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La Izquierda Diario
22 de avril de 2021 Twitter Faceboock

Education nationale
Les profs devront gérer les autotests des élèves : après la garderie du MEDEF, l’infirmerie
Philomène Rozan

La rentrée approche et le gouvernement ne change pas de braquet quant à sa (non) stratégie sanitaire dans les écoles. Blanquer a par contre annoncé la mise en place d’auto-tests dans les lycées... que les profs devront à priori assurer.

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Crédit photo : Getty Image

Ce jeudi, le gouvernement a repris ce qui est devenu sa traditionnelle allocution. A l’ordre du jour cette fois-ci, une situation sanitaire très dégradée, avec plus de 300 morts et 30 000 nouvelles contaminations chaque jour, et un système hospitalier saturé et au bord de l’explosion. Mais aussi la réouverture des écoles dès le lundi comme annoncé par le président de la République, qui ne « conditionne pas la réouverture des écoles à des indicateurs sanitaires ».En effet, le MEDEF a toujours besoin de sa garderie !

Avant le reconfinement, le gouvernement n’avait que peu modifié un protocole sanitaire dit "strict" , jouant avant tout sur le nombre de contaminations nécessaires pour fermer une classe, qui était passé de trois à une seule. Une mesure extrêmement tardive, qui, couplée à des bricolages sur les services dans les cantines et au port du masque pour les personnels et élèves, s’est montrée insuffisante pour éviter la fermeture de nombreuses classes et écoles il y a à peine quelques semaines. D’une manière générale, l’insuffisance du protocole sanitaire proposé par Blanquer a été à l’origine de clusters nombreux. On peut tout de même noter que le ministère, après avoir un temps penché pour un retour aux trois cas par classes pour valider la fermeture, s’est finalement ravisé pour... revenir à la situation pré-confinement. De ce côté, donc, rien de nouveau. 

La seule véritable nouvelle mesure annoncée par Castex et Blanquer pour cacher la misère est cette fois-ci la mise en place d’auto-tests pour les personnels et pour les élèves des lycées et l’amplification du dispositif de tests salivaires dans les écoles primaires. Castex a expliqué avoir commandé 64 millions de d’auto-tests qui seront répartis sur le territoire, notamment à destination des lycées, où tous les élèves seront testés une fois par semaine. Les enseignants devraient, eux, en recevoir deux par semaine.

Or, si dans les annonces, les ministres sont restés très évasifs sur la mise en place d’un tel dispositif, France Inter relate qu’un membre de l’exécutif expliquait suite au conseil des ministres de mercredi : « On ne peut pas les [les élèves] laisser se débrouiller seul chez eux. Il faut qu’ils soient accompagnés... ». Jusque là, on ne peut être que d’accord. Mais voilà la proposition du gouvernement qui arrive à la suite : « ...les professeurs volontaires seront formés pour superviser ces tests ». Une fois de plus, la solution du gouvernement est de faire reposer la gestion de la crise sanitaire sur le dos des profs, leur faisant porter la responsabilité de la gestion de la crise sanitaire dans leurs établissements sans leur donner les moyens de le faire correctement. Rien de surprenant, dans la mesure où Blanquer n’a fait que poursuivre et approfondir la politique de multiplication des tâches des enseignant.e.s et personnels de l’EN, déjà sur-sollicités, et qui ont vu leurs conditions de travail se dégrader encore avec la crise sanitaire .

