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La Izquierda Diario
20 de mai de 2022 Twitter Faceboock

Grève pour les salaires
Grève du 25 mai à la SNCF : la direction craint l’embrasement et désamorce le conflit
Alexis Taïeb

Alors que l’intersyndicale Sud Rail - UNSA - CFDT a appelé à une grève dans la circulation le 25 mai prochain, la direction de SNCF Réseau a rencontré les syndicats ce mardi, afin de proposer, à conditions du retrait du préavis de grève, une reconnaissance financière d’environ 1.000 euros pour chaque agent de la circulation, en plus d’autres avances. Face aux importants taux de grève qui s’annonçait pour cette journée à la veille du week-end de l’ascension, la direction, par ces propositions, a désamorcé le conflit. Mais cela montre surtout la crainte de l’embrasement face à un mépris qui n’a que trop duré et, surtout, la possibilité d’arracher de réelles victoires.

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Alors que le coût de la vie ne fait qu’augmenter, et que les salaires, eux, ne suivent pas, une intersyndicale composée de SUD RAIL, UNSA Ferroviaire et CFDT Cheminots ont appelé à une grève dans la circulation le 25 mai prochain, à l’initiative de Sud Rail. 10 jours avant même la journée de grève qui s’annonçait massive, en vue d’une conjoncture qui pourrait devenir explosive, la direction craint un embrasement et désamorce le conflit.

Conditions de travail dégradées, surmenage : « Le sous-effectif est un problème chronique à la circulation »

Depuis des années les réformes néo-libérales s’enchaînent dans le secteur des transports, à l’instar de la réforme du RAIL en 2018, pilotée par la fraîchement première ministre Elisabeth Borne, signant l’ouverture à la concurrence dans le transport des voyageurs, la fermeture de milliers de kilomètres de ligne, etc. Cette politique de « casse » du service public avait, déjà à l’époque, provoqué la colère des cheminots qui s’étaient mobilisés massivement pour s’opposer à cette réforme néo-libérale.

Aujourd’hui encore, les choses ne vont pas en s’arrangeant, et les attaques patronales se font sentir au quotidien pour les travailleurs. Laura, agent circulation au Bourget sur la région de Paris Nord témoigne : « On n’est jamais assez nombreux, les agents de réserve qui font plusieurs postes, notamment, travaillent à flux tendu, souvent on leur fait sauter des repos, on change leur planning en permanence. Toujours dans l’objectif de faire toujours plus de profit, la direction mène une politique de suppression et automatisation de certains postes, et les conditions de travail difficiles, pour des salaires qui ne permettent pas de boucler les fins de mois, font que nos métiers ne sont pas attractifs, et que la direction a du mal à recruter. Le sous-effectif est un problème chronique à la circulation. »

Ces conditions de travail terribles, où les salariés mettent en danger leur santé, ne sont pas réservées au secteur de la circulation, mais s’étendent à beaucoup d’autres métiers de la SNCF, comme par exemple à la maintenance où, récemment, au technicentre de Châtillon, un des travailleurs s’est grièvement blessé dans un accident de travail : « Ce lundi matin, un accident grave est survenu à Chatillon bas sur le chantier fosses » peut-on lire dans un communiqué de SUD Rail, pointant les « cadences infernales » et les conditions de travail déplorables comme causes de l’accident.

« Inflation : quand les salaires ne suivent pas, la colère monte »

Ainsi, en plus de ces problèmes structurels à la SNCF qui poussent à bout les cheminots, il faut additionner une conjoncture très difficile qui pourrait rapidement être la goutte de trop. En-tout-cas, c’est ce que craint la direction de la SNCF.

Et pour cause, le coût de la vie ne fait qu’augmenter depuis des semaines avec l’inflation qui a atteint 4,8 % le mois dernier. De la même manière, les prix des produits de première nécessité augmentent magistralement et cela devient de plus en plus difficile pour les couches populaires de vivre correctement.

