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Amnistie pour tous !

Procès d’Elie Domota : l’Etat francais s’acharne sur une figure de la révolte en Guadeloupe

Poursuivi pour « violence sur dépositaire de la force publique », Elie Domota fera face ce jeudi 7 avril au tribunal correctionnel pontois. Un pas de plus dans la répression coloniale mise en place par l’Etat francais depuis des mois.

Julien Anchaing

7 avril 2022

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Le procès d’Elie Domota est une attaque à l’ensemble du mouvement de novembre

En novembre 2021 la Guadeloupe avait vu sa population entrer dans une profonde rébellion contre la gestion autoritaire de la crise sanitaire par l’Etat francais. Après des mois de luttes sectorielles croissantes, notamment dans le secteur de la santé contre la politique du passe sanitaire, des barrages avaient été mis en place dans de nombreux quartiers de l’île et avaient abouti à de lourds affrontements entre la police et la jeunesse et les travailleurs guadeloupéens.

Bien que partant pour beaucoup de la question sanitaire, la révolte avait été l’occasion de rappeler le profond désarroi de la population guadeloupéenne devant la gestion coloniale de l’île par l’Etat francais. Les limites de l’accès à l’eau courante, du fait de la vétusté des canalisations et centres d’assainissement d’eau, la cherté de la vie ainsi que la précarité croissante d’une jeunesse forcée à l’exil économique ou encore la crise des sargasses avaient été parmi les mots d’ordre rappelant la mobilisation de 2009 contre la Pwofitasyon.

L’Etat francais avait mené une répression féroce sur l’île, notamment par le biais de l’appel à intervention du GIGN et du Raid ainsi que par la mise en place – traditionnelle dans les anciennes colonies françaises – du couvre-feu rappelant les méthodes de la répression historique de 1967 à Pointe-à-Pitre. Comme le rappelait alors Pierre Nido dans nos colonnes, cette répression avait cependant surtout pour caractère inédit la profondeur de la répression judiciaire qui l’avait accompagné.

Le 30 décembre dernier Elie Domota, porte-parole du mouvement LKP Liyannaj Kont Pwofitasyon et figure de l’Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe avait lui-même été victime de la répression policière aux Abymes. Le leader syndical avait alors été violemment agressé par la police et ses camarades, gazé puis interpellé et placé en garde à vue pendant plusieurs heures. Le Monde indique que le dirigeant du LKP a notamment réagi par le dépôt d’une plainte pour violences policières, en réaction au procès auquel il fait face aujourd’hui pour « violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité publique ».

Une politique de répression mise en place depuis des mois

Ce procès contre Elie Domota fait partie d’un plan plus généralisé de répression contre l’UGTG, le LKP et l’ensemble du mouvement social et de la jeunesse guadeloupéenne. L’Etat francais, dans une volonté de réprimer durement à la suite de la révolte de novembre dernier cherche à intimider le mouvement social, dans ce cas en s’attaquant à l’une de ces principales figures. En effet, comme nous l’avait indiqué Maître Josélaine Gélabale que nous avions interviewé en décembre dernier « Ce qui est particulièrement frappant c’est que beaucoup de prévenus qui n’avaient pas de casier judiciaire ont écopé de peines de prison ferme ce qui habituellement arrive peu dans des affaires de droit commun. Mais il est également étonnant de voir des condamnations de prison avec sursis pour des infractions d’entrave à la circulation. ». L’avocate avait alors rappelé dans nos colonnes l’importance de l’appareil de répression juridique déployé contre la jeunesse depuis décembre dernier avec des coordonnées particulières comme celles du traitement des affaires sans aucune prise en considération du contexte social dans lequel avait lieu les « infractions » traitées, aboutissant à des peines très lourdes et souvent fermes pour une partie des jeunes inculpés.

Une répression qui touche aussi des figures du mouvement de l’UGTG comme le syndicaliste Gaby Clavier, qui avait dénoncé la gestion catastrophique de la crise sanitaire au CHU de la Guadeloupe, mais aussi des avocats. C’est notamment le cas de Me. Patrice Tacita, l’un des principaux avocats du mouvement LKP aujourd’hui visé par un procès qui aura lieu en Martinique en juin prochain pour éviter la possibilité qu’il puisse recevoir un soutien populaire lors de son procès.

La persécution contre les acteurs du mouvement social, syndicalistes et avocats, touche aussi durement la jeunesse avec des méthodes particulièrement coloniales. Avec l’argumentaire absurde d’une « révolte coordonnée et organisée » le préfet de la Guadeloupe essaie d’agiter la menace des « gangs » pour justifier sa politique de répression ayant abouti au transfert de 7 détenus en métropole pour qu’ils soient jugés. Une politique habituelle des pouvoirs coloniaux de transferts des détenus vers des territoires proches ou directement vers la métropole pour éviter que les affaires ne deviennent de véritables objets de luttes sociales et démocratique pour la libération des prisonniers mis en examen depuis janvier et n’ayant toujours pas pu revoir leurs familles.

Cette politique de répression violente est une des démonstrations par la négative de l’impasse que représente la politique de dialogue social avec le gouvernement et avec le ministère de Sebastien Lecornu, isolant par la même la jeunesse précaire ou marginalisée. Seule une réponse conséquente par le biais de la coordination entre les secteurs du mouvement ouvrier organisé et cette même jeunesse extrêmement combative doit permettre la construction d’un plan de lutte pour aller vers l’autodétermination du peuple Guadeloupéen. De plus, la répression juridique que mène aujourd’hui l’Etat francais est une attaque au mouvement social guadeloupéen et à l’ensemble du mouvement ouvrier. Il exige une réponse forte de l’ensemble de notre classe pour exiger la libération de tous les détenus politiques de la révolte de novembre ainsi que leur amnistie.


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