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La Izquierda Diario
13 de octobre de 2021 Twitter Faceboock

Pour séduire la Manif pour Tous, Zemmour à l’offensive contre les enfants trans et les militant.e.s LGBT
Tristane Chalaise

Invité mercredi sur le plateau de l’émission Punchline, le polémiste d’extrême-droite a profité de la publication d’une circulaire sur la prise en compte des élèves transgenre pour développer ses positions transphobes, allant jusqu’à comparer les militant.e.s LGBT au Dr Mengele, un criminel de guerre nazi. Dans l’objectif des présidentielles, Zemmour continue à travailler pour s’attirer les faveurs de l’électorat de la Manif pour Tous afin de fracturer LR, tout en s’attaquant à Macron, qui, a quelques mois des élections, opère un virage afin de se faire passer pour progressiste.

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Source image : capture d’écran Europe 1

Fake news et surenchère réactionnaire : Zemmour déroule sa rhétorique habituelle sur la transidentité, un « trouble psychologique », fruit de la « propagande LGBT »

Que ce soit dans son interview sur Europe 1 ou dans la série de Tweets qui s’en est suivie, les positions d’Eric Zemmour sur les enfants trans ont le mérite d’être claires. D’un côté, les enfants trans n’existent pas, mais sont le résultat d’une « mode », impulsée par la « propagande LGBT » importée des Etats-Unis qui profiterait des « troubles psychologiques » de certains enfants. De l’autre, il existerait des militant.e.s LGBT et des professionnels de santé qui mutileraient les enfants en leur faisant subir des opérations barbares et expérimentales, à l’image du Dr Mengele, médecin d’Auschwitz qui a torturé et tué des dizaines d’enfants.

Des déclarations ultra-réactionnaires, qui vont non seulement à l’encontre – comme c’est habituel chez le polémiste d’extrême-droite – de toute considération de la réalité, qui visent surtout par leur caractère volontairement provocateur à radicaliser et à agiter une base ultra-réactionnaire, celle de la Manif pour Tous. Les fakes news, procédé de l’extrême-droite, sont proférées à heure de grande écoute pour construire un récit fantasmé sur le traitement réservés aux enfants transgenre, agitant les « conversions forcées » et les mutilations génitales des enfants. Une fake news qui, évidemment, ne tient pas : que ce soit aux Etats-Unis ou en France, les opérations génitales sur des enfants trans n’existent pas.
Au contraire, comme le souligne un article publié dans le magazine Têtu., les militant.e.s LGBT sont les premiers à lutter contre les « conversions forcées » et les mutilations génitales des enfants, qui, aujourd’hui, existent bel et bien, mais concernent les enfants intersexes (qui possèdent des organes génitaux à la fois masculins et féminins) auquel un sexe est assigné sans qu’ils puissent fournir leur consentement.

Zemmour surfe sur la vague transphobe pour s’attirer les bulletins de vote de la Manif pour Tous

La violence du propos n’est pas nouvelle : déjà, en juin, Zemmour polémiquait au sujet d’une enfant transgenre. « Vous avez vu que la mode aujourd’hui, ce n’est plus les gays, ce n’est plus les lesbiennes, maintenant c’est les transsexuels […] Bloquer la puberté des gens, faire des expériences sur des enfants […] Ils ne se rendent pas compte, c’est criminel ! ». Prétendant aujourd’hui n’être ni raciste (!) ni homophobe (!), Zemmour semble préférer axer son offensive un sujet plus consensuel au sein de la droite réactionnaire et conservatrice qu’est la transphobie. Il « ratisse » – un peu – plus large tout en se concentrant sur l’électorat de la Manif pour Tous, en renforçant l’image de figure de la droite réactionnaire et identitaire qu’il s’est construite à travers, entre autres, de prises de positons sexistes, des déclarations contre l’adoption pour les couples homosexuels, contre la PMA, ou encore par sa participation au « sommet démographique » organisé en septembre par Viktor Orban autour de la défense des « valeurs familiales » contre le « lobby LGBT et du genre ».

Ses déclarations transphobes sont ainsi à mettre dans la continuité de la tribune parue dans l’Express au mois de septembre, qui marque une étape importante dans l’offensive visant à légitimer la transphobie sous un couvert pseudo-scientifique et intellectuel. Zemmour tente d’unifier sous la banière de la transphobie l’électorat de "la droite Trocadéro", mais peut aussi séduire la frange la plus homophobe et transphobe de l’électorat RN, Marine Le Pen n’ayant pas encore, dans le cadre de la campagne présidentielle, réaffirmé de positions aussi radicales sur le sujet – prétendant être « opposée à quelque discrimination que ce soit » tout en se refusant à condamner les lois anti-LGBT de Viktor Orban et ayant, elle aussi, participé au sommet hongrois. Interpelé par Zemmour au sujet de la circulaire, Jean-Michel Blanquer a ainsi déclaré qu’en mettant en avant la transphobie, Zemmour était « entré en campagne ».

