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Extrême-droite

Vidéo menaçant LFI : derrière la condamnation, Zemmour appelle à la dissolution des antifas

Dans un communiqué publié sur son compte Twitter, Eric Zemmour a déclaré se désolidariser de ses sympathisants ayant mis en scène le meurtre de membres de La France Insoumise, appelant au meurtre des arabes. Par cette manœuvre, le candidat, en quête de présidentialisation, cherche à déplacer la cible vers les antifas et le mouvement social.

Ariane Anemoyannis

28 décembre 2021

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Crédit photo : Thomas Coex /AFP

Le candidat d’extrême-droite à la présidentielle, officiellement déclaré depuis début décembre, a publié sur Twitter ce jeudi un communiqué dénonçant la vidéo de deux de ses sympathisants ayant mis en scène à l’aide de fusils le meurtre de membres de La France Insoumise : « Ben voyons les amis, on va éclater qui, là ? Du jeune gaucho, du jeune communiste, du jeune bougnoule mental » pouvait-on entendre dans la vidéo.

« Combien sont-ils ? Deux ? Trois ? Une misérable poignée ? » fustige Zemmour, prompt à se désolidariser et à minimiser les secteurs les plus radicalisés de sa base. C’est le fait de quelques « idiots qui prétendent se prévaloir de moi et de ma candidature », continue-t-il. « Vous ne faites partie ni de mes sympathisants, ni de mes militants, et encore moins de mes amis. Je condamne par avance tout ce que vous ferez en mon nom pendant ma campagne. Je ne veux ni de votre soutien ni de votre aide » a-t-il poursuivi.

Quelques jours plus tôt, dans la nuit de mardi à mercredi, c’est l’ex-finaliste de la primaire EELV qui faisait l’objet d’intimidations de la part de sympathisants du candidat, ayant été jusqu’à tambouriner à la porte de son domicile. Le jeudi, des militants pro-Zemmour ont taggué des injures visant Marine Le Pen avec un message pro-Zemmour « Z 2022 » sur une voiture devant le domicile de la candidate d’extrême droite.

Cette accumulation d’action (menaces de morts, intimidations et provocations) visant les candidats et figures publiques de partis se présentant à la présidentielles font tache pour le candidat Eric Zemmour dont la campagne s’inscrit à l’heure actuelle dans une phase de présidentialisation. Après avoir encouragé sa base à se radicaliser comme en témoignent les appels à la haine raciste permanente ou plus récemment les remerciements de son service d’ordre aux agresseurs de militants de SOS racismes, il s’agit désormais de fixer une limite à ses sympathisants, dont les actions pourraient s’avérer contreproductives dans la phase à venir de la campagne. Une limite toute relative cependant, dès lors qu’elle chercher à cibler désormais les antifas, et en définitive vers le mouvement social.

Cette quête de présidentiabilité d’Eric Zemmour, au titre de laquelle il s’est désolidarisé de ses sympathisants ayant appelé aux violences contre des figures de LFI, est une manœuvre visant à retourner l’accusation des violences en direction de l’extrême-gauche tout en repartant à l’offensive contre les antifas et le mouvement social. En ce sens, Zemmour interpelle Macron qu’il enjoint à dissoudre les antifas pour démontrer sa faiblesse sur le terrain régalien, et dialoguer avec les secteurs de la base de LR qui seraient en recherche d’une candidature qui maintiendrait réellement l’ordre.

Zemmour cherche ainsi à résoudre une contradiction dans une sorte de nouvel « en même temps » qui vise d’un côté à concilier le caractère violent et radicalisé d’une partie de son noyau militant et électoral avec un enjeu de respectabilité pour se faire une place dans le jeu institutionnel. Une contradiction que Luc Bronner détaille dans les colonnes du Monde : « Mais comment Zemmour pourra-t-il élargir son électorat et espérer figurer dans la course au second tour de la présidentielle sans perdre cette base qui l’acclame d’abord pour sa radicalité et sa constance ? L’exercice sera difficile tant ses militants, en particulier les jeunes, défendent une ligne extrême, citant souvent, notamment, la théorie raciste du « grand remplacement ».

En effet, Eric Zemmour participe à structurer les réseaux d’extrême-droite les plus radicalisés. En novembre, l’ex porte-parole de Génération identitaire à Marseille avait exprimé son soutien au candidat tout comme Thaïs d’Escufon qui estimait que Marine Le Pen « a adouci son discours mais cette stratégie ne marche pas ». Dans le même sens, c’est le Youtubeur d’ultra-droite Papacito qui a récemment déclaré qu’Eric Zemmour était « une bouffée d’oxygène énorme », ou encore l’ex-directeur de la jeunesse du Front National Julien Rochedy, qui le soutiennent.

Et loin de vouloir apaiser ses troupes, Eric Zemmour est davantage prompt à les gargariser. Au lendemain des violences du meeting de Villepinte à l’encontre des militants de SOS Racisme, il avait déclaré sur RMC ne pas vouloir « calmer les ardeurs de [ses] supporteurs ». De la même manière, le candidat ne s’était pas prononcé sur l’action de vandalisme homophobe de la part des Zouave (groupuscule d’extrême-droite que la sécurité du meeting du 5 décembre avait remercié d’avoir tabassé des militants antiracistes) consistant à briser les vitres des kiosques à journaux pour y enlever les unes de Têtu sur lesquelles figuraient la figure LGBTI+ Bilal Hassani. Ainsi, loin d’un changement de stratégie à l’égard de ses sympathisants radicalisés, Eric Zemmour semble davantage modifier sa tactique en circonscrivant ce qui est acceptable – et ce qui lui sert dans la phase actuelle - et ce qui ne l’est pas.

Reculer pour mieux sauter : Eric Zemmour à l’offensive contre les antifa

Ce que dit dénoncer Eric Zemmour dans son communiqué, ce sont les auteurs de la vidéo qui sont ses sympathisants dont il cherche à se délimiter. Pour autant, il s’est empressé de renvoyer dos à dos les quelques « idiots » le soutenant et les « milliers » d’antifa « organisés pour manifester, frapper, et casser partout en France » qu’il faudrait qu’Alexis Corbière et Raquel Guarrido – les mêmes militants menacés par ses sympathisants – dénoncent et condamnent. Il s’agit en l’occurrence de retourner l’accusation de violence dont ils seraient en dernière instance responsables.

L’objectif du communiqué n’est pas donc pas tant d’isoler un certain secteur radicalisé de son électorat que de l’orienter vers une cible moins délicate que ne l’incarnent les élus de La France Insoumise et contre qui les attaques n’auront été ni plus ni moins qu’un bad buzz. En effet, en appelant à la dissolution des organisations antifa, Eric Zemmour apparait finalement à l’offensive contre les mobilisations antiracistes et féministes et met à l’amende le gouvernement qui n’a pas – encore – passé le pas de la dissolution des groupes antifas.

Par ce communiqué, Eric Zemmour recule finalement pour mieux sauter et incarner avec davantage de force l’aile la plus offensive contre le mouvement social et les organisations antifascistes. Tout en donnant quelques gages de respectabilité à la classe politique, nécessaires pour s’affirmer dans le jeu institutionnel, l’objectif du candidat n’a pas changé, il s’agit de guider et structurer son aile radicalisée.

Face à ces attaques, c’est de façon unitaire et dans la rue qu’il faut riposter pour défendre l’intégrité de l’ensemble des militants menacés par Zemmour et ses soutiens !


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