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La Izquierda Diario
6 de avril de 2021 Twitter Faceboock

Anniversaire
Quand le manifeste des 343 secouait la France
Andrea D’Atri

La déclaration publiée le 5 avril 1971 dans le magazine Le Nouvel Observateur et signée par 343 femmes, demandait la légalisation de l’avortement en France.

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La couverture du magazine affichait la "liste des 343 femmes françaises qui ont eu le courage de signer le manifeste ’J’ai avorté’". L’idée était venue d’une journaliste du magazine, Nicole Muchnik, qui pensait que si les femmes qui avaient avorté le disaient publiquement, cela aurait un grand impact sur la lutte pour la légalisation de l’avortement en France. Elle a contacté l’une des fondatrices du Mouvement de libération des femmes (MLF) qui, à son tour, en a parlé à la philosophe et écrivaine Simone De Beauvoir.

En plus de l’auteur du Deuxième Sexe, des écrivains comme Marguerite Duras, des actrices comme Catherine Deneuve et Jeanne Moreau, des cinéastes comme Agnès Varda, entre autres personnalités, se sont joints à l’événement. Sa publication a permis à 55% de la population française de soutenir la légalisation de l’avortement qui, après plusieurs manifestations, a été promulguée en 1975.

 

" Un million de femmes avortent chaque année en France. (...). Je déclare que je suis l’une d’entre elles. Je déclare que j’ai avorté"

Les 343 femmes qui ont signé cette déclaration ont utilisé leur reconnaissance publique, leur notoriété et le respect dont elles jouissaient dans leur domaine d’activité, pour défier l’État français qui pénalisait les femmes ayant avorté par la prison.

Le magazine satirique Charlie Hebdo qui, une semaine plus tard, a fait une couverture se moquant de l’hypocrisie des hommes politiques français dans laquelle on pouvait lire "Qui a engrossé les 343 salopes ?", un mot qui, renvoit à une femme impudique, une putain ou une catin, qui sont les insultes que la droite a lancées contre les féministes.

Couverture du magazine satirique Charlie Hebdo, qui lui a donné le nom sous lequel le manifeste "J’ai avorté" a fini par être connu.

En 1972, l’avocate Gisèle Halimi - française d’origine tunisienne - a défendu une jeune fille de 16 ans qui avait avorté après avoir été violée par son petit ami, et sa mère, accusée de l’avoir aidée. Le plaidoyer de l’avocat dans le célèbre procès de Bobigny, a abouti à l’acquittement de la jeune Marie-Claire Chevallier, et a constitué un autre précédent fondamental pour la loi qui a finalement été promulguée trois ans plus tard.

Gisèle Halimi et Simone de Beauvoir à l’Assemblée nationale française lors du débat sur l’avortement en 1974.

  Pour lire le texte intégral du Manifeste des 343 canailles, cliquez ici.

Cinquante ans se sont écoulés depuis le défi lancé par les femmes à un État impérialiste qui était furieux contre celles qui décidaient de leur corps, mais surtout contre les femmes les plus pauvres. Des femmes professionnelles, célèbres et respectées pour leur travail, ont mis ces (leurs) avantages au service d’une cause qui ne permettrait plus jamais à une pauvre femme d’aller en prison pour avoir avorté.

Que se passe-t-il aujourd’hui, alors que nous avons déjà obtenu nos droits dans des démocraties qui ne justifient plus juridiquement l’inégalité entre les hommes et les femmes ? Comment cette inégalité entre les femmes et les hommes continue-t-elle à se reproduire, alors même que la justice est censée les sanctionner, et que les lois la dissolvent apparemment et que le discours public la répudie apparemment ?

Pendant que la société nous répète que ça suffit, que les femmes et les hommes ont les mêmes droits et les mêmes possibilités, qu’il n’y a pas de quoi se plaindre et qu’il s’agit seulement de "s’autonomiser". Les femmes continuent d’être victimes de féminicides, continuent d’être les plus surreprésentées dans les emplois les plus précaires et avec les plus mauvais salaires et sont encore la majorité parmi les plus pauvres, sans travail, sans logement.

La société capitaliste, dans laquelle une poignée de parasites s’assoit sur une montagne de richesses extraites du travail de millions d’êtres humains, donne un visage féminin à la pauvreté, la précarité, le chômage, l’analphabétisme et la violence sexiste. Nous continuons à lutter contre cela, même lorsque les messages grand public nous bombardent de femmes triomphantes qui ont réussi à percer parce qu’il n’y a plus d’obstacle à la réussite.

 
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