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La Izquierda Diario
24 de mai de 2021 Twitter Faceboock

Cadavres, décombres et engins non explosés
Gaza. Le bilan dramatique des destructions causées par les bombardements israéliens
Claude Piperno

248 Palestiniens tués au cours des raids, dont 66 enfants, 39 femmes et deux médecins. 1948 blessés. 53 écoles et six hôpitaux touchés, le principal centre Covid détruit. 800.000 Gazaouis privés d’accès à l’eau. Après le cessez-le-feu, retour sur le bilan dramatique de l’opération criminelle Murailles Protectrices menée par l’Etat d’Israël.

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Crédits photo : Fady Hanona/MSF

Il y a un siècle et demi, Edmond de Goncourt écrivait, à propos de la Semaine sanglante, que la « saignée à blanc » contre les Communard parisiens avait fait « gagner vingt ans de repos à la vieille société ». Tsahal a le « triomphe » plus modeste. Pour le général Aharon Haliva, l’Opération Gardiens des Murailles qui vient de s’achever après 11 jours de bombardements apportera cinq ans de tranquillité à Israël. La recette, depuis 1948, est donc toujours la même : détruire, liquider et massacrer pour faire passer toute envie de résister, et ce jusqu’à la prochaine agression. Une façon, pour Israël, d’exister et de justifier, auprès de sa propre population, son existence.

Cinq années de tranquillité qui auraient donc été gagnées sur les ruines et les cadavres qui se sont accumulés à Gaza depuis le début de l’offensive aérienne initiée le 10 mai avec le début de l’Opération Murailles Protectrices. Le bilan est avant tout humain : 248 Palestiniens tués au cours des raids, dont 66 enfants, 39 femmes et deux médecins, et 1948 blessés, dont 610 enfants et plus de 400 femmes, selon les Palestiniens. « Foutaises », répond en substance Benjamin Netanyahu, « la majeur partie d’entre eux sont des terroristes, ou des boucliers humains placés par les organisations armées pour protéger les entrepôts d’armes des bombardements israéliens ». Pour se justifier, Tsahal s’est même vue dans l’obligation de publier un enregistrement réalisé à bord d’un de ses chasseurs bombardiers dans lequel le pilote demande la suspension d’une opération en raison de la présence d’enfants autour de la « cible ». Un joli conte édifiant à usage de l’opinion publique israélienne, à 72% en faveur de la poursuite de l’offensive « contre le Hamas », selon un sondage réalisé par Channel 12 avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu.

Si même l’ONU le dit…

N’en déplaise aux va-t-en-guerre israéliens et à leurs partisans, sur place et partout dans le monde et à en croire les chiffres communiqués par plusieurs agences onusiennes, la réalité serait radicalement distincte. Plus tragique et infiniment plus barbare. La question n’est pas d’ériger les Nations Unies en un arbitraire indépendant des tensions géopolitiques internationales ni de déposer une quelconque illusion dans sa capacité à « résoudre » le conflit israélo-palestinien. L’ONU reste et restera un instrument de domination impérialiste. Mais pour qui veut bien lire entre les lignes de la rhétorique diplomatique onusienne ou regarder de près les déclarations émises par ses différentes branches, sur place, cela permet d’observer combien la propagande guerrière israélienne est construite sur un tissu de mensonges.

Selon Netanyahu, 200 « terroristes » auraient été tués au cours des frappes, dont 25 responsables de haut-rang des organisations armées palestiniennes, les autres ayant été victimes de « feu ami ». Il est vrai que des combattants palestiniens ont été tués au cours de certaines opérations de lancement de roquette, et des habitants de la Bande ont même été touchés par des tirs palestiniens mal réglés qui sont retombés en territoire palestinien. Mais la majeure partie des Gazaouis qui a trouvé la mort ont été tués par des tirs israéliens et une minorité d’entre eux étaient effectivement des miliciens des organisations palestiniennes, à l’instar de Bassem Issa, l’un des commandant de la branche armée du Hamas à Gaza. Pour Matthias Schmale, haut responsable de l’URNWA, l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, le nombre de victimes serait supérieur à celui donné par les aurorités de Gaza. Selon lui, ce sont « plus de 250 personnes » qui ont été tuées au cours des bombardements, ou, au bas mot, « 222 personnes dont 66 enfants », selon des experts indépendants appelés sur place par l’ONU.

