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Mobilisation en Haïti

Interview de David Oxygène, militant en Haïti : « On ne manifeste pas seulement contre Martelly, la lutte est permanente ! »

David Oxygène est militant trotskiste en Haïti et membre du MOLEGHAF (Mouvement de Liberté, d’Égalité des Haïtiens pour la Fraternité). Il a participé activement aux manifestations des derniers jours contre la tenue des élections et l’occupation du pays.

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Révolution Permanente : Quelles organisations ont participé aux manifestations de la semaine dernière ?

David Oxygène : Les organisations membres du « G8 », (le groupe des 8 candidats opposés à Jovenel Moïse, le successeur désigné du président Martelly), des partis politiques comme la plateforme Pitit Dessalines et le Fanmi Lavalas [fondé par l’ex président Jean-Bertrand Aristide] participent aux manifestations, mais aussi le MOLEGHAF, le MELA (Mouvement des étudiants pour le changement) et ANBAKE POU CHANJE qui est une organisation de quartier.

RP : Peux-tu nous présenter ton organisation, le MOLEGHAF ?

D.O. : Le MOLEGHAF est composé de jeunes, d’étudiants, d’habitants des quartiers pauvres et de deux cellules ouvrières. Ce n’est pas une organisation trotskiste en tant que telle.

Nos camarades ouvriers travaillent dans les usines qui se trouvent sur la zone industrielle de SONAPI, sur la route qui mène à l’aéroport de Port-au-Prince. En ce moment, il n’y pas de grève dans les usines. Quand on est ouvrier à Haïti, ce n’est d’ailleurs pas facile de manifester. Les usines, c’est la mauvaise vie, c’est le salaire de tuberculose (c’est comme ça qu’on appelle les salaires les plus bas), c’est l’exploitation, c’est la révocation arbitraire.

Par contre, il y a un mouvement de grève à l’Université d’État de Haïti où les salariés les plus précaires luttent pour des augmentations de salaire. Le syndicat a appelé à manifester le 29 janvier pour dénoncer l’État haïtien.

RP : Le MOLEGHAF a des mots d’ordre clairement anti-impérialistes. Qu’en est-il du reste des manifestants ?

D.O. : Oui, nous manifestons toujours avec nos propres pancartes et banderoles pour dénoncer l’occupation du pays et la guerre que les États-Unis mènent contre les travailleurs en Haïti. Les autres manifestants ont des revendications immédiates et ils réclament le départ du président Martelly. Les mots d’ordre principaux dans les manifestations sont : « dehors Martelly ! » « dehors le CEP ! », « dehors la MINUSTAH ! », et « non à l’occupation du pays ! », « non au pillage de nos ressources minières ! »

RP : Qu’est-ce qui différencie les manifestations de janvier de celles d’octobre et de novembre ?

D.O. : Les manifestations sont aujourd’hui plus radicales et ont un caractère de classe plus prononcé.

RP : Qu’en est-il de la répression ?

D.O. : À chaque manifestation, on compte plus d’une quarantaine de blessés et une dizaine de manifestants sont aujourd’hui en prison. La semaine dernière, seule la Police Nationale de Haïti est intervenue pour disperser les manifestations. Mais il est arrivé par le passé que la MINUSTAH (Mission des Nations-Unies pour la Stabilité en Haïti) lui prête main-forte quand elle est dépassée.

RP : Quelles sont les perspectives du mouvement ?

D.O. : La perspective immédiate, c’est le départ du président Martelly, il va y avoir deux journées de manifestation les 29 et 30 janvier pour continuer la lutte.

En octobre, les partis politiques parlaient uniquement d’organiser des élections sans Jovenel Moïse, le poulain de Martelly. À présent, les organisations sont plus avancées et demandent la tenue d’élections sans la participation du CORE GROUP (qui regroupe les pays participant à l’occupation d’Haïti).

De notre côté, nous portons des revendications ouvrières et nous insistons sur l’importance de la solidarité avec les exploités du pays. On ne manifeste pas seulement contre Martelly, la lutte est permanente. Même après le départ de Martelly, nous continuerons à manifester contre l’occupation militaire et pour demander aux Nations-Unies de dédommager les victimes du choléra. On continue à exiger la rétrocession de la Navase, une petite île haïtienne qui se trouve entre les mains des États-Unis depuis fort longtemps. Et nous continuerons à demander aux États-Unis de rendre à Haïti les plus de 10 milliards de dollars qu’ils ont volés dans la Banque Centrale haïtienne le 17 décembre 1914, sept mois avant la première occupation du pays en juillet 1915 !

Propos recueillis par Pierre Reip


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