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9 de septembre de 2021 Twitter Faceboock

Droit des femmes
Mexique. Après des années de lutte, le mouvement des femmes obtient la dépénalisation de l’avortement

La Cour suprême mexicaine, l’instance la plus importante de l’ordre judiciaire mexicain, a déclaré inconstitutionnelle la pénalisation de l’avortement dans une décision rendue le 7 septembre. Un premier pas obtenu grâce à la lutte des femmes pour le droit à l’avortement mais qui ne doit pas masquer un accès à l’IVG encore loin d’être garanti et sécurisé.

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La Cour suprême mexicaine, organe juridique dont les décisions ont autorité sur les cours fédérales, a rendu ce mardi 7 septembre une décision rendant inconstitutionnelle la pénalisation de l’avortement. Cette décision a été rendue concernant le code pénal local de Coahuila, un des 31 États du Mexique. Le projet déclare deux articles du code Pénal de Coahuila inconstitutionnels. Le premier, l’article 195 stipulait que l’avortement était une infraction pénale, alors que le second, l’article 196, sanctionnait pénalement toute personnes qui avorte ou pratique un avortement à une peine de prison d’un à trois ans.

Le Mexique étant un État fédéral, cette décision crée un précédent juridique qui devrait permettre que la dépénalisation s’applique dans tous les États. En effet, si les entités fédérées disposent de leur propre législation, elles ont l’obligation de respecter la Constitution nationale dont la Cour Suprême est la garante.

Une dépénalisation mais pas une légalisation

Le résultat de cette dépénalisation est donc la fin des sanctions pénales pour les personnes avortant ou participant à un avortement, notamment le personnel médical. Ces personnes ne pourront désormais plus être poursuivies, jugées ou emprisonnées pour avoir pratiquer un avortement. Toutefois, il faut distinguer la dépénalisation de la légalisation. En effet, la dépénalisation ne garantit en aucun cas un accès à l’avortement, ainsi que la sécurité de sa pratique. Seule une légalisation permettrait de créer un cadre juridique pour entourer la pratique. La dépénalisation ne donne donc pas de réelle garantie pour le droit des femmes sur leur corps, elle n’impose pas un accès gratuit et sécurisé à l’IVG. Les hôpitaux pourront continuer de refuser de pratiquer des IVG et seules les personnes ayant suffisamment de moyens auront accès à l’IVG de façon sécurisée. En effet, ce sont les personnes les plus pauvres, les travailleuses précaires qui continueront d’être exposées aux avortements à risque.

Une dépénalisation qui ne doit pas conduire à un affaiblissement du mouvement des femmes, qui continue d’être attaqué

Au-delà des limites de la seule dépénalisation, le mouvement féministe doit affronter les attaques de nombreux secteurs réactionnaires, tel que les secteurs du commerce ou la droite conservatrice qui renforcent ses offensives contre les droits des femmes, en particulier dans les moments d’avancés.

C’est particulièrement vrai pour l’Église catholique qui continue de jouer un rôle profondément réactionnaire et rétrograde en Amérique Latine, afin de priver les femmes du droit de disposer de leur corps. Lors des débats menés à la Cour suprême, l’église catholique a tenté d’utiliser son influence pour empêcher la dépénalisation. Elle s’est appuyée notamment sur le principe de souveraineté des cours fédérales. Les secteurs réactionnaires ont centré leur offensive sur le fait que l’argument des « droits reproductifs » utilisé par la Cour pour défendre la dépénalisation est irrecevable car il s’opposerait à la défense des droits humains que la Cour est censée protéger. Cette argumentation s’appuie sur l’idée qu’un embryon serait une personne or, comme le rappelle Andrea D’Atri, féministe socialiste et fondatrice du groupe Pan y Rosas :

« En droit, une "personne" est quelqu’un qui est capable d’acquérir des droits et de contracter des obligations. Et si nos lois considèrent l’existence dès la conception, elles ne reconnaissent comme "personne" que les personnes nées vivantes. Les embryons et les fœtus sont considérés comme des "personnes à naître", c’est-à-dire que s’ils meurent avant la naissance, ils n’ont jamais existé aux yeux de la loi. Par exemple, si une femme perd une grossesse - ce que l’on appelle une fausse couche - cet embryon ne recevra pas de nom, ne sera pas enregistré dans le registre civil et ne sera pas considéré comme faisant partie du troupeau par l’Église. »

Cette dépénalisation ne doit donc pas faire oublier les nombreuses attaques que l’accès IVG, et plus largement les mouvements pour les droits des femmes, continuent de susciter. Si cette dépénalisation est le résultat d’un mouvement des femmes importants, et non d’une preuve de la bonne volonté du parti au pouvoir*, le risque est que cette décision conduise à une démobilisation du mouvement des femmes, alors que l’avortement continue d’être réservé à une petite minorité aisée.

La conquête des droits doit continuer de se faire de manière offensive. Ils ne viendront pas d’une confiance aveugle dans les partis du régime et dans les institutions. La lutte doit se faire en indépendance politique et s’appuyer sur la force du mouvement des femmes, notamment dans la continuité des marées vertes ayant mobilisées des millions de femmes partout en Amérique Latine**.

*Mouvement de Régénération Nationale (Morena) dont est issu le président mexicain

**en référence aux mouvements de femmes en Amérique latine qui ont utilisé un foulard vert comme symbole de la lutte pour le droit à l’avortement.

 
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