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Violences faites aux femmes

« Je me rapetissais au fur et à mesure. Je me dégoûtais, je n’avais plus d’estime de moi »

Ce texte nous a été envoyé en réponse à l'appel à témoignage que nous avions publié le 23 novembre, pour la journée de lutte contre les violences faites aux femmes. Nos pages restent ouvertes à vos contributions. Pour cela, envoyez votre témoignage à l’équipe de rédaction, via notre page facebook ou bien par mail à [email protected].

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Témoignage. Nathalie D., ingénieure urbaniste, aujourd’hui en invalidité, raconte comment le viol commis par son compagnon l’a détruite. Treize ans plus tard, elle ne s’en est toujours pas sortie.

Propos recueillis par Mina Kaci pour l’Humanité, publiés sur nos pages à la demande de l’interviewée.

« J’ai connu A. chez des amis. Il m’attendait à la sortie de l’hôpital psychiatrique, où j’ai passé dix jours après une longue période de détresse, à la suite de la mort de ma mère et de la séparation d’avec mon ancien conjoint. Il m’est apparu comme le sauveur, celui qui m’offrait une seconde chance. D’autant qu’il avait accepté d’accueillir ma fille quand il m’a proposé de vivre avec lui. Fin juin 2003, j’ai emménagé chez lui. Très vite, mon prince charmant s’est métamorphosé, multipliant les insultes, les humiliations, le harcèlement moral, puis les viols. Je devais tout le temps m’occuper du ménage et de la cuisine. Mais ça ne lui convenait jamais. Le soir, j’étais sa propriété, sa “chose’’. Il me prenait quand il voulait, comme il voulait. Il me dévalorisait le jour et, dans l’intimité de la nuit, il se servait de mon corps. Je sortais du lit pour prendre une douche, ma façon de me laver de ces viols. Je rapetissais au fur et à mesure. Je me dégoûtais, j’avais honte, je n’avais plus d’estime de moi.

Du haut de mon bac+5 et de mon métier d’ingénieure urbaniste, je pensais que ça n’arrivait qu’aux autres. Le plus terrible pour moi a été de ne pas savoir identifier mon vautour. Je m’en voulais, je culpabilisais, pensant que c’était de ma faute si A. se comportait ainsi avec moi. Je n’ai pas porté plainte. D’abord, parce que je ne me suis pas rendu compte qu’il s’agissait de viols et de violences psychologiques. C’est mon médecin qui a mis les mots sur ce qui m’arrivait. Je suis tombée des nues quand j’ai compris que je subissais des violences de la part de mon compagnon. J’étais horrifiée, anéantie, je me questionnais : comment, moi qui ai une reconnaissance sociale, suis-je devenue l’objet d’un homme ? Comment ce rapace a-t-il pu me faire ça ? J’étais faible, il en a profité pour me violer. Certaines personnes ont besoin de la fragilité des autres pour montrer qu’elles sont fortes, une manière pour elles d’exercer leur domination. Au bout de quelques mois, il en a eu marre de moi. Il s’est levé un matin et, avant de sortir son chien, il m’a dit : “Quand je reviendrai, je veux vous voir parties, toi et ta fille !” Je me suis retrouvée dans un hôtel, après une tentative de suicide.

Cela fait déjà treize ans que cela est arrivé. Je suis dans la résilience. Mais je me sens encore sale, souillée. J’ai souffert du manque de solidarité de la part de mon entourage. Témoigner me fait du bien. Je le fais pour moi. Je le fais aussi pour toutes celles qui vivent ce drame dans le silence. Et je leur dis de partir le plus vite possible. Il existe un autre chemin que la honte, les médicaments et la culpabilité. »


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