×

Réforme des retraites

Retraite des travailleurs en invalidité : Macron retient ses coups pour satisfaire les assureurs privés

La réforme des retraites s’en prend à tout le monde, y compris aux travailleurs en invalidité, en incapacité ou en inaptitude dont l'état de santé rend difficile voire impossible de continuer à travailler. Et si le gouvernement a choisi de retenir ses coups, c’est d’abord pour répondre aux inquiétudes des assureurs privés, qui craignaient de voir leurs dépenses augmenter.

Joshua Cohn

12 janvier 2023

Facebook Twitter

La première Ministre ne manque pas d’artifices pour maquiller la violence de sa réforme des retraites. Au côté de ses promesses dérisoires, quand elles ne sont pas mensongères, sur la pénibilité ou les carrières longues, Borne agite également le maintien de l’âge de départ à 62 pour les travailleurs en invalidité, en incapacité ou en inaptitude. En plus d’être inexacte et de représenter un recul, cette annonce répond en réalité aux préoccupations des assureurs privés, pour lesquels les travailleurs âgés représentent surtout de mauvais clients.

Un recul pour les accidentés du travail et les victimes d’une maladie professionnelle

En premier lieu, le dossier de presse du Gouvernement affirme dès sa deuxième page que « celles et ceux en situation d’incapacité ou d’invalidité continueront à bénéficier d’un départ à taux plein à 62 ans ». Cette affirmation fausse est démentie par ce même dossier de presse à la page 21 puisque qu’il est alors précisé que « toute personne ayant eu un accident du travail ou une maladie professionnelle (AT-MP) ayant entrainé une incapacité d’au moins 10 % pourra partir 2 ans avant l’âge légal ». 

Or aujourd’hui, les personnes souffrant d’une incapacité permanente d’au moins 10 % consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle peuvent partir à la retraite à taux plein à partir de 60 ans. Demain, avec la réforme des retraites du Gouvernement, ce sera « 2 ans avant l’âge légal », soit 62 ans dès la génération 1968. Borne repousse donc l’âge de départ en retraite des accidentés du travail et des victimes de maladies professionnelles ! 

Des aménagements en faveur des assureurs privés

Si le départ est bien maintenu à 62 ans pour des travailleurs titulaires d’une pension d’invalidité ou reconnus inaptes par la médecine du travail, ce n’est certainement pas pour leur offrir une faveur. Il s’agit en réalité de s’assurer que la charge de ces personnes ne pouvant plus gagner leur vie par le travail ne viennent pas entamer les profits du privé. 

En effet, en plus des régimes obligatoires de la Sécurité sociale qui versent une pension aux travailleurs invalides ou souffrant d’une incapacité d’origine professionnelle, nombreux sont ceux bénéficiant en plus d’une couverture privée garantissant une indemnisation plus élevée. Pour les salariés, ces couvertures sont généralisées chez les cadres et sont également rendues obligatoires pour les non-cadres par les conventions collectives de branche dans de nombreux secteurs, notamment parmi les plus accidentogènes et éreintants, tels que le BTP, les transports ou encore la métallurgie. 

Or, pour les assureurs qui couvrent les salariés et versent des rentes en cas de diminution de la capacité de travail, le recul de l’âge de départ à la retraite est un problème financier de taille. En effet, cela signifie pour eux l’obligation de verser des rentes pendant plus longtemps, mais aussi d’indemniser la dégradation de l’état de santé et les accidents dont sont victimes les travailleurs âgés, pour lesquels les risques sont évidemment plus importants que pour leurs collègues plus jeunes. 

Un exemple de plus de la socialisation des pertes

Interrogé sur France Info le 5 janvier, Éric Chenut, président de la de la Fédération Nationale de la Mutualité Française estimait que le report de l’âge légal à 65 ans sans aménagements augmenterait la charge des assureurs de 10 milliards d’euros. 

Par conséquent, mettre à la retraite les invalides, accidentés du travail, victimes de maladies professionnelles et inaptes au travail dès 62 ans, c’est soulager les assureurs privés de leur charge et les faire basculer dans le régime public des retraites. 

En annonçant le départ à 62 ans pour ces publics fragiles, le gouvernement fait donc un cadeau financier considérable aux assureurs privés, tandis qu’un bon nombre de ces travailleurs, bien que bénéficiant d’un taux plein automatique, devra composer avec une pension doublement pénalisée : à la fois par les salaires faibles ou irréguliers pour cause de maladie qui serviront au calcul du salaire moyen, mais aussi par l’allongement de la durée de cotisation puisque la pension sera « proratisée » à la hauteur des trimestres validés.

Comme le montre le recul de l’âge de départ des travailleurs en incapacité professionnelle de 60 à 62 ans, Macron n’hésite pas à s’attaquer à la retraite des plus fragiles. S’il retient ses coups et maintient la possibilité pour les invalides et les inaptes au travail de partir à 62 ans, c’est pour préserver les profits du privé. Pendant ce temps, pensionnés au titre d’un régime d’invalidité ou de retraite, les travailleurs dont le corps est brisé continueront de peiner à joindre les deux bouts.


Facebook Twitter
SNCF : 300 personnes en soutien à Régis, menacé de licenciement pour avoir dénoncé des VSS

SNCF : 300 personnes en soutien à Régis, menacé de licenciement pour avoir dénoncé des VSS

Roissy : face à la pression patronale, les salariés d'un sous-traitant de Sixt en grève reconductible

Roissy : face à la pression patronale, les salariés d’un sous-traitant de Sixt en grève reconductible

100€ à débourser pour accéder à son CPF : le gouvernement fait à nouveau payer les travailleurs

100€ à débourser pour accéder à son CPF : le gouvernement fait à nouveau payer les travailleurs

« Ils veulent museler toute contestation ». La CGT Fleury Michon appelle à la grève contre la répression

« Ils veulent museler toute contestation ». La CGT Fleury Michon appelle à la grève contre la répression

Éducation : la grève du 22 avril ne peut rester isolée, il faut un plan pour élargir la lutte !

Éducation : la grève du 22 avril ne peut rester isolée, il faut un plan pour élargir la lutte !

5 jours de mise à pied : la SNCF réprime Marion, cheminote ayant dénoncé une agression sexuelle

5 jours de mise à pied : la SNCF réprime Marion, cheminote ayant dénoncé une agression sexuelle

« Tavares gagne 36,5 millions grâce aux ouvriers sous-payés » Vincent, délégué CGT Stellantis

« Tavares gagne 36,5 millions grâce aux ouvriers sous-payés » Vincent, délégué CGT Stellantis

Toulouse. Marche blanche en mémoire d'Adrien, employé de l'ATPA-SPA en lutte contre la maltraitance animale

Toulouse. Marche blanche en mémoire d’Adrien, employé de l’ATPA-SPA en lutte contre la maltraitance animale