non-grévistes de rejoindre le mouvement, l’organisation d’assemblées générales est un outil-clé qui permet à chaque gréviste, syndiqué ou non, de réellement prendre part aux différentes tâches et décisions stratégiques du mouvement. De tels cadres de discussion sont les seuls à même d’adresser l’ensemble des difficultés rencontrées par les collègues en y apportant des solutions votées collectivement en assemblée.

Pour qu’elles aient lieu, il est nécessaire de les organiser et d’en faire un élément central de la prochaine journée de grève du mercredi 21 juin mais également de celles qui suivront. Au-delà des salariés de l’entreprise, ces assemblées générales pourraient également s’ouvrir aux salariés de la sous-traitance qui s’étaient solidarisés du mouvement, montrant ainsi la potentialité d’une alliance à même de paralyser l’ensemble du réseau de la métropole. Autant de pistes qui montrent que face au mépris de Wischnewski, une victoire est possible à condition de dépasser les limites actuelles du mouvement et de se doter d’une stratégie gagnante. De plus, les salariés doivent recevoir le soutien le plus entier de l’ensemble des organisations politiques et syndicales qui, à Toulouse, s’opposent à la répression de Moudenc et de la direction !


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