La circulaire Blanquer, une manœuvre prétendument progressiste de la majorité présidentielle à quelques mois des élections

Quoi que puisse prétendre Zemmour pour les besoins de sa campagne, le fait que Blanquer soit à l’origine de la circulaire « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » ne fait pas de lui un champion de la lutte pour les droits des personnes LGBT et contre les oppression liées au genre.

Au contraire, au cours de de son mandat – exceptionnellement long – le ministre n’a cessé de défendre des positions réactionnaires, sexistes et patriarcales dès qu’il s’est agi d’aborder des problématiques liées au genre. C’est le même Blanquer qui, attaqué par Zemmour, prétend aujourd’hui vouloir que « tout le monde se sent égal et bien » à l’école, a interdit dans une autre circulaire, publiée il y a quelques mois, l’usage de l’écriture inclusive dans l’Education nationale, ou encore, a participé à la sexualisation et la culpabilisation des adolescentes en fustigeant les crops-tops. De concert avec Macron, le ministre s’est ainsi prononcé pour le port d’une « tenue républicaine » à l’école. De même, c’est ce même Blanquer qui, il y tout juste un an, utilisait le vocabulaire de l’extrême-droite – et d’Eric Zemmour ! – pour dénoncer l’influence des islamo-gauchistes et des « thèses intersectionnelles » importées des Etats-Unis à l’université.

Pourquoi une telle volte-face de la part d’un ministre qui s’est fait l’un des meilleurs relais des politiques réactionnaires du gouvernement ? Tout simplement parce que, comme Eric Zemmour, Jean-Michel Blanquer est en campagne. Dans son cas, pour Emmanuel Macron, dont il espère rester le ministre. La circulaire de Blanquer intervient à un moment où la macronie, dans l’optique plus que probable d’un deuxième tour face à Eric Zemmour ou Marine Le Pen, travaille son image et prépare son discours afin d’incarner un « rempart » un minimum crédible à l’extrême-droite, afin de remporter les élections sur la base d’un « sursaut républicain », comme il a pu le faire aux élections précédentes. D’où des mesures donnant un verni brusquement progressiste à l’action du gouvernement : loi élargissant la PMA, interdiction des thérapies de conversion, et, désormais, une attention portée aux discriminations subies par les personnes trans.

De fait, le gouvernement réagit à une pression réelle qui s’exerce sur l’école, l’institution scolaire étant un lieu central dans l’expression des discriminations et des violences que peuvent subir les élèves trans. L’année dernière, le suicide de Fouad, lycéenne trans, après un échange difficile avec la direction de son établissement, avait entaché le ministère Blanquer. Le ministre avait été contraint de reconnaitre les lacunes de l’Éducation nationale. Une enquête, citée par le journal Ouest-France, conclut ainsi que 85 % des élèves trans affirment avoir été victimes de harcèlement et 21 % mettent fin à leur scolarité en raison de la transphobie dont ils font l’objet.

La circulaire tente ainsi de donner des gages de l’engagement du gouvernement sur la question des droits des personnes LBGT, affirmant que « La transidentité est un fait qui concerne l’institution scolaire ». Toutefois, comme le souligne un article publié sur le site The Conversation, « si la circulaire suggère de mettre en place les conditions d’un « dialogue avec la famille », elle ne se situe pas a priori du côté des jeunes trans […] la circulaire tranche, non en faveur des jeunes personnes concernées et rendues vulnérables par l’école, mais en faveur ultime de leurs parents », dans la mesure où elle leur donne le dernier mot. Le gouvernement, tout en prétendant à l’ouverture, donne ainsi des gages à sa droite, maintenant les schémas familiaux traditionnels qui impliquent le contrôle des parents sur leur enfant.

Contre la transphobie de Zemmour et le pinkwashing de Blanquer, organisons la riposte !

L’ouverture sur le terrain médiatique du débat sur le traitement des enfants trans et les fakes news proférées par Eric Zemmour mais aussi par le gouvernement Macron qui soumet les LGBTI+ à plus de violences et ne peut rester sans réponse de la part des organisations politiques et syndicales, du mouvement ouvrier, féministe et anti-raciste. Si ce dernier veut faire de la transphobie une des armes de sa campagne présidentielle pour séduire des secteurs de la droite, nous devons lui opposer une lutte contre la transphobie quotidienne et institutionnelle, y compris au sein de l’éducation nationale. Seulement, cela ne se fera pas sans des moyens massifs alloués aux services publics pour une éducation sexuelle complète non morale et non discriminante ainsi qu’un accueil des enfants en questionnement sur leur genre.

Après des marches des fiertés dans toute la France qui ont réuni des milliers de personnes dont environ 35 000 manifestant.e.s qui ont défilé à Toulouse dans une ambiance festive et revendicative, il est important de continuer à se battre contre les violences LGBTI-phobes quotidiennes et institutionnelles. Avec le collectif Du Pain et Des Roses, nous avons défendu cette perspective dans le cortège radical où nous avons dénoncé les politiques précarisantes du gouvernement Macron qui tout en arborant les couleurs du drapeau LGBTI+ attaque l’éducation nationale et la santé.

 
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