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Une souffrance qui se généralise

Services publics. Le gouvernement voudrait mettre à genoux ses agents

Tandis que le procès concernant le harcèlement des dirigeants de France Télécom fait réapparaître au grand jour « un management de la terreur », mis en œuvre avec le plus grand cynisme, des travailleurs de la SNCF, de la Poste, des Hôpitaux, de l’Education Nationale …, qu’ils soient simples salariés, militants syndicalistes ou gilets jaunes, sont quotidiennement victimes d’une exploitation et d’une répression croissantes… Résister est une urgence vitale.

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Soumettre l’ensemble des secteurs à la loi d’airain du capital

Il suffit d’observer l’actualité de ces derniers jours pour être convaincu que les dirigeants du secteur public, ministres de tutelle, PDG ou directeurs de tout poil, sont, tout comme les patrons des grandes entreprises, déterminés à imposer au personnel, coûte que coûte, les conditions nécessaires à l’efficacité économique et financière de secteurs devenus concurrentiels, ou susceptibles de le devenir, quelle que soit leur utilité publique. C’est le cas des secteurs de l’énergie, du transport, des communications, mais aussi des hôpitaux ou des établissements scolaires et universitaires.

Tandis que les manifestations en défense des services publics se répètent régulièrement et que, dans la dernière période, les gilets jaunes en ont fait l’une de leurs principales revendications, la classe politique dirigeante impulse une stratégie de « management des ressources humaines » qui n’a rien à envier aux pionniers de France Télécom et à leur maître à penser, le constructeur automobile Toyota dont le redressement économique fulgurant a servi de modèle à toutes les écoles de management.

Que l’on puisse souffrir, être malade, se plaindre, aller jusqu’au suicide est inadmissible pour ces « costs killers » et autres amateurs de « lean management » qui osent qualifier de « mode » la multiplication des suicides sur les lieux de travail.

Encore plus intolérable à leurs yeux est l’audace des militants syndicalistes combatifs, lanceurs d’alerte qui soutiennent leurs collègues dans leur défense, opposants déterminés aux réorganisations constantes, aux coupes dans les effectifs, à la précarisation des emplois. Il faut les abattre non seulement pour gagner sur tel ou tel cas, mais pour mettre définitivement à genoux les travailleurs et leur enlever toute médiation un tant soit peu encadrée.

Frapper tout azimut pour ôter l’envie de résister

C’est ainsi qu’Eric Bezou, cheminot lanceur d’alerte et Gilet Jaune est menacé de licenciement par la SNCF pour s’être mis à genoux devant ses cadres, exprimant par sa « posture » ironique le sentiment que lui inspirait l’attitude de la direction de la SNCF à l’égard de ses salariés dont le nombre de suicides - plus de 50 cas depuis 2017 - a d’ailleurs atteint, voire dépassé, celui de France Télécom.

Eric Bezou qui a osé cette impertinente protestation s’était opposé avec détermination à la réforme ferroviaire lors de la « bataille du rail » de 2018. Il passera en conseil de discipline avec menace de licenciement, le 23 mai. L’affaire n’a pas traîné.

Mais la répression ne se limite pas aux secteurs ouverts à la concurrence, elle s’attaque à l’ensemble des personnels de la fonction publique qu’il convient de soumettre aux exigences d’efficacité et de rentabilité voulues par un néolibéralisme exacerbé. Elle pénètre jusque dans les murs des hôpitaux. Ainsi, dans le cadre de la réforme de la Fonction Publique, en cas de conflit ou d’avis défavorable, l’agent n’a plus comme seul recours possible que de saisir individuellement la juridiction compétente, sans pouvoir bénéficier d’une défense syndicale. De nouvelles sanctions sont d’ailleurs introduites en secteur hospitalier avec notamment la possibilité d’une mise à pied de 3 jours. Il devient dans ces conditions de plus en plus difficile de ne pas se soumettre, même au prix de la destruction de soi.

Dans le milieu de l’éducation, la répression et l’arbitraire sévissent tout aussi violemment. C’est ainsi que trois enseignant.es d’un collège situé en REP (réseau d’éducation prioritaire), à Bobigny, sont sous le coup de deux mutations et d’une procédure disciplinaire après respectivement 27, 20 et 18 ans passés dans cet établissement. Ils sont tous les trois syndicalistes (Sud Education). Aux dires mêmes de parents, ces mesures sont pour le moins surprenantes : « On est très surpris que l’Education nationale s’en prenne à des profs présents de longue date dans l’établissement et qui y ont porté de nombreux projets »… « Cela s’apparente à de la discrimination syndicale ».

Une entreprise de démolition à laquelle il faut mettre un coup d’arrêt

Chacun parmi les travailleurs connaît dans son entourage ou a lui-même vécu une dépression, un burn-out, voire un suicide dû au stress au travail. De plus en plus fréquents sont, par ailleurs, les cas de syndicalistes combatifs qui payent le prix fort pour accomplir leur mission de défense de leurs collègues, même s’ils n’ont pas toujours, pour ne pas dire rarement, le soutien de leur fédération.
Macron, de son côté, poursuivant les méfaits de la loi El Khomri, n’a pas caché sa volonté d’éliminer les médiations syndicales et de livrer des individus isolés et sans protection à l’exploitation capitaliste. Toutes les lois qu’il initie vont dans le même sens.

Pourtant, une telle situation ne va pas sans susciter réactions, mobilisations et solidarités. Malgré les risques que cela représente, de nombreux collègues cheminots n’ont pas hésité à apporter ouvertement leur soutien à Eric Bezou à qui ils ont tenu à renvoyer l’ascenseur pour l’aide qu’il leur avait apportée dans leurs difficultés. De nombreuses personnalités de gauche et d’extrême gauche ont apposé leur signature sur une tribune intitulée « Plus jamais à genoux ». Un rassemblement est prévu à la gare saint Lazare le 23 mai dans un large esprit de convergence.

Réactions de solidarité également contre les mutations et la procédure disciplinaire envers les enseignants du collège de Bobigny. Les parents d’élèves ont été parmi les premiers à se mobiliser. Dès les premières heures après l’annonce des menaces qui pesaient sur ces enseignants, les signatures se sont multipliées par milliers sur une pétition en ligne pour réclamer l’arrêt des procédures. Cette solidarité parents/enseignants est un phénomène qui prend d’ailleurs de l’ampleur et s’est manifesté en plusieurs circonstances avec des opérations « école morte » durant lesquelles les parents n’envoient pas leurs enfants à l’école.

Mais au-delà des réactions au cas par cas, c’est une riposte généralisée qui devrait être engagée à l’initiative de toutes les organisations ouvrières et démocratiques et des gilets jaunes pour s’opposer aux attaques mortifères d’un Macron tenant du néolibéralisme le plus débridé et le plus violent décliné servilement « sur le terrain » par des managers dont les derniers échelons ne savent d’ailleurs parfois plus eux-mêmes où ils habitent.


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