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La Izquierda Diario
6 de juillet de 2022 Twitter Faceboock

Dans la rue pour nos droits !
Pride à Toulouse. Pôle anticapitaliste contre le pinkwashing, un acquis pour la suite
Gabriella Manouchki

À Toulouse, dans la Marche des Fiertés institutionnelle, plusieurs des organisations politiques et syndicales, collectifs et associations ont manifesté dans un pôle combatif contre le pinkwashing de la mairie, des entreprises et de la police. Retour sur une expérience exemplaire pour les combats à venir.

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Crédit Photo : Révolution Permanente

Un pôle anticapitaliste et contre le pinkwashing dans la Pride

À Toulouse, l’association Pride Toulouse est en charge d’organiser la Marche des Fiertés annuelle, en lien avec la mairie. Chaque année, des dizaines de chars à l’effigie des collectivités territoriales, des gros employeurs locaux ou encore des bars et associations LGBTI+ institutionnels se rassemblent pour une parade commerciale et festive dans le centre-ville. Cet événement, qui vient clôturer le mois des fiertés, est sponsorisé par la mairie de Jean Luc Moudenc, soutien de Macron connu pour avoir manifesté au côté de la Manif Pour Tous, par le gouvernement et la région, ainsi que par des entreprises comme Airbus et la SNCF. Cette année, même la police a tenu un char partagé avec la SNCF en tant que "services publics" via l’association FLAG "Intérieur et Justice LGBT+".

Il s’agit d’un important dispositif de pinkwashing, par lequel ces différents acteurs capitalistes instrumentalisent la lutte historique pour les droits des LGBTI+ dans le but de redorer leur image en montrant un visage progressiste. Une opération des plus hypocrites de la part de ceux qui nous exploitent, nous oppriment et répriment nos luttes. Une manifestant.e s’indigne au micro de Révolution Permanente : « Il y a un char pour la région, un char pour la mairie de Toulouse : c’est hors de question qu’ils salissent nos fiertés. […] Les flics n’ont rien à foutre là, je ne sais pas pourquoi ils eu l’audace de venir ici. Ils tuent, mutilent, assassinent et torturent notamment les minorités qui sont présentes aujourd’hui et c’est honteux que l’organisation de la pride [Pride Toulouse] laisse faire. »

Au sein de l’inter-organisation féministe de la ville, à l’initiative de Du Pain et Des Roses, huit organisations ont décidé de former un pôle anticapitaliste et contre le pinkwashing au sein de cette marche institutionnelle afin de dénoncer et rendre visible aux yeux des milliers de personnes qui participent à l’événement l’hypocrisie de la mairie et des entreprises. Cette initiative s’est tenue le lendemain de la Pride radicale qui a réuni plusieurs centaines de personnes dans le centre-ville, à l’initiative de différents collectifs militants.

Dans un appel unitaire à la marche des fiertés à former ce pôle, les signataires ont souligné l’importance de se battre pour les droits LGBTI+ dans le contexte d’une offensive majeure contre le droit à disposer de son corps aux États-Unis et après une période électorale des plus réactionnaires en France. Pour cela, nous ne pouvons pas nous en remettre à la mairie ni à la police qui, derrière leur vernis arc-en-ciel du mois de juin, font fermer les services de santé destinés aux plus précaires comme le CeGIDD et la PASS du site de l’hôpital Lagrave, que Moudenc a vendu au promoteur Kauffman and Broad pour en faire un parc immobilier de luxe.

Pour arracher des droits effectifs pour les LGBTI+, nos alliés sont les grévistes de la santé et de Chronodrive !

Au contraire, dans la lutte pour les droits pleins et entiers des personnes LGBTI+ contre l’État et ses institutions, nos alliés sont dans les grèves qui revendiquent des moyens dans les services de santé ou à l’école, ainsi que des augmentations de salaires pour faire face à l’inflation dans de nombreuses entreprises. En effet, les personnes LGBTI+ sont parmi les premières impactées par les politiques austéritaires du gouvernement et des patrons en temps de crise économique, que ce soit en tant qu’usagères et usagers des services publics qui subissent des coupes budgétaires, ou en tant que travailleuses et travailleurs dans les secteurs les plus précaires dans lesquelles iels n’occupent pas d’emploi stable.

