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La Izquierda Diario
21 de avril de 2021 Twitter Faceboock

Scénario catastrophe
Après le variant brésilien, le variant indien. A quand la levée des brevets ?
Pepe Balanyà

L’Inde est le plus grand fabricant de vaccins au monde mais ces capacités sont sous-utilisées à cause des droits de propriété intellectuelle sur le vaccin. Malgré la situation sanitaire catastrophique que traverse l’Inde, les principaux pays impérialistes comme le Royaume-Uni, les États-Unis et les pays de l’Union Européenne continuent à s’opposer à la levée des brevets.

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Crédit photo : ARUN SANKAR / AFP

Début décembre 2020 la revue médicale The Lancet avertissait des risques sanitaires mondiaux liés au fait que la fabrication du vaccin soit concentrée dans les mains d’un petit nombre de titulaires de brevets : « les pays riches bénéficieront des nouvelles technologies [et des vaccins] lorsqu’elles arriveront sur le marché, tandis que les pays pauvres continueront d’être dévastés par la pandémie. ». La mise en œuvre de la campagne de vaccination, guidée par la concurrence économique entre puissances et les intérêts des grands groupes pharmaceutiques a confirmé ce scenario. Aujourd’hui, comme le rapportait l’OMS, parmi les quelques 200 millions de vaccins administrés au niveau mondial, 75% l’ont été dans 10 pays. D’un autre côté, 130 pays, où vivent plus de 2,5 milliards de personnes, n’ont pas reçu un seul vaccin.

La contradiction entre la logique du profit et la résolution de la pandémie va si loin que les grands laboratoires refusent de partager les brevets au détriment des capacités de production du vaccin ce qui met en danger la vie de milliers de personnes dans les pays dépendants et sous domination impérialiste et compromet la situation sanitaire mondiale. En effet, la semaine dernière nous expliquions dans nos colonnes, que l’émergence du variant brésilien, liée à l’absence d’une politique sanitaire conséquente de prévention et à la privation d’accès au vaccin, risquait d’aggraver la crise sanitaire. Aujourd’hui, c’est au tour du variant indien de susciter l’inquiétude internationale.

Variant indien : le résultat de la politique d’apartheid vaccinale des pays impérialistes

Avec plus de 160.000 cas quotidiens, l’Inde est devenu le deuxième pays le plus touché par le Covid19, derrière les Etats-Unis, et en conséquence un « laboratoire à variants ». Mais les causes de cette flambée ne sont pas inconnues et sont directement liées à la dépendance économique de l’Inde vis-à-vis des puissances occidentales et à sa place dans le capitalisme mondial comme manne de main d’œuvre bon marché. Ainsi avec 90% des travailleurs dans le secteur informel selon la Banque Mondiale Blogs, les mesures de confinement et de couvre-feu ne sont réalisables que pour une très petite minorité de la population indienne. De plus, de cette place sur l’échiquier capitaliste mondial, nait une réalité éminemment paradoxale, ainsi le taux de vaccination (au moins une dose) n’atteint que le 6’5% de la population, alors que l’Inde est le plus grand fabricant de vaccins au monde.

En effet le Serum Institute of India (SII) est le plus grand fabricant de vaccins au monde en volume. Le laboratoire produisait déjà 1,5 milliard de doses par an avant la pandémie de Covid-19. Au total l’Inde fabrique 62 % des vaccins de la planète et fournit 70 % des vaccins essentiels à l’OMS. Cependant ses capacités, comme celles d’autres pays dépendants économiquement, comme le Pakistan ou le Brésil, sont aujourd’hui sous-utilisées à cause des brevets qui existent sur les vaccins. Comme l’explique Raquel Gonzalez, responsable des relations extérieures de l’organisation Médecins sans frontières (MSF) à la BBC : « Pour que les laboratoires des pays à revenu faible ou intermédiaire puissent produire des vaccins contre le Covid, ils ont besoin d’un savoir-faire technique, qui est souvent conservé comme un secret commercial par les sociétés pharmaceutiques, et d’un accès aux informations sur la sécurité, qui sont souvent protégées comme des données confidentielles par la société qui détient le brevet ».

En octobre 2020, l’Inde et l’Afrique du Sud avaient déjà demandé à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de suspendre les droits de propriété intellectuelle liés au COVID-19 afin que les vaccins covid-19 puissent être produits en masse et à un prix abordable. Cette levée des droits comme l’explique Yuanqiong Hu, conseiller juridique et politique MSF « permettrait également aux non-titulaires de brevets de produire plus facilement l’équipement médical nécessaire comme des ventilateurs, des masques et des équipements de protection ». Cependant les principaux pays impérialistes comme le Royaume-Uni, les États-Unis et les pays de l’Union Européenne avaient refusé sous prétexte que « les brevets encouragent la recherche et le développement des médicaments. ». Mais la raison est autre. Le brevet permet surtout d’avoir la main sur la technologie, la production, le prix et de se faire une place dans un marché fortement concurrentiel et aux profits faramineux.

Fonds publics, profits privés : il nous faut la levée immédiate des brevets !

Tel qu’on peut le lire dans l’article de la BBC, « un rapport publié en février dans la revue médicale The Lancet montre que les producteurs de vaccins ont reçu quelque 10 milliards de dollars de fonds publics et à but non lucratif pour financer leurs vaccins. Et ce chiffre, selon le rapport, est peut-être sous-estimé car une grande partie des données sur ces projets n’est pas publique. Mais il indique que les cinq plus grandes sociétés pharmaceutiques ont reçu chacune entre 957 millions et 2,1 milliards de dollars ». Les même États qui se sont opposée à la levée des brevets ont accordé des aides financières publiques aux grands laboratoires en échange de contrats leur donnant la primauté sur les doses produites. L’enjeu était double : placer les champions pharmaceutiques nationaux à la tête de la course pour le marché mondial et en même temps immuniser sa population le plus vite possible pour relancer son économie et ainsi gagner un avantage par rapport aux capitalistes des autres pays. Une réponse nationaliste qui va entièrement à l’encontre de la réponse mondiale et internationaliste nécessaire pour affronter la pandémie.

L’émergence de nouveaux variants dresse la possibilité d’un scénario catastrophe à l’échelle mondiale et des milliers de morts pourraient être évités avec une campagne de vaccination efficace, mais la gestion capitaliste de la crise sanitaire nous plonge dans une impasse. Comme nous l’écrivions dans un article précédent , pour dépasser cette situation et ne plus laisser les commandes de la résolution de la crise à une minorité qui ne pense qu’à ses profits : «  Il est urgent que nous opposions à la gestion autoritaire et capitaliste de la crise sanitaire, une gestion démocratique par la population. Il est urgent d’investir massivement dans les hôpitaux et les structures de santé afin d’augmenter le nombre de lit en réanimation . Exigeons la levée immédiate des brevets sur les vaccins ainsi que la réquisition immédiate de l’appareil de production, ça n’est que sous contrôle des travailleurs et travailleuses que nous pourrons mener à bien une stratégie de vaccination massive ! ».

 
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