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La Izquierda Diario
3 de mai de 2021 Twitter Faceboock

BLANQUER DÉMISSION !
Interview. Dans les établissements scolaires, des conditions sanitaires inquiétantes et des examens en présentiel
Arthur Coste

Malgré la situation sanitaire loin d’être au beau fixe, Blanquer a tout de même maintenu les examens au collège et au lycée en présentiel créant ainsi une situation précaire pour de nombreux élèves et professeur. Ce lundi, nombre d’entre eux sortent dans la rue pour protester contre cette situation et demander les examens en contrôle continu. Nous avons interviewé Elise, professeure d’Histoire-Géo au collège en Seine-St-Denis.

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Crédits photo : Frederick Floren/AFP

Révolution Permanente : Peux-tu nous raconter quelles sont tes conditions de travail et quelles mesures ont été mises en place pour ralentir l’épidémie et améliorer la situation sanitaire ?

Elise : Déjà, la première chose à dire c’est que la stratégie du gouvernement, évidemment, elle est encore celle de faire ouvrir les écoles à tout prix alors qu’il y a encore une très forte circulation du virus et qu’on voit bien que c’est encore une volonté de faire la garderie du MEDEF, ce qui est d’autant plus visible dans les collèges des départements les plus touchés. Par exemple, St-Denis est l’un des départements les plus touchés. Donc les 4èmes et les 3èmes sont en demi-jauge, ça veut dire qu’ils ne sont pas présents toute la journée dans l’établissement mais par contre les 6èmes et les 5èmes sont présents en classe entière, toute la journée, etc…. Donc on voit bien que déjà ça n’a pas trop de sens cette question-là. Ensuite, nous, comment s’organisent les demi-jauges, c’est un peu lié au local. Il va y avoir certains établissements qui vont fonctionner en faisant des demi-groupes, d’autres les élèves de 3èmes viennent le matin mais pas l’après-midi et inversement avec les 4èmes.

Nous pour l’instant c’est comme ça qu’on fonctionne, même si on va sêrement changer des choses, parce que la réalité c’est qu’encore une fois c’est ce que l’on appelle dans l’éducation nationale le « démerdentiel ». Parce que vous avez un protocole très vague et puis après on en fait ce qu’on en peut. Ça c’est le premier truc. Ensuite, on voit aussi qu’il n’y a rien de nouveau, Blanquer a axé toute sa communication avec l’arrivée des autotests. Donc en promettant l’arrivée chaque semaine de plusieurs centaines de milliers d’autotests qui seraient présents à la rentrée. Ce qu’on voit c’est que déjà on ne les a pas. Evidemment, l’arrivée des autotests, pour nous, ça aurait permis d’éclipser l’absence totale de stratégie vaccinale pour les enseignants. C’est-à-dire qu’en fait, encore une fois on nous promet des choses, des autotests, etc… mais derrière il n’y a toujours pas en place de stratégie vaccinale pour les personnels de l’éducation. Pareil pour les autotests, on ne sait pas comment ça va se passer.

On voit bien que l’idée de Blanquer, c’est que c’est aux enseignant eux-mêmes de faire les tests. Puisque ce qui se passe c’est qu’il n’y a pas assez de personnels de santé dans les établissements scolaires. Donc on va nous demander de jouer les infirmiers alors que nous ce qu’on réclame c’est la création de pôles de santé, d’infirmières, etc… Et d’embaucher massivement du personnel dans l’éducation pour pallier ce manque-là. Encore une fois on a des promesses de rentrée qui ne sont pas tenues et que Blanquer va faire tenir jusqu’aux grandes vacances une situation comme ça. Voilà à peu près la situation dans laquelle on se trouve, c’est-à-dire des promesses, mais rien n’est fait sur le terrain.

RP : Est-ce que le brevet est maintenu, mis en distanciel, ou passé en contrôle continu ? Comment se passent les examens ?

Elise : Sur le collège, l’examen est complétement maintenu. Les élèves ont un oral à passer qui du coup sera passé, et les épreuves aussi doivent être passées à l’écrit sans aucun aménagement des programmes. Alors c’est une revendication qui était déjà sur la table quand on avait repris en juin de l’année dernière quand ils avaient annulé le brevet, nous déjà on alertait - en même temps qu’être militante je suis aussi syndiquée au SNES - sur des revendications qui était portées par le personnel enseignant mais aussi par les syndicats qui étaient de faire dès la rentrée des aménagements de programme, de les alléger pour pouvoir enseigner convenablement. Parce qu’on savait très bien que cette année là ça allait être très compliqué et de fait elle l’est. On a beaucoup de mal à pouvoir terminer les programmes dans les temps pour faire passer l’examen et il n’y a aucun aménagement. Nous on en arrive à réclamer tout simplement qu’il n’y est pas d’épreuve qui se tiennent car c’est intenable.