C’est en toute tranquillité que le gouvernement envisage donc d’obliger les enseignant.e.s à s’improviser infirmiers scolaires. Ils devront sans doute apprendre aux élèves à s’auto-tester, vérifier le bon déroulement de l’opération et sans doute aussi faire remonter les résultats. Sans aucune honte, le gouvernement défend en ces termes -repris toujours par France Inter- le dispositif : « Mais c’est la seule solution, nous n’avons pas suffisamment d’infirmières scolaires pour faire ça, et on ne va pas créer 500.000 postes demain ». Mais de qui se moque ce ministre lorsqu’il dit ça ? Non seulement la situation actuelle, où il n’y a qu’ une infirmière pour plus de 800 élèves dans le meilleur des cas, est loin d’être nouvelle, mais en plus le gouvernement a activement participé à détruire des postes, notamment en 2018 lorsque Blanquer annonçait la suppression de 400 postes administratifs ; qui correspondent entre autre aux infirmières scolaires. Alors que la crise sanitaire a débuté il y a maintenant plus d’un an, il aurait parfaitement été possible de faire face autrement à la circulation du Covid. Ce que confirme la phrase du ministre, c’est justement que le gouvernement ne veut pas mettre le moindre centime dans l’éducation et plus largement dans les services publics, même au prix de la santé des personnels, des élèves et de leurs familles !

Autre nouvelle "concession" du gouvernement face à la réalité de la crise sanitaire, la reprise dans les collèges et lycées, qui s’effectuera bien à partir du 3 mai, pourra se faire en demi-jauge dans les lycées qui le souhaiterons - retour, en somme, à la case novembre - et, dans les 15 départements les plus touchés, pour les des élèves de 3ème et des 4ème . Pour les maternelles, primaires, 6e et 5e, c’est donc le retour partout en classe entière. Et pour cause : dédoubler les petites classes, c’est soit empêcher les parents d’élèves d’aller au travail une partie de leur semaine, et donc mettre en danger "l’économie", soit embaucher du personnel supplémentaire pour permettre l’accueil de tous. Deux solutions inenvisageables pour le gouvernement, qui n’a aucun problème pour trouver les fonds lorsqu’il s’agit de soutenir le grand patronat, mais qui se refuse à tout investissement dans les services publics. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que la principale préoccupation de Castex ce mercredi en conseil des ministres ait été, comme le relate encore une fois France Inter, que ce ne soit «  pas facile de faire coopérer les profs  ».

Il y a en effet de quoi s’inquiéter de la colère des profs… Depuis des mois, les personnels de l’Education Nationale doivent bricoler dans leurs établissements pour affronter le Covid, confrontés à des protocoles ubuesques et inapplicables, qui n’ont pour objectif que de masquer le refus du gouvernement de faire quoi que ce soit qui coûterait un centime pour gérer la pandémie dans les établissements scolaires. Ils sont aussi confrontés au mépris total de l’institution, qui ne cesse les mensonges - comme dans le cas de la supposée cyberattaque des services du CNED - et les fanfaronnades. Après l’ouverture des fenêtre par 0 degrés et le sport uniquement en extérieur, Blanquer se réjouissait ainsi dans son intervention du retour du soleil. Le même ministre va se faire vacciner sous peu, alors même que la vaccination promise est sans cesse repoussée pour les enseignant.e.s. Comme dans le reste de la population, les moins de 55 ans n’ont toujours pas accès au vaccin, pas même les enseignant.e.s de maternelle qui, dès lundi, se retrouveront face à des classes sans masque 

Plus que jamais, alors que l’épidémie est entrain d’atteindre un nouveau pic avec plus de 100 000 morts, il est nécessaire que les enseignants, les parents d’élèves et les élèves décident des conditions dans lesquelles il sera possible de revenir sur les bancs de l’école. A rebours de la logique qui consiste à faire des profs des infirmiers scolaires, il faut exiger des moyens supplémentaires pour le service public et des embauches non seulement d’enseignants mais également pour les personnels administratifs et de santé à l’école, comme en dehors. De même, il serait temps de mettre en place une stratégie de vaccination efficace, notamment à destination des enseignants, quelque soit leur âge. Pour que les écoles ne deviennent pas des clusters, et que les élèves puissent, en pandémie comme en dehors, être tous accueillis dans des conditions dignes, il est nécessaire de réquisitionner des locaux, mais aussi de cesser de prétendre à une année scolaire "normale" pour penser les adaptations nécessaires de l’enseignement en situation de pandémie.

 
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