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200 arrestations et l’armée dans les rues

Tunisie : deuxième jour de révolte contre les mesures austéritaires du gouvernement

Sept ans après la révolution, la Tunisie connaît une nouvelle poussée de fièvre sociale une semaine seulement après le soulèvement en Iran. Après une première nuit d’affrontement avec les forces de répression et la mort d’un manifestant dans la nuit de lundi à mardi, les travailleurs, la jeunesse et les classes populaires tunisiens se sont levés une seconde fois contre les mesures austéritaires du gouvernement.

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Crédits photos : Sofiene Hamdaoui / AFP

La hausse des prix due à une augmentation de la TVA en Tunisie ne passe pas. Les mesures d’austérité que le gouvernement a prise le premier janvier dans son budget afin de répondre à la baisse de fréquentation touristique, à l’inflation et au recul des investissements étrangers ont déclenché la colère des secteurs les plus précaires de la population tunisienne, en particulier dans la jeunesse et dans les villes situées dans les terres, traditionnellement plus pauvres.

Dans la nuit de lundi à mardi, une première vague d’affrontement entre les manifestants qui s’opposent au gouvernement et à ses réformes avait déjà fait un mort en marge des rassemblements dans la ville de Tebourba, à l’ouest de Tunis. L’enterrement de l’homme mort lors de la première journée de contestation mardi après-midi a mis des centaines de jeunes dans la rue, décidés à ne pas laisser faire le gouvernement.

La réponse des autorités, qui essaient tant bien que mal de criminaliser le mouvement de protestation en le faisant passer pour un mouvement de casseurs, a été aussi brutale que les manifestants sont déterminés. Aux côtés de la police, l’armée à été mobilisée dans plusieurs villes. Résultat : plusieurs dizaines de personnes ont été blessés et plus de 200 manifestants ont été arrêtés par les forces de répression lors des affrontements qui se sont déroulés dans plusieurs villes du pays.

A Tunis, mais aussi à Meknassy, Sidi Bouzid, Kasserine, Gafsa ou encore à Tebourba, des manifestations pacifiques ont démarré le 8 janvier, notamment à l’appel de l’opposition coalisée au sein du Front Populaire. Etat d’urgence oblige, ces mouvements ont été massivement réprimés par les forces de l’ordre, à grands renforts de gaz lacrymogènes. Dans la nuit du 9 au 10 janvier, des agences, des magasins et des petits commerces ont été pillés à Tebourba comme à Tunis. Plusieurs postes de police ont été attaqués à Bouhsina et à Beja, tandis que deux synagogues brûlaient à Djerba. Le pays entier a été parcouru d’échauffourées, et la police tunisienne annonce compter 49 blessés dans ses rangs.

Au-delà des scènes de pillages qui ont eu lieu, le politologue Selim Kharrat estime que les manifestants veulent envoyer « un message politique de la part d’un pan de la population qui n’a plus rien à perdre et qui se sent ignoré  ». En effet, le gouvernement de Youssef Chahed tente de contenir une situation explosive et sur laquelle il a peu de prise. Coincé entre les islamistes d’Ennahda qui critiquent ceux qui «  fournissent une couverture politique justifiant les actes de violence et de vandalisme » et une opposition qui ne contrôle pas le mouvement tout en tentant de le pacifier, le gouvernement tunisien espère sortir la tête de l’eau par la répression.

Le feu continue de se propager, notamment grâce à l’appel aux rassemblements le 12 janvier lancé par le collectif « Fech Nestanaou » (Qu’attendons-nous ?). Ce groupe d’activistes semble solidement coordonné alors que plusieurs de ses membres ont été interpellés à travers le pays à cause de leurs tracts. L’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), centrale syndicale favorable au gouvernement Chahed, a même exprimé sa claire opposition à la loi de Finances. À leurs voix se joignent celles du parti Bani Watani ou encore du Courant Démocratique pour dénoncer l’incapacité et la corruption des dirigeants. Pour le fondateur de ce dernier, les jours du gouvernement sont comptés.

Depuis la chute de Ben Ali le 14 janvier 2011, rien n’a finalement changé du point de vue de la contestation sociale ; les revendications portent toujours sur l’emploi, et ainsi le niveau de développement des services publiques et de l’industrie, et plus largement sur la justice sociale et les libertés civiles. À sept ans de la révolution, la Tunisie et notamment les couches les plus précarisées de sa population mènent une lutte féroce qui si, elle parvient à faire reculer le gouvernement et ses lois d’austérités, pourrait avoir des conséquences sur l’ensemble des travailleurs de la région, notamment au Maghreb.


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