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« AMU socialement engagée »

Actions syndicales, soutien à la Palestine… À Aix-Marseille, la Présidence s’en prend aux mobilisations

Depuis le début du génocide, l’administration censure systématiquement tout soutien à la Palestine. Une répression qui s’étend à l’ensemble des libertés politiques sur le campus.

Flora Thomsen

4 avril

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Actions syndicales, soutien à la Palestine… À Aix-Marseille, la Présidence s'en prend aux mobilisations

Crédit photo : Révolution Permanente Marseille

Salles refusées, interdictions de tractages, intimidations de l’administration et de la sécurité…à Aix Marseille, l’administration assure une censure et pressurise toute parole politique, et ce depuis des années. Cette tendance s’est accentuée depuis octobre à l’égard de toute solidarité avec la Palestine, et plus récemment face à la mobilisation des enseignants-chercheurs en grève pour la sauvegarde de leurs emplois.

Une situation dénoncée dans un communiqué unitaire du 19 mars par plusieurs organisations d’étudiants et personnels, qui alertent sur « une régression des droits démocratiques élémentaires qui s’ajoute à un contexte étouffant… alors que l’administration exige déjà de soumettre les activités syndicales et politiques à des conditions ou des autorisations souvent arbitraires et opaques »

Récemment encore, Eric Berton, président de l’université a fait démonstration de ses habituelles magouilles arbitraires, en invalidant une décision prise en conseil de l’UFR sur la liberté de réunion et de tractage sur le campus. Le tout justifié par un discours mêlant le spectre de Vigipirate aux postures victimaires accusant les enseignants et étudiants mobilisés de « harcèlement » et de « débordement » pour de simples actions militantes.

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« Chassés, traqués, harcelés » : l’administration vise les étudiants pro-Palestine

Depuis plusieurs mois, l’étau de cette censure politique se resserre et se crispe sur la question palestinienne. L’administration s’aligne sur la politique nationale de criminalisation systématique du soutien à la Palestine, alors que les étudiant·es et les personnels de l’université se mobilisent afin de dénoncer le génocide en cours.

Les étudiants du comité étudiant Palestine d’Aix tractent régulièrement sur le campus Schuman, et en sont systématiquement chassés par l’administration et la sécurité, mais aussi par certains enseignants et étudiants qui cherchent à les intimider :

« La sécu est venu nous sortir avec une autre dame de l’administration de partir, ils nous ont pas pris nos cartes mais ils nous on dit, “ça commence à être lassant tous les jours en train de vous sortir, faites ça en dehors de la fac”. Alors nous on coopère, mais on est vraiment chassé, on est traqués, et même harcelés. ».

« Nous on a eu des accrochages avec des enseignants qui ont tenté de nous arracher des banderoles, d’enlever les drapeaux, des fois des altercations violentes, ils nous parlent mal. »

« Ils viennent directement nous voir, ils sont très virulents, ils nous disent, “Vous avez pas le droit de faire ça”. On leur répond qu’on a demandé les autorisations et qu’elles nous ont été refusées, des fois on fait des demandes six semaines à l’avance, sans réponse. Alors nous on fait quand même, si on attends que AMU décide d’arrêter de censurer ça prendra trop de temps. La dernière fois il y a des enseignants qui sont venu qui nous demandaient nos cartes étudiantes, on a refusé et ils ont commencé à nous filmer. »

L’administration n’hésite pas à recourir aux arguments sécuritaires, en agitant Vigipirate et l’incitation à la haine et l’antisémitisme pour justifier les interdictions. De leur côté, les personnels de l’université sont pressurisés par leur hiérarchie : des mails venant des directeurs de centre de recherche ou de la présidence, appelant à la retenue, à l’unité, tombent des mains des enseignant.es usées par ces méthodes qui instaurent un climat de crispations et d’auto-censure.

Le ton est donné dans un mail du 14 mars du président d’AMU, Eric Berton, qui se réfère vaguement aux « graves conflits internationaux » avant d’appeler au respect du « principe de neutralité » qui « garantit que chacun puisse étudier, travailler, et s’exprimer librement, sans craindre d’être jugé ou discriminé en raison de ses opinions ou de son appartenance. » Il évoque aussi le plan Vigipirate, puis implore : « Évitons tout discours ou comportement qui pourrait mener à des débordements, à des situations d’insécurité ou de tensions. » Avant de menacer la prise de sanctions contre tout comportement incitant à la haine ou la discrimination.