Et pendant que les patrons continuent de s’engraisser sur le dos des travailleurs, ces derniers payent la crise de plein fouet : « Les salaires ne permettent pas de boucler les fins de mois, avec tout qui augmente, l’essence, les produits de première nécessité, mais aussi les factures de gaz et d’électricité... En plus de la fatigue, beaucoup de collègues ont vraiment du mal à s’en sortir financièrement » rapporte Laura, avant d’ajouter : « Il est impératif de revendiquer des solutions de fond, à la fois sur la question des embauches, mais aussi des salaires »

En ce sens, de nombreuses grèves locales ont déjà éclaté à la SNCF ces derniers temps, et notamment à la circulation, comme en Occitanie ou en Nouvelle Aquitaine. Des grèves qui ne font qu’exprimer le ras de bol générale présent chez les travailleurs.

« Face à la pression, la SNCF craint l’embrasement et lâche une compensation financière d’environ 1000 euros »

Cette situation plus que tendue a amené l’intersyndicale, composée de SUD Rail, UNSA Ferroviaire et de la CFDT Cheminots, à appeler à une grève le 25 mai prochain dans tous les métiers de la circulation (agents circulation, aiguilleurs, régulateurs, mais aussi responsables travaux, commande du personnel, etc), pour exiger une hausse générale des salaires, des embauches à la hauteur des besoins, ainsi que d’autres revendications. Un appel à la grève qui partait pour être très suivis nationalement, au vu du nombre de grévistes déclarés ces derniers jours.

Mais, ce mardi 17 mai, à un peu moins de 10 jours de la grève, la direction de la SNCF a rencontré les organisations syndicales lors d’une négociation suite au nombre croissant de cheminots qui se déclaraient grévistes un peu partout en France, dans le cadre d’une situation qui pourrait devenir explosive. Ainsi, loin d’être sereine, la direction a proposé aux syndicats, à la condition de retirer le préavis de grève, une prime de 600€ sur la paie de juin et 8 mois d’augmentation de 20% de la prime de travail, le tout revenant à un total d’environ 1000€. Elle a également acté 200 embauches supplémentaires à la circulation par rapport à ce qui était initialement prévu pour l’année, en plus d’autres engagements qu’elle a pris, mais qui ne sont à l’heure actuelle que des promesses que les cheminots vont devoir concrétiser avec le rapport de force. Suite à quoi les organisations syndicales ont décidé de retirer le préavis de grève.

Très clairement, si la direction était déjà prête, alors même que la grève n’avait même pas débuté, à faire de premières annonces, c’est qu’elle craint que la situation puisse s’embraser. Anasse Kazib, agent circulation à Paris Nord témoigne : « Le ras de bol est général, la direction craint que la grève puisse contaminer d’autres secteurs. Je n’ai jamais vu une direction qui propose des primes et d’autres avancées 10 jours avant une grève de 24 heures »

« De l’argent, il y’en a ! Il faut construire le rapport de force pour exiger plus ! »

En effet, si la direction en est déjà à concéder, au regard de la situation globale, des premières mesures, c’est tout d’abord le signe qu’elle a peur d’un phénomène d’embrasement plus général. Si cet appel à la grève était cantonné à la circulation, un secteur de la SNCF qui relève la tête dans un moment où tout le monde est à bout de souffle, pourrait laisser des traînées de poudre.

Et c’est ce que craint la SNCF, qui est très consciente de la situation globale de ses salariés. Mais ce que révèle également ce pas en arrière de la SNCF, c’est que, dans les caisses, de l’argent il y en a. Et pour cause, en 2021, la SNCF revendiquait un chiffre d’affaires de 34,7 milliards d’euro, une augmentation de 15% par rapport à l’année précédente. Autant dire que du côté du patronat, les affaires vont bien.

Pourtant, pour la direction, il n’est pas question d’augmenter les salaires. Si aujourd’hui la SNCF est prête à octroyer 1000 euros de rétribution financière à une partie de ses salariés, c’est bien parce que ces derniers étaient en train d’instaurer un rapport de force en préparant leur grève, démontrant ainsi que seul le rapport de force peut payer.

Mais face à cette tentative de la direction du tuer la grève avant qu’elle ne commence, loin de se contenter de cette somme qui ne sera qu’un pansement de courte durée au regard des chiffres de l’inflation qui montent en flèche, il faut, au contraire, bien comprendre que si la SCNF recule, c’est parce que les cheminots ont le pouvoir d’instaurer un rapport de force. Ce recul doit être un encouragement pour préparer les futurs combats, afin d’exiger, comme le revendiquaient les cheminots dans une vidéo, une augmentation des salaires d’au moins 300 euros et des embauches massives !

 
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