À ce titre, l’interdiction de l’IVG dans plus de la moitié des États-Unis est une attaque historique contre les femmes, mais aussi les hommes trans et les personnes non-binaires du monde entier. En France, si ce droit existe, la casse de l’hôpital engendre d’importantes difficultés d’accès pour les personnes les plus précaires. Lucie, travailleuse au CHU de Toulouse et militante syndicale à Solidaires raconte : « Le service des naissances de l’hôpital Paule de Viguier est prévu pour accueillir 3000 accouchements, aujourd’hui on est à 5200 avec le même équipement et quasi même personnel. Les grévistes dénoncent que les IVG sont en conséquence les derniers servies ».

Les soins spécifiques dont peuvent avoir besoin les personnes LGBTI+, notamment transgenres, dans ce genre de situation sont par conséquent systématiquement impensés et/ou relégués au dernier plan. Lucie poursuit à propos du manque de moyens aux urgences : « Les urgences c’est la porte d’entrée sur l’hôpital. Pour tout ce qui est discriminations et violences de genre qui sont repérées sur ces services là, ça passe à la trappe quand tu as 25 patients et patientes dont tu dois t’occuper. »

À l’école, outre le manque de moyens qui rend très difficile l’accompagnement spécifique des jeunes LGBTI+, la circulaire Blanquer mise en place sous le dernier quinquennat empêche le personnel de prendre en compte la transition des élèves sans l’accord de leur parents, ce qui expose les personnes transgenres à des souffrances supplémentaires dans des moments décisifs de leur parcours, ce que dénoncent Noah, lycéenne militante au Poing Levé-Révolution Permanente, mais aussi Séverine, enseignante syndiquée à la CGT. Sur la question des violences de genre à l’école, Séverine poursuit : « l’institution affiche de manière très hypocrite des protocoles pour prendre en charge les violences, mais la vérité c’est qu’il n’y a pas de formation, que ce soit au niveau des directions, des rectorats ou des collègues, donc généralement la loi du silence prévaut, ou bien les victimes parlent et il n’y a pas de prise en compte du problème »

Dans le pôle radical de la Pride, les militantes de Du Pain et Des Roses ont également mis à l’honneur la grève en cours à Chronodrive, où la jeunesse précaire est en train de relever la tête pour exiger des augmentations de salaires à la famille Mulliez qui s’enrichit sur son dos au détriment de ses conditions de travail et de vie. Après une première expérience de grève féministe contre le licenciement de Rozenn l’année dernière, les salariés de Chronodrive mènent aujourd’hui une lutte exemplaire contre la précarité, à rebours du sentiment de résignation que le gouvernement a voulu imposer à la jeunesse, en particulier depuis le confinement, dont les suicides de jeunes LGBTI+ comme Fouad, Dinah et plus récemment un lycéen trans, ont été l’expression la plus violente. « On est là pour donner du soutien aux grévistes de Chronodrive […] Ils nous montrent la marche à suivre : ça passe par en bas, pas par les institutions ! Il faut lutter, s’organiser, et c’est par là qu’on va pouvoir avoir un accès à de meilleures conditions de vie. », explique Noah, militante au Poing Levé – Révolution Permanente. Alors que les jeunes LGBTI+ sont, comme l’ensemble des groupes opprimés, en première ligne des jobs précaires, la grève des Chronodrive est un point d’appui important pour construire une lutte d’ensemble pour une augmentation générale des salaires et pour la dignité de toutes et tous !

Un point d’appui pour construire un front féministe contre les attaques à venir

Pour toutes ces raisons, la politique unitaire mené par plusieurs collectifs politiques et syndicats organisations politiques et syndicales, collectifs et associations du milieu LGBTI+ autour d’un mot d’ordre combatif montre que la construction d’une riposte commune est possible face aux attaques réactionnaires qui ne cherchent qu’à diviser les opprimé·es et les exploité·es pour leur faire accepter leur condition.

Dans la perspective d’unifier les revendications du monde du travail, en particulier celles des secteurs de la santé et de l’éducation, et celles pour les droits LGBTI+, la participation de syndicalistes de la FSU, de Solidaires et de la CGT Education à la Pride au côté de collectifs féministes et queers comme Bagarre, le Collectif Trans Toulousain et Du Pain et Des Roses est un acquis pour les prochains combats. Comme le souligne une manifestant.e : « [Avec le cortège radical] on devrait être devant et on devrait être là pour nos droits parce qu’il en reste tellement à acquérir et on en est loin […] Il n’y a pas d’autre manière que de militer pour acquérir tous ces droits. »

 
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