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Chine

Une enquête de la BBC révèle les horreurs subies par les Ouïghours

Ce mardi, la BBC a publié une enquête sur le massacre des Ouïghours perpétré par l’État chinois. Au cœur du rapport, l’horreur de la détention des femmes ouïghoures, victimes de viols systématiques, collectifs, de stérilisations forcées et de torture.

Olive Ruton

3 mars 2021

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Le génocide perpétré contre les Ouïghours - principal groupe ethnique, turcophone et musulman, de la région du Xinjiang - par l’État chinois a depuis quelques mois fait grand bruit à l’échelle internationale. Une tribune était parue, regroupant les voix de nombreuses personnalités et intellectuels, déclarant notamment que « la région autonome du Xinjiang’ est devenue l’autre nom de la négation de l’humanité de l’homme ». Ce mardi, un rapport d’enquête de la BBC rend publics des témoignages d’ex-détenues ou travailleurs des camps de rétention, qui décrivent les horreurs subies dans ces camps, concernant les sévices sexuels et viols systématiques sur les femmes en particulier.

Des ex-détenues témoignent des atrocités subies et des violences sexuelles extrêmes

Au centre du rapport de la BBC, des témoignages de femmes, ex-détenues ou employées de force dans les camps, qui décrivent l’horreur des violences sexuelles qu’elles ont subi ou auxquelles elles ont assisté. Viols collectifs par des officiers de police chinois, parfois avec des battons électriques, morsures, tortures, autant de sévices corporels perpétrés tous les soirs et sur l’ensemble des prisonnières du camp, c’est ce que plusieurs anciens détenus et un gardien disent avoir vu ou subi.

Source principale de cette enquête, Tursunay Ziawudun, a été prisonnière de l’un de ces camps d’internement pendant neuf mois. Elle témoigne avoir subi des tortures et viols, à trois reprises, toujours entre deux et trois hommes, dont une fois à l’aide un bâton électrique : « Ils avaient un bâton électrique, je ne savais pas ce que c’était, et il a été poussé à l’intérieur de mon appareil génital, me torturant avec un choc électrique ». Sedik, professeure de chinois forcée de travailler à l’endoctrinement des ouïghours, rapporte elle aussi des viols collectifs, institués dans le camp. L’institutionnalisation de pratiques, de laquelle elle a été témoin, lui a été confirmée par une policière sur place en ces mots : « Oui, le viol est devenu une culture. C’est un viol collectif et la police chinoise non seulement les viole mais aussi les électrocute. »

Parmi ces violences sexuelles, Tursunay Ziawudun et d’autres ex-détenues confirment les poses de stérilet ou les stérilisations forcées subies par un grand nombre de femmes ouïghoures, qui avaient déjà secoué la presse internationale, bien que le gouvernement chinois ait répondu à la BBC que ces allégations étaient « totalement infondées ».

Le traitement et la traque des journalistes, notamment étrangers, par les autorités chinoises dans la région rend impossibles la vérification des différents témoignages et des enquêtes sur le terrain. L’État chinois s’appuie ainsi sur cet étouffement quasi-total des informations pour nier en bloc, et maintenir son discours de centres d’éducation dans la région. Néanmoins, un certain nombre d’éléments autorisent à croire ces paroles de ceux qui ont été détenus dans ces camps, que ce soit la concordance des témoignages ou la correspondance entre les descriptions des lieux, de l’organisation des camps de détention avec les images satellites auxquelles a accès la BBC.

« Leur objectif est de détruire tout le monde. Et tout le monde le sait »

C’est cette citation de Ziawudun qui fait le titre de l’enquête de la BBC titre son enquête, et résume l’entreprise génocidaire de l’État chinois et de sa police, qui ne cesse de prendre de l’ampleur, à l’image de l’agrandissement des camps de détention et de la croissance du nombre de détenus qui s’élèverait aujourd’hui à plus d’un million.

C’est ainsi que les autorités chinoises développent leur politique d’assimilation forcée du groupe ethnique majoritaire dans la région du Xinjiang, et dont la majorité est hostile à la tutelle de Pékin, comme nous l’expliquions dans un précédent article. Or, pour l’État chinois, il s’agit de soumettre totalement - en leur faisant oublier leur religion, leur culture et leur langue – cette population qui constitue pour lui la clef d’intérêts économiques importants. En effet, des milliers de ouïghours sont exploités dans des usines de plus de 80 grandes marques parmi lesquelles Apple, Sony, Adidas ou Nike par exemple, des chiffres auxquels s’ajoutent la position du Xinjiang comme première région cotonnière de Chine, sa production pétrolière ou encore ses réserves de gaz et de charbon.

L’étendue des tortures infligées à la population ouïghoure répond donc à celle des intérêts qu’elle représente pour Pékin. Ainsi sont déployés tous les moyens les plus atroces pour la soumettre, des viols systématiques, aux tortures répétées en passant par la stérilisation forcée et un « lavage de cerveau » violent pour faire renoncer les Ouïghours à l’entièreté de leur culture et de leur identité. Dans ce but, tous les prisonniers sont les objets d’un endoctrinement quotidien où l’apprentissage de discours de Xi Jinping, des chansons à la gloire de l’État chinois, l’apprentissage du mandarin, sont évalués au quotidien et violemment sanctionnés (parfois par la privation de nourriture) pour ceux qui ne progressent pas assez vite. Une entreprise de destruction psychologique, physique et culturelle, de laquelle seuls ceux qui arrivent à un état de total anéantissement, complètement détruits, sortent d’après Ziawudun : « Ils disent que les gens sont libérés, mais à mon avis, tous ceux qui quittent les camps ont fini. »

Les informations commencent malgré les efforts de Pékin à percer, avec de plus en plus de puissance et soulèvent de plus en plus de colère, la scène mondiale. Répondant à cette vague d’indignation et de soutien populaire au peuple ouïghour, nombre de puissances internationales condamnent fermement l’État chinois. C’est ainsi ce qu’à fait lu gouvernement américain, qui a qualifié cette politique de génocide à travers le secrétaire d’État Mike Pompeo le mois dernier. Argument dans la guerre commerciale qui oppose les États-Unis à la Chine, ou encore condamnation factice quand les grandes entreprises occidentales profitent grassement de la main d’œuvre de la région, aucune confiance n’est à donner aux grandes puissances impérialistes qui ne représentent en rien des alliés pour le peuple ouïghour.


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