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Réforme des retraites

Toulouse. De premières rencontres interpro pour construire le 7 mars et ses suites

À Toulouse, après une première rencontre interprofessionnelle qui a réuni une cinquantaine de personnes, la coordination entre les différents secteurs se poursuit ce samedi pour préparer la journée de grève du 7 mars et ses suites, avec l’objectif d’imposer un durcissement de la grève.

Gabriella Manouchki

15 février 2023

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À l’issue de la journée de manifestation du samedi 11 février contre la réforme des retraites, ayant réuni 100 000 personnes dans les rues de Toulouse, une première rencontre interprofessionnelle impulsées par l’AG éducation s’est tenue au hangar de la Cépière.

Une cinquantaine de personnes ont pu échanger sur les dynamiques en cours dans différents secteurs, en particulier au niveau des transports, de l’aéronautique, de l’éducation ou encore des intermittents et précaires, mais aussi dans la jeunesse avec une délégation de l’AG étudiante du Mirail.

Alors que l’inter-syndicale menace de « bloquer le pays » à la rentrée, tout en limitant pour l’heure son appel à une journée de grève de 24h le 7 mars prochain, la discussion a confirmé qu’il existe du côté de la base des grévistes une volonté de durcir le mouvement.

Du côté de la jeunesse également, comme l’ont montré les grands cortèges inter-facs et lycées organisés dans les manifestations et le développement des AG qui ont réuni 500 personnes au Mirail, s’est exprimée la volonté de se lier au monde du travail pour préparer un mouvement plus dur à partir de la rentrée.

Les travailleurs présents pointaient en effet la nécessité de durcir la grève, en se saisissant de la fenêtre de tir ouverte avec la date du 7 mars et les appels nationaux de la CGT Cheminots et de Sud Rail, mais aussi de l’inter-syndicale RATP à Paris et du syndicat Solidaires au niveau confédéral, à entrer en grève reconductible à partir de cette date. En ce sens, la discussion a permis d’identifier deux principaux obstacles à l’extension du mouvement de grève au niveau local.

La nécessité de développer les assemblées générales dans tous les secteurs

D’abord, il a été souligné que l’une des principales limites réside dans le faible développement de l’auto-organisation de la grève : l’AG éducation est jusqu’ici le seul espace où il est possible pour la base des grévistes de s’organiser pour construire le mouvement, au-delà des dates isolées appelées par l’inter-syndicale. C’est ce qui a permis d’initier les rencontres interpro, mais aussi de nombreuses autres initiatives comme la soirée de soutien visant à remplir la caisse de grève des travailleurs de l’éducation ce samedi.

Du côté de la SNCF, des cheminot·es ont rapporté des difficultés à faire émerger de véritables assemblées générales, qui ne se limitent pas à un simple point d’information syndical mais qui permettent aux travailleurs syndiqués et non-syndiqués d’échanger et de délibérer sur les suites à donner au mouvement. Une situation qui tend à installer un rapport passif à la grève, alors même que l’envie de se battre semble largement partagée parmi les collègues.

Dans la plupart des secteurs, notamment dans l’aéronautique, il n’existe pas encore de dynamique d’auto-organisation. La construction de cadres interprofessionnels peut constituer un point d’appui face à ce problème, en permettant à des grévistes isolés de se réunir et de trouver un soutien pour construire des assemblées générales sur leur lieu de travail.

Mais cela pourrait aller plus loin : la discussion a mis en avant qu’à partir d’une AG interpro plus développée, il serait par exemple possible d’envoyer des délégations de grévistes des secteurs les plus organisés sur des lieux de travail de secteurs moins mobilisés, pour encourager les travailleurs à entrer dans la bataille tout en échangeant sur leurs expériences de grève, et notamment sur la question de l’auto-organisation. L’exemple de la grève de 1995 est très utile de ce point de vue pour penser la construction de l’interpro.

La nécessité d’un programme de revendications unificateur

Au regard de l’importance d’étendre et de durcir la grève, cette première rencontre a fait émerger la nécessité d’élargir les revendications du mouvement. De manière encore plus urgente pour les boîtes du privé qui entrent en période de NAO notamment dans l’aéronautique, il apparaît en effet central d’articuler la revendication du retrait de la réforme à celle des augmentations de salaires.

C’est ce qui permettrait d’étendre le mouvement du côté des salariés du privé, en évitant que s’installe une dichotomie entre la bataille pour les salaires qui se passerait uniquement sur le lieu de travail, et celle pour les retraites qui prendrait place dans le mouvement national - la première pouvant apparaître comme prioritaire vis-à-vis de la deuxième, alors même que les deux sont inextricablement liées.

De même, la question de l’articulation avec le combat contre la réforme de l’assurance chômage a été discutée : un membre du collectif intermittents et précaires a souligné que les questions des retraites, des salaires et du chômage doivent être pensées ensemble pour entraîner les secteurs précaires, qui restent aujourd’hui en marge du mouvement de grève.

A également été discutée l’opportunité d’entraîner dans la bataille de larges secteurs de la jeunesse et du travail précaire autour d’un programme qui prenne en compte les revendications du mouvement féministe et antiraciste. En particulier, la date du 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes et des minorités de genre, pourrait prendre place dans le mouvement en tant que journée de grève féministe faisant suite à la date du 7 mars appelée par l’intersyndicale.

Cela pourrait permettre de mettre en lumière la place des femmes et des minorités de genre en première ligne de l’attaque de la réforme des retraites, mais aussi d’étendre le programme du mouvement à des revendications féministes, telles que des moyens massifs pour la santé et l’éducation afin de lutter contre les violences sexistes et sexuelles et pour un droit effectif à l’IVG, mais aussi antiracistes avec la revendication du retrait du projet de loi immigration.

Imposer un appel à la reconductible

Ces premières rencontres interpro ont donc confirmé l’urgence de coordonner les différents secteurs en vue de la poursuite du mouvement de grève au retour des vacances scolaires, dans le but d’étendre l’auto-organisation autour d’un programme de revendications à même d’entraîner de larges franges de la population dans la bataille.

Alors que, dans certaines boites de l’aéronautique notamment, une journée de grève implique la perte d’une prime de 300e en plus de la journée de travail, soit une perte de 400e, les secteurs les plus organisés comme l’éducation, la SNCF, mais aussi la jeunesse, ont un rôle central à jouer vis à vis des travailleurs plus précaires. C’est depuis ces secteurs et grâce à l’auto-organisation qu’il sera possible de faire pression sur l’intersyndicale, pour arracher un appel clair à la grève reconductible à partir du 7 mars, à même de susciter l’élan décisif qui pourrait faire plier le gouvernement sur la réforme des retraites et plus encore.

En ce sens, grâce à la structuration de l’AG éducation et aux discussions qui y ont été menées en interpellant les directions syndicales, le fait que l’intersyndicale éducation 31 appelle à reconduire la grève le 8 mars et à discuter de la reconduction le 9 mars, représente un acquis important pour entraîner d’autres secteurs.

Pour poursuivre la dynamique interprofessionnelle au niveau local, il a été décidé d’appeler à de nouvelles rencontres interpro, ce samedi 18 février à l’université du Mirail, ainsi qu’à une AG interpro la semaine du 6 mars, dont la date sera fixée ce samedi.


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