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La valse des hypocrites

Primaires de la gauche. Quand Valls ose le féminisme

« C’est peut-être un des sujets les plus difficiles à appréhender […] parce que les responsables politiques ne donnent pas toujours le bon exemple ». Lors du troisième débat des primaires de la gauche de ce jeudi 19 janvier, les candidats ont été interrogés sur les mesures à prendre pour avancer dans l’égalité femmes-hommes. Si la plupart d’entre eux ne semblent pas très au clair sur la réalité des vies des femmes en France aujourd’hui, y compris Sylvia Pinel, seule femme de ces primaires, la palme du soir revient à Monsieur Valls, pour son hypocrisie éhontée sur le sujet. Et ce malgré la concurrence rude d’un Montebourg dont on avait déjà pu apercevoir la haute opinion qu’il a des femmes, ou d’un Bennahmias incapable de ne pas couper la parole à la seule femme candidate du plateau. Mar Martin

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Au premier temps de la valse…

...il y a ce temps de débat accordé à l’égalité femmes-hommes, au milieu des autres questions éparses qui mêlent la « délinquance » au phénomène Trump, la sécurité sociale aux relations avec Bachar, ou autre défense contre le Juda-Macron. La discussion est d’abord introduite par cette question : « Est-ce que quelqu’un parmi vous a choisi comme directeur de campagne une femme ? » C’est alors une atmosphère lourde qui s’empare des pupitres. Seulement traversée par la fierté trop grande de François de Rugy qui peut se vanter d’un « oui », tout en tentant de retenir son sourire déjà presque fendu jusqu’aux oreilles. Belle image silencieuse des sept candidats, six costumes-cravates également répartis autour de l’unique tailleur rouge vif de Sylvia Pinel.

Moment certainement embarrassant puisque Monsieur Valls, une fois son tour de parole venu, ne pourra s’empêcher de revendiquer avoir été le seul Premier ministre de l’histoire de la République à avoir eu une directrice de cabinet. Une bonne caution féministe au point qu’il ne nommera même pas son nom. Véronique Bédague-Hamilius, économiste (au FMI notamment) et femme politique, ancienne élève de l’ESSEC et énarque, est en effet devenue directrice de cabinet de Manuel Valls en avril 2014.

Au deuxième temps de la valse…

...il y a ce constat fait par Valls lui-même : l’écart de salaire entre les femmes et les hommes n’a été divisé que par deux en quarante ans. Ce qui ne l’empêche pas de clamer dans son programme qu’il se « fixe pour objectif de le diviser par deux en cinq ans pour qu’il ait totalement disparu en dix ans. » Comment ? Difficile à dire. Sa proposition centrale est de mettre la question de l’égalité salariale entre femmes et hommes au cœur de la première conférence de dialogue social. Pour Valls, la clef pour mettre fin au sexisme au travail, c’est « l’engagement » de tous, et en particulier des chefs d’entreprises. Quand on connait le sort auquel certains grands pontes des universités voudraient cantonner les femmes, ou encore le chantage sexuel à l’embauche dont certaines travailleuses sont victimes, on préfère ne pas compter sur la méthode-Valls pour mettre fin aux inégalités au travail.

Au troisième temps de la valse…

...il y a sa tentative de revenir en héros : « Et pourtant nous avons fait beaucoup : nous avons instauré la parité dans les conseils départementaux, dans les conseils municipaux, au gouvernement depuis 2012 ». Dans son programme, on trouve également la revendication à la loi du 4 août 2014, portant sur l’inégalité salariale notamment. Rappel qui résonne étrangement lorsque Montebourg affirme juste avant lui sans être démenti que « la loi existe, mais qu’elle n’est pas appliquée. » Et puis surtout il y a cet oubli, cruel. « 3 pas en avant, 2 pas en arrière » comme dit la chanson : les ABCD de l’égalité. Cette réforme des contenus scolaires qui devait parler aux plus jeunes de l’éducation genrée, des discriminations entre femmes et hommes. Celle-là que l’on connait presque mieux sous ce terme affable de « théorie du genre ». Fortement décrié par les bienséants catholiques et autres bonnes mœurs des hautes sphères, le gouvernement Hollande-Valls n’avait pas bataillé plus en amont pour la maintenir dans les bacs. Une capitulation qui a aujourd’hui encore des conséquences politiques mais surtout sociales, pour celles et ceux qui vivent bel et bien ce que le texte écrivait.

Au quatrième temps de la valse…

...il y a surtout ce moment éclair qui lui vaudra la palme : lorsque Manuel Valls pleure tout-à-coup sur « la question de la violence faite aux femmes : une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, il y a des femmes qui sont interdites de l’espace public, de lieux publics ». Arrêt sur image, il a osé. Il a osé faire reposer l’impossibilité pour des femmes d’accéder à certains lieux publics sur le tout-un-chacun. Comme s’il avait oublié qu’il était le commandant en chef de ces policiers qui ont sali nos plages cet été de leurs bottes et de leurs ordres à se « dévêtir ou partir » pour celles qu’ils jugeaient « trop couvertes ». Le chef d’orchestre de la « polémique-burkini » qui a vrillé nos oreilles-vacancières et empêché certaines d’entre nous d’accéder aux plages et autres « lieux publics » dont il parle. La palme de l’hypocrisie, la palme de la honte.

Au cinquième temps de la valse…

...il y a ce petit mot de la fin alors qu’on aurait voulu ne plus entendre : « c’est pour cela que je crois qu’ici nous sommes tous engagés et tous féministes. » Une valse qui écœure des cœurs pourtant bien accrochés, bien renforcés, bien décidés à faire valser les hypocrites.


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