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Asie

« Xinjiang Police Files » : de nouveaux documents confirment l’horreur des camps de Ouïghours

Des documents de la police chinoise, révélés par plusieurs journaux, viennent confirmer l'horreur des camps d'enfermement au Xinjiang, dans lesquels le peuple ouïghour subit tortures et travail forcé depuis des années.

Elora Lmr

24 mai 2022

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Crédits photo : TIMOTHY A. CLARY / AFP

Une fuite récente d’un dossier de la police du Xinjiang confirme à nouveau l’ampleur de la répression contre les Ouïgours. Musulmans et turcophones, les Ouïghours sont le principal groupe ethnique du Xinjiang, une région de l’Ouest de la Chine. Depuis plusieurs années, les rapports, études et articles de presse se multiplient, attestant l’existence de camps d’enfermement au Xinjiang, qualifiés de camps « d’éducation » par le gouvernement chinois. En réalité, ces camps sont le théâtre non seulement d’humiliations, de travail forcé et de torture des détenus, mais également de viols, de stérilisations et d’avortement forcés. Mais ils s’attèlent également à vouloir éradiquer toute trace de la culture ouïghoure au sein du pays. Dans ces camps, tout serait mis en place pour appliquer une idéologie forcée, afin que les Ouïgours « oublient leurs religion et leurs culture et qu’ils deviennent patriotes »

La Chine affirme que ces camps visent à former la population Ouïgours pour leur faciliter l’accès à l’emploi, mais en réalité, entre 500 000 et 1 millions de Ouïgours seraient enfermés dans ces camps pour former une main-d’œuvre nombreuse et gratuite. En mars 2020, l’Institut australien de stratégie politique (ASPI) avait estimé dans un rapport que des dizaines de milliers de Ouïgours travaillaient dans des usines et fournissaient 83 marques telles que Apple, Sony, Adidas, Nike ou BMW.

La région du Xinjiang représente également un grand intérêt pour la Chine. En effet, elle est la première province productrice de coton dans le pays, avec environ la moitié de la production chinoise de coton. Elle assure également 28% des réserves de gaz naturel de la Chine et 40% des réserves de charbons. En somme, pour garder main mise sur ce territoire, Pékin doit maintenir sa domination sur la population y habitant, quitte à réprimer et à mater les possibles révoltes et à enfermer les ethnies entières.

Or, une nouvelle enquête, menée par l’universitaire allemand Adrian Zenz, et notamment publiée dans « Le Monde », a révélé des documents de la police de Xinjiang montrant l’obsession sécuritaire de Pékin autour de ces camps d’internement et confirmant l’horreur et le caractère répressif de ces camps.

Un lot piraté de quelque 100 000 documents de police, dont une grande part sont consacrés à la « transformation éducative » des Ouighours, a été envoyé au chercheur anthropologue allemand. Ces documents apportent un nouvel éclairage sur la répression organisée par Pékin dans la région, et notamment une description détaillée de l’intérieur de « l’organisation armée et coercitive des nouveaux camps dits de « formation professionnelle », ainsi que le déploiement des forces de police sur le terrain. » Les fichiers montrent qu’entre « 12,1% et 12,5% des adultes des minorités ethniques subissent en 2018 une forme d’internement, en rééducation, en détention ou en prison ». Ce taux de détention considérable est 64x plus élevé que le taux d’emprisonnement national de Chine, tel qu’il est donné en 2021 dans les données pénitentiaires pour l’Asie.

Pour la première fois, 5000 photos de Ouïgours fichés sont publiées. Âgés de 3 à 94 ans, ce sont pour beaucoup des paysans, prises au poste de police ou au centre de rééducation entre janvier et juillet 2018. Parmi ces 5000 personnes, « 2 884 internés ont pu être authentifiés avec certitude. ». Le 15 juin 2018, le secrétaire du parti pour le Xinjiang tient un discours glaçant face à ses cadres sur « la sécurité absolue des prisons, centres de détention et centre de formation professionnelle ». Il avait déjà ordonné à ce titre en 2017 de tuer quiconque tenterait de s’échapper ou de se rebeller.

Les « étudiants » , comme sont nommés les détenus de ces camps dans ces documents, n’ont pas une seconde de répit, puisqu’ils sont accompagnés en permanence de gardes qui, selon les documents, ont pour tâche de « s’assurer de la sécurité des étudiants entre les classes, converser avec eux en faisant preuve de psychologie, surveiller leur hygiène personnelle (douche, coupe des cheveux, rasages), faire des rondes, surveiller les chambres et les couloirs, assister les enseignants dans leurs travail, assister les responsables d’étages, assister le personnel lors des visites médicales et des prélèvement biologiques… » Les centres possèdent une unité policière par étage, pour des bâtiments de quatre étages, mélangeant minorités ethniques avec des Han, même si seuls les Han sont autorisés à porter des armes à feu.

Parmi les fichiers piratés, de nombreux PowerPoint détaillent des tactiques policières allant de l’utilisation de menottes jusqu’à la façon de prendre des photos d’identité en plaçant le prisonnier et le matériel au centimètre près. Des fiches d’entrainement ont également été retrouvées, et les exercices se terminent toujours par la mort des assaillants. La surveillance est sans relâche. Le fait de stocker des livres religieux ou de se livrer à des rituels religieux est également condamné par un mois d’isolement, voire deux si c’est un cas de récidive. Des familles entières sont enfermées. Sous prétexte que si l’un des membres de la famille est considéré comme « dangereux » pour la société, alors la famille est également immédiatement suspectée, voire enfermée.

Le peuple Ouïgours reste majoritaire dans la région du Xinjiang, et celle-ci, malgré le fait qu’elle fasse partie des cinq régions autonomes de la République Populaire de Chine, est réticente à la tutelle de Pékin. Face à la répression terrible exercée par le gouvernement chinois envers le peuple ouïghour, et alors que les puissances impérialistes affichent un soutien hypocrite envers ce dernier quand dans le même temps, les grandes entreprises occidentales profitent grassement de la main-d’oeuvre ouïghoure, il est impérieux de défendre son droit à l’autodétermination et que les travailleur.euses et la jeunesse du monde entier s’en solidarisent.


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