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Interview. Une « réserve sociale » d’étudiants en travail social pour dépenser le moins possible ?

Le gouvernement a annoncé la création d'une « réserve sociale », un dispositif pour "épauler" le monde du travail social, en première ligne face au COVID-19 mais débordé par le manque de moyens humains et matériels. Marjorie, étudiante en travail social, revient sur les conséquences du COVID-19 sur leur formation et la réalité de cette fameuse « réserve sociale ».

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Révolution Permanente : Quelles ont été les conséquences du confinement sur les étudiant.e.s en travail social ?

Marjorie : Dans un premier temps nos stages ont été suspendus. En effet, la DGCS a appelé les instituts de formations à arrêter les stages en cours. Pour certains étudiant.e.s, les structures avaient pris les devants et nous avons pu préparer notre départ auprès du public que nous accompagnons à minima mais tout le monde n’a pas eu cette chance et c’est assez dramatique pour le public déjà fragilisé auprès duquel nous intervenons.

Dans la foulée cependant, Adrien Taquet a fait un communiqué dans lequel il invitait les étudiant.e.s en travail social à venir faire du bénévolat auprès des enfants placés. Face à ces paradoxes, la DGCS a rétropédalé et a invité les structures à laisser les étudiant.e.s poursuivre leurs stages s’ils le souhaitaient.

Pour ce qui est de la scolarité, nos écoles sont évidemment fermées. Les formateurs s’organisent comme ils peuvent pour nous faire des cours à distance, mais très prochainement, la question du rendu des écrits et de la validation des certifications va se poser notamment pour les étudiant.e.s en troisième année. Une plateforme numérique va à priori être mise à disposition mais nous n’avons pas vraiment plus d’informations. Cette situation est particulièrement anxiogène, les informations tombent au compte-goutte et sont parfois contradictoires.

RP  : Le plan du gouvernement repose sur une réserve sanitaire mais aussi une réserve sociale. De quoi s’agit-il ?

Marjorie  : C’est bien le problème, on ne sait pas vraiment. Dans un premier temps il a été question de bénévolat puis, plutôt de stage, ou de CDD. La DGCS nous a assuré qu’il ne fallait pas confondre la réserve sociale et la réserve civique, mais dans les faits, certaines écoles renvoient vers la plateforme jeveuxaider.gouv les étudiant.e.s qui souhaiteraient se porter volontaire pour aider dans les structures qui en ont besoin.

RP : Quels sont, selon toi, les principaux risques de ce dispositif pour les étudiant.e.s en travail social ?

Marjorie : Au début, nous n’étions pas vraiment contre, nous avons fait le choix de métiers engagés et évidemment que nous sommes prêts à aller sur le terrain. Mais le problème c’est que cela crée un précédent, et ça pose la question de la réquisition des étudiants, ce à quoi nous sommes complètement opposés. De plus dans un contexte où le social n’a pas attendu le coronavirus pour être en crise, nous craignons que l’exception devienne la règle et que même en dehors de la crise sanitaire, le recours aux stages et à cette mystérieuse réserve sociale ne devienne habituelle.

RP : Comment les étudiant.e.s en travail social se positionnent-ils par rapport à cette réserve sociale ?

Marjorie  : Les étudiant.e.s en travail social sont pris entre deux feux. D’un côté une injonction à la participation et à l’aide qui est quand même le cœur de notre métier, de l’autre évidemment la question de leur protection, celle de leur entourage et des personnes qu’ils accompagnent ce qui passe notamment par la sécurité en terme de droit du travail et donc à minima la signature de CDD. A cela s’ajoute l’enjeu du diplôme qui est source d’inquiétude.

RP : Ce dispositif te semble-t-il être une réponse à la hauteur des besoins dans le travail social ?

Marjorie : Absolument pas. Les difficultés du secteur social sont antérieures à la crise du coronavirus. La véritable question est celle des moyens qui sont mis dans ce secteur : préfère-t-on des professionnel.le.s correctement payé.e.s ou des étudiant.e.s bénévoles pour aller s’occuper des enfants placés, des personnes à la rue ou des personnes en situation de handicap ? Je ne remets évidemment pas en cause l’engagement des étudiant.e.s (étant moi-même étudiante ce serait bête) ni même des personnes bénévoles mais je pose la question : doit-on préférer la charité à l’action sociale ?

Faire appel à la responsabilité et l’engagement individuelle de chacun implique une déresponsabilisation totale de l’Etat, et sert d’excuse pour ne pas mettre de moyens dans le travail social. Une voie dans laquelle le gouvernement ne manque pas de s’engouffrer.

Face à ce dispositif gouvernemental, de nombreux étudiants en travail social ont signé une tribune pour avoirdes garanties vis-à-vis de cette réserve sociale. Vous pouvez retrouver la tribune et lasigner ici.


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