Ça c’est pour le niveau du collège, après il y a au niveau du lycée aussi, c’est qu’à l’appel de l’UNL (union nationale lycéenne), il y a eu plusieurs blocages de lycée. Sur la Seine-St-Denis il y en a qui ont débrayé et qui ont fait des blocus parfois sous haute surveillance policière et pour réclamer que les examens se tiennent en contrôle continu et qu’il y ait la suppression du grand oral et puis la suppression des examens écrits. Parce que ça a été extrêmement compliqué pour eux, il n’y a pas eu d’année complète, il y a des profs qui sont moins remplacés, surtout en Seine-St-Denis où c’est en général un remplacement une fois sur deux par rapport au reste de la France où c’est à peu près 80% de remplacement. Donc on voit une situation où il y a une rupture d’égalité en tout cas très forte cette année et que c’est intenable pour les élèves de tenir le bac. En tout cas il y a eu pas mal de débrayages dans plusieurs établissement et lycées d’élèves soutenus par leurs professeurs et ça c’est plutôt positif pour cette rentrée. On va voir ce que ça va donner dans les prochains jours mais en tout cas il y a une alerte qui a été posée et c’est plutôt positif.

RP : En tant que prof, tu le vois comment toi ? Tu vas sur les blocages, tu prends un peu la température ?

Elise : Comme je suis au collège c’est un peu plus compliqué, donc non. Mais si je pouvais, oui bien évidemment, toute notre politique c’est d’entourer les lycéens mais les profs plus militants qui bossent dans les lycées vont encadrer les lycéens, ne serait-ce que pour assurer la sécurité et même face aux violences policières qui pourraient éclater. Mais après moi je suis en collège donc je ne peux pas trop développer là-dessus.

RP : Mais du coup tes élèves il le vivent comment ? Ils sont comment mentalement par rapport aux mesures qui sont prises ?

Elise : Bah là, pour eux c’est très difficile de se projeter. Par exemple, moi je vois que les élèves de 3ème que j’ai - je suis prof principale auprès de 3èmes - l’année déjà ils ne l’ont pas vu passer. On a l’impression qu’on arrive au mois de mai, ils vont devoir faire leurs vœux pour le lycée et sont complétement perdus. L’année a été complexe pour eux et c’est compliqué de se remettre dedans. Là, par exemple, après le mois d’arrêt, c’est que pour se remettre dans l’objectif du brevet, ce n’est pas une situation qui est très agréable pour eux et du coup ça leur met un stress très important en fin d’année.

RP : Même pour vous ça doit être compliqué, ne serait-ce que pour le suivi pédagogique.

Elise : Pour nous, c’est compliqué et puis ça change tout le temps. Nous après c’est vrai que l’examen on l’a mais c’est vrai que pour eux, passer l’examen c’est des conditions particulières. Encore une fois, le gouvernement a fait comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes, Blanquer et Macron, la semaine dernière, sont allés visiter des écoles, là ça continue puis en fait ils font comme s’il ne se passait rien dans les écoles. C’est Blanquer qui, hier, déclarait au Journal du Dimanche que c’était très bien le retour à l’école, que les élèves étaient plus protégés dans le milieu scolaire qu’à la maison donc voilà.

Nous on se pose dans la perspective face à la crise de dire que face à des protocoles qui sont fait par en haut, par des gens qui ne connaissent rien à comment ça se passe dans une école, dans un établissement scolaire, c’est nous les travailleurs de l’éducation nationale qui connaissons mieux le terrain et pas tous les politiciens au service du patronat. Du coup c’est pour ça que c’est à nous d’élaborer nos propres protocoles, ce qu’on avait essayé de faire en novembre dernier notamment dans la lutte, la mobilisation on avait fait, en tout cas dans mon établissement, grève, pour avoir des protocoles qui soient à la hauteur des enjeux sanitaire, qui soient protecteurs pour les familles, protecteurs pour les élèves, protecteurs pour l’ensemble du personnel de l’éducation et c’est là-dessus qu’on va essayer d’axer cette rentrée de mai et pour tenir jusqu’à la fin de l’année. C’est à nous de lutter dans nos établissements pour exiger des mesures sanitaires à la hauteur.

 
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