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Grève pour les salaires

Roissy. Grève chez le sous-traitant ACNA : « On doit lutter tous ensemble pour gagner plus qu’une prime ! »

Après la grève du 9 juin à l’aéroport de Roissy, les salariés de l’entreprise sous-traitante ACNA chargée du nettoyage et de la manutention du matériel des avions se sont remis en grève lundi en revendiquant une augmentation de salaire de 300€ pour tous. Le lendemain, la direction a proposé 400€ de prime en échange de la levée du préavis. Une démonstration que la perspective d'une grève d'ampleur à Roissy fait peur aux patrons, et que les salariés de l’aéroport peuvent imposer l’augmentation des salaires en s’organisant pour se battre tous ensemble. Interview de Makan-Oulé Dembele, membre du bureau exécutif de l’union locale CGT de Roissy et élu CSE chez ACNA.

Alexis Taïeb

15 juin 2022

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Les grévistes d’ACNA ce lundi 13 juin 2022.

Révolution Permanente : Après la grève du 9 juin à Roissy, les salariés du sous-traitant ACNA chargé du nettoyage et de la manutention du matériel des avions à l’aéroport de Roissy se sont remis en grève le 13 et déposaient également un préavis pour le 15 et le 17 juin. Quelles sont les raisons de la colère dans ce secteur où les salaires sont au plus bas et les conditions de travail des plus difficiles ?

Makan-Oulé Dembele : Nous somme en colère, et notre colère est justifiée. Suite à la pandémie, nous avons vu, que ce soit à Air France ou ADP (Aéroport de Paris), les sociétés mères ont bénéficié d’aides financières monstrueuses de l’Etat. En parallèle, il y a eu des suppressions de postes, provoquant un manque criant d’effectif, et donc forcément, une surcharge importante de travail pour tous les salariés.

De plus, alors qu’on a travaillé durant tout le COVID, nous n’avons eu aucune reconnaissance de l’effort fourni. A cela, il faut ajouter que lors des dernières NAO (négociations annuelles obligatoires), le 2 juin, la direction nous a fait des propositions misérables, alors que le coût de la vie est de plus en plus cher. On a dû claquer la porte au nez de la direction, c’était trop.

Donc après le 9 juin, le jour où tout le monde s’est mis en grève à l’aéroport pour demander 300 euros d’augmentation pour tous, nous avons décidé de continuer à nous mobiliser le 13, 15 et 17 juin.

RP : Pourquoi l’entreprise donneuse d’ordre Air France a-t-elle recours à la sous-traitance ? Qu’est-ce que cela implique pour les conditions de travail et les salaires des travailleurs ?

Makan-Oulé Dembele : Tous les trois ans, Air France fait un appel d’offres au sous-traitant, avec un objectif : diminuer les effectifs et les salaires pour faire plus de profits. Pour donner un exemple à partir de mon cas personnel, depuis le 1 er avril 2014, date du dernier appel d’offre, je perds 250 euros chaque mois. Et je suis loin d’être le seul à subir cela, il y a le même type de phénomène dans toutes les entreprises.

Clairement, c’est une exploitation violente que nous subissons. Concernant le nettoyage et la manutention du matériel des avions, auparavant, ce sont des salariés d’Air France qui le faisait. Mais maintenant, Air France préfère sous-traiter pour baisser un maximum les salaires et faire des économies.

RP : Comment la direction a-t-elle réagi face aux revendications des salariés ?

Makan-Oulé Dembele : Quand elle a vu qu’on commençait à avoir le rapport de force, elle a proposé une prime misérable de 400 euros. C’est une honte, parce qu’avec l’inflation actuelle on ne peut pas se contenter de ça ! Les trois délégués syndicaux centraux (DSC) CGT, CFDT et SLICA n’ont rien signé pour le moment, mais ils ont suspendu le préavis de grève. Il y aura une assemblée générale demain à dix heures pour décider avec les salariés de la suite du mouvement.

Il ne faut pas oublier que si les salariés se sont mis en grève, c’est pour exiger une augmentation de 300 euros de salaires pour les tous les salariés, dans toutes les entreprises. Pas pour une prime ponctuelle qui compense à peine le salaire qu’on a perdu en faisant grève. Malheureusement, la situation est tellement difficile que ces 400 euros, posés comme ça sur la table, ça peut contenter les collègues, c’est normal. Maintenant ça montre surtout qu’on fait peur aux patrons et qu’on pourrait gagner bien plus qu’une prime en se luttant tous ensemble. Donc on doit continuer à s’organiser pour la suite.

RP : Le 9 juin les salariés de nombreuses boîtes différentes à Roissy - sous-traitants et donneurs d’ordre - se sont mis en grève et ont montré qu’ils sont prêts à se mobiliser tous ensemble pour une augmentation de 300€ pour tous. Alors que les patrons essayent de diviser en négociant boîte par boîte, comment maintenir cette unité ?

Makan-Oulé Dembele : Oui, l’unité était un enjeu, c’est pourquoi on a toujours interpellé tous les délégués syndicaux, pour qu’il y ait des AG dans toutes les entreprises, pour lutter pour l’unité, par la base. Et notamment pour que tout le monde se range derrière un seul et unique mot d’ordre, afin d’éviter la division.

Cette revendication, c’est le principal moteur de la grève. Au niveau d’ACNA, il y a aussi eu des AG où nous avons discuté avec tous nos camarades pour défendre cette revendication de 300 euros d’augmentation. Avoir des revendications isolées secteur par secteur ne peut aboutir, il était crucial d’avoir une seule revendication, pour nous unir.

RP : Concrètement, comment s’est déclenché le mouvement ? Comment se structure-t-il et que revendiquent aujourd’hui les salariés ?

Makan-Oulé Dembele : [Avec l’Union Locale CGT de Roissy, on a poussé à ce qu’il y ait des AG dans toutes les boites, car un mouvement doit se préparer avant le début de la grève. On a donc lancé un appel à tous les délégués syndicaux, ensuite on a pris la décision que tout le monde revendiquerait 300 euros d’augmentation de salaire, toute boite confondue. Il y a eu des Assemblées générales dans toutes les entreprises pour préparer la mobilisation.

RP : Un nouvel appel à la grève unitaire et, cette fois, reconductible est lancé à partir du 1er juillet à Roissy, toujours autour de la revendication d’une augmentation de 300€ pour tous. Avec les salariés du nettoyage, participerez-vous à ce mouvement pour peser et construire le rapport de force le plus large possible ?

Makan-Oulé Dembele : Evidemment. Dès demain matin j’irai en parler avec mes collègues. Il faut que cette grève soit illimitée pour qu’on obtienne ces 300 euros pour tous, et que nos conditions de travail s’améliorent. On veut que notre travail soit reconnu !


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