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Patrons voyous

Rassemblement de soutien pour le salarié CGT de Renault à Toulouse

Salarié depuis 25 ans chez Renault, Laurent Pons a été licencié pour avoir simplement refusé de se plier à l'injonction patronale de travailler 5 jours par semaine au lieu de 4 jours, comme le préconisent pourtant le cabinet d'expertise et le verdict des prud’hommes. Des pratiques honteuses à peine voilées, qui risquent de se généraliser avec le passage en force de la loi travail... Paul Carson-Saher

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Laurent Pons, 45 ans, salarié de Renault depuis 25 ans, par ailleurs syndiqué CGT et secrétaire du CE, a récemment été licencié pour avoir refusé de courber l’échine face à une direction qui entend bien faire travailler davantage ses salariés, sans compensation. Une pratique intolérable qui pose encore une fois la question du mépris total de la direction dans la plupart des grandes entreprises.

Pour manifester leur mécontentement et afficher leur soutien auprès de ce salarié, un rassemblement s’est tenu mercredi 8 juin à partir de 11h30, devant la concession Renault TMA à Toulouse (route de Revel), regroupant plusieurs salariés des différents sites locaux (Renault Muret, Renault Mirail, Renault TMA, Renault États-Unis), ainsi que quelques soutiens extérieurs comme les salariés de Mercedes ou encore les salariés de Latécoère.

Jusqu’à 14h, les travailleurs ont tenu leur position devant la concession, également à proximité de la route pour plus de visibilité, avant d’aller débrayer l’usine durant une heure.

Recours en justice et avis d’expertise

Pour comprendre ce mécontentement, revenons en 2013, où les salariés de Renault travaillaient jusqu’à présent 4 jours par semaine, comme le stipulait le contrat initial. Après le départ de l’ancien directeur et depuis le rachat de l’usine par Renault Retail Group – deuxième groupe de distribution automobile en Europe –, tout a changé : sans aucune explication viable, le travail des 4 jours a finalement été rehaussé à 5 jours, dans une démarche de productivité toujours accrue, au détriment des salariés qui ne perçoivent pourtant pas de hausse significative de leurs salaires.

Face à cette situation, et faute de pouvoir instaurer un véritable cadre de négociations, plusieurs salariés ont fait une demande d’expertise, avant de se rendre aux prud’hommes, portant ainsi l’affaire en justice. Le jugement a été rendu en mai 2015, avec à la clef un verdict naturellement en faveur des salariés, obligeant l’entreprise à réinstaurer la semaine des 4 jours. Hélas, six mois plus tard, le groupe Renault a malgré tout décidé de réitérer sa manœuvre en remettant le projet des 5 jours sur la table. Factuellement, nous nous retrouvons alors devant un flagrant délit de mépris et d’impunité de la part de la direction, pour un verdict qui ne l’arrange pas.

La plupart des élus du groupe auraient même subi diverses pressions pour imposer coûte que coûte cette mesure, passant outre la décision des prud’hommes. Aujourd’hui, aucune négociation ni aucune réelle discussion n’est possible avec la direction, qui fait la sourde oreille et reste plus qu’évasive lorsqu’on lui demande des explications sur ces motivations profondément antisociales.

La veille du rassemblement de soutien, une délégation cégétiste s’est par ailleurs rendue à l’inspection du travail pour déposer un dossier de défense, dans l’espoir que l’inspection invalide administrativement ce licenciement proprement abusif et empêche le groupe de renouveler ces pratiques. La réponse devrait être formulée à la fin du mois, même si le résultat reste toutefois incertain.

Une décision politique ?

En réalité, bien que la direction refuse de considérer ce licenciement comme le résultat d’une décision non pas professionnelle mais purement personnelle, les salariés quant à eux sentent clairement que l’enjeu principal est de faire un exemple parmi les syndiqués les plus investis dans la lutte. Licencier brutalement Laurent Pons, c’est en vérité tenter de briser toute velléité de résistance face à une direction qui considère ses salariés non pas comme des personnes, mais comme de simples statistiques, des outils de production, des instruments de leur propre enrichissement personnel. En témoigne l’atmosphère de la majorité des réunions entre la direction et les délégués, dans lesquelles nul dialogue ne semble possible en raison de l’opacité totale et assumée des manœuvres patronales. En définitive, les silences, les contorsions et la langue de bois habituelle de la nouvelle direction traduisent plus que jamais un malaise chez celle-ci ; malaise de ne pas pouvoir affirmer en toute franchise devant ses salariés que le groupe souhaite se faire en réalité une marge confortable sur les dos des travailleurs, en leur demandant notamment de travailler plus sans compensation proportionnelle, mais aussi d’être dans une posture davantage polyvalente au sein même de l’usine (une variante sémantique de la fameuse « flexibilité » tant vantée par le gouvernement et le MEDEF), cela dans le but de produire plus et à moindres frais.

Dans le contexte actuel, et plus particulièrement avec le passage en force de la loi travail, ce genre de licenciement représente clairement l’épiphénomène d’une pratique honteuse qui tend à se généraliser de plus en plus. Les salariés de Renault ont bien conscience qu’avec la loi travail, Laurent Pons ne sera certainement pas le dernier à subir les attaques patronales de plein fouet, dans une logique de mépris de classe plus qu’évidente. C’est pourquoi la lutte ne doit jamais cesser de faire entendre sa voix et de se mobiliser dans la rue, mais aussi dans les entreprises, et cela dans la perspective d’une réelle convergence des luttes entre tous les secteurs touchés par ces violences patronales. Mais à trop vouloir serrer la vis en intimidant ses salariés, reste à savoir si la direction pourra tenir la route bien longtemps dans son impunité...


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