Visiblement, cette vigilance ne s’étend pas pour autant aux activités de tous les groupes, tels que l’UNI, syndicat d’extrême droite qui intimide les étudiants mobilisés pour la Palestine et tracte régulièrement sans intervention de l’administration.

Cependant, l’administration refuse les salles ou annule tous les évènements liées à la question palestinienne : la semaine d’Israeli Apartheid Week, pas moins de quatre évènements sont annulés ou refusés, y compris une conférence de Pierre Stambul (porte-parole de l’UJFP) organisée par les Jeunes Communistes 13. Le militant et doctorant d’AMU sera accueilli par un cordon de policiers à l’entrée de la faculté. Une table ronde et une projection, ayant fait l’objet de demandes de salle approuvées en amont, sont soudainement annulées la veille. C’est sans compter les nombreuses demandes de salles formulées pour des réunions par les comités Palestine. Malgré ces pressions, les étudiant-es et travailleurs de la faculté restent déterminés à construire la solidarité sur leur lieux d’études.

« Il faut juste qu’un jour ils acceptent qu’on ai le droit de parler de la Palestine sur la fac témoigne un enseignant solidaire de la mobilisation étudiante. Il faut qu’on ait la possibilité de manière générale, pas que sur la Palestine, de nous exprimer politiquement. »

Face à la mobilisation des enseignants précaires, les manipulations de la direction

Si la direction d’AMU s’acharne particulièrement contre toute parole pro-Palestinienne, la censure concerne l’ensemble des libertés politiques et syndicales. Le mail de Berton fait suite à une action syndicale menée dans le cadre de la mobilisation des enseignants en grève contre la suppression d’heures d’enseignement, mais aussi pour la liberté d’expression sur la fac, revendication portée en lien avec les étudiants mobilisés sur la Palestine.

Le 14 mars, enseignants et étudiants mobilisés envahissent le conseil de l’UFR. Les élus votent pour la révision des maquettes de formation, mais également pour la reconnaissance du droit de tractage et de réunion sur le campus.

Une victoire partiellement éclipsée par la présidence qui, après la démission soudaine et calculée du doyen de l’UFR et de sept membres du conseil (sur plus d’une trentaine), annonce que les décisions prises lors de cette réunion seraient considérées illégitimes. Le motif avancé pousse au rire jaune : « La violence continue des attaques politiques – que nous ressentons en tant que personnel de l’enseignement supérieur comme relevant d’un harcèlement qui ne dit pas son nom. » Une accusation grave, visant à criminaliser une simple action syndicale classique pour contester la politique répressive et austéritaire d’AMU.

Pour autant, les enseignants-chercheurs obtiennent tout de même une victoire, avec une augmentation de 8 000 heures de formation pour l’UFR de l’ALLSH. Mais, alors que la motion concernant le droit de tractage et de réunion avait été votée par une large majorité au conseil, celle-ci a tout simplement disparu des revendications. Vendredi 29 mars, l’administratrice provisoire du nouveau conseil de l’UFR refuse que soit revotée cette motion au motif qu’elle n’est pas inscrite à l’ordre du jour.

La présidence de l’université s’inscrit dans la droite lignée de la politique répressive du gouvernement, qui, derrière les accusations d’antisémitisme et les déclarations sur les menaces « wokistes », cherche à éviter à tout prix l’émergence d’une génération anti-impérialiste, mais aussi de mettre au pas tout le monde universitaire qui continue de subir ses attaques libérales et austéritaires. Face aux intimidations et à la censure de l’administration, c’est un front large qu’il faut construire. Avec Le Poing Levé, nous dénonçons les attaques et intimidations subit par les étudiant.es et personnels de l’université qui cherchent à se mobiliser et nous réaffirmons haut et fort : soutenir la Palestine n’est pas un crime, et l’activité politique n’est pas à être soumise aux conditions opaques et arbitraires de l’administration !


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