Déplacés et destructions

Aux corps sans vie, aux blessés et aux mutilés, il faut rajouter les déplacés, qui ont eu « un peu plus de chance » mais qui, pour certains, ont tout perdu. Le Hamas parle de 120.000 déplacés au cours des opérations israéliennes et l’ONU confirme que 77.000 personnes ont trouvé refuge, au cours des bombardements dans 53 écoles gérées par l’UNRWA. Si l’on en croit l’Office des Nations Unies pour les Affaires humanitaires (OCHA), 1000 seraient, aujourd’hui encore, privées de logement. Les bombardements, en effet, ont été d’une rare violence. Toujours selon Schmalle, qui ne saurait être accusé d’être un agent du Hamas, l’Opération Gardiens des Murailles a été « pire en intensité et en terreur [que celle menée] en 2014 » par Israël, dans le cadre de l’Opération Bordure Protectrice qui avait pourtant duré 53 jours. Les autorités gazaouies font état de 2000 logements détruits et 15000 habitations partiellement endommagées. L’OCHA, de son côté, confirme la destruction de 258 bâtiments, rasés au sol ou abattus et de 770 bâtiments qui ne sont plus accessibles. Ce bilan catastrophique n’est pas uniquement dû au tissu urbain très serré de la bande de Gaza, l’une des zones les plus densément peuplées au monde avec 5480 habitants au km2. Pour procéder à ses « frappes chirurgicales », qui n’ont rien de chirurgical, l’aviation israélienne a procédé à coups de bombes à haute pénétration, ce qui implique que pour un bâtiment touché ou abattu, c’est une vingtaine d’autres, environnants, qui sont ébranlés jusque dans leurs fondations.

Les destructions sont innombrables et les « dommages collatéraux » sont loin d’être aussi marginaux que ne le laisse croire Israël. Pour « gagner cinq ans de tranquillité », c’est l’ensemble de la population qui a été visée. Ainsi, selon Lynn Hastings, qui n’est pas non plus une représentante du Hamas mais responsable de l’OCHA pour les Territoires occupés, « de nombreuses infrastructures qui jouaient auparavant un rôle clé de fournisseurs de services de base ont été détruits ou sérieusement endommagés, dont un laboratoire de tests contre le Covid-19. Des stations d’épuration ont été endommagées, ce qui fait peser une menace sanitaire. Le seul centre de santé du Nord de la bande de Gaza – qui faisait un excellent travail de vaccination – a été endommagé, au point où il n’est plus accessible à la population, et ce alors que nous traversons une pandémie à échelle globale. (…) La sécurité alimentaire est remise en question [en raison de la destruction de stocks de semences. J’ai également pu visiter plusieurs écoles endommagées, ce qui complique ultérieurement l’accès des enfants à l’éducation, déjà rendue très difficile par les interruptions dues au Covid ». La liste des infrastructures détruites ou semi-détruites est en effet longue : les bombes n’ont pas épargné 53 écoles, six hôpitaux, onze centre de santé. La moitié du réseau d’eau potable de la bande est à l’arrêt en raison des raids, ce qui privé d’accès à l’eau 800.000 Gazaouis. Il en va de même pour le réseau électrique.

Bombes à retardement

Mais le calvaire des Gazaouis ne s’arrête pas là. Alors que des corps se trouvaient encore sous les décombres ce week-end, plus de 300 bombes non explosées jonchent la Bande, selon Mahmoud Salah, responsable de la police locale. A nouveau, Israël accuse le chef de la police, lié au Hamas, de mensonge. Schmall, de son côté, fait état d’au moins une école de l’UNRWA où deux engins explosifs non désamorcés se trouvaient encore, ce dimanche. Compte tenu de la quantité de bombes larguées par l’aviation israélienne, le chiffre de 300 engins non explosés évoqué par Salah est sans doute très proche de la réalité.

Mais la véritable bombe à retardement, pour l’Etat d’Israël, cette fois-ci, se trouve du côté du sentiment national palestinien, chauffé à blanc, des Arabes israéliens, traités comme des citoyens de second zone et qui se sont soulevés en nombre, au cours des dernières semaines, mais également du côté de la minorité de gauche de radicale, en Israël, trop peu nombreuse, certes, qui comprend bien que la politique expansionniste, militariste et raciste de son Etat mène les populations droit dans le mur. Les hauts-gradés israéliens et Netanyahu auront beau dire qu’ils ont gagné « cinq ans de tranquillité », la résistance au sionisme n’a pas dit son dernier mot et les crimes et destructions de l’armée sioniste n’auront fait que renforcer un peu plus sa détermination.

 
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