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Violences policières

Insultes racistes et violences contre une mère et son fils au commissariat de Mantes-la-Jolie. Témoignage

Au commissariat de Mantes-la-Jolie le 9 novembre dernier, une mère de famille et son fils ont subi insultes et violences policières. Placée en garde à vue pour « rébellion », balayée au sol, Julie, cadre dans un hôpital, nous raconte le traitement qu’elle a subi pour avoir demandé des explications et refusé de voir son fils brutalisé sous ses yeux.

Paul Morao

24 novembre 2020

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Crédits photos : THOMAS SAMSON AFP

Julie est cadre dans l’hôpital public. Lundi 9 novembre, elle accompagne son fils au commissariat de Mantes-la-Jolie. Mineur, celui-ci pense être convoqué pour une vieille affaire de bagarre dans le cadre de laquelle une dizaine de lycéens avaient été interpellés. En réalité, la situation va très vite virer à une extraordinaire démonstration de violence et d’arbitraire policier.

Une mère de famille insultée, balayée et placée en garde-à-vue pour avoir demandé des explications

A 14h20, Julie et son fils entrent dans le commissariat de Mantes-la-Jolie. A peine entrée, Julie apprend que son fils va être placé en garde-à-vue. « Je suis étonnée, je demande à ce qu’on m’explique les choses. Je ne suis pas du tout quelqu’un de violent ou d’impulsif, je travaille comme cadre à l’hôpital donc je sais adapter mon langage. Je demande le motif et l’agent parle d’extorsion avant de m’annoncer « il y aura une perquisition chez vous ». » Interloquée, Julie interroge le policier : « Quelles sont les démarches que je dois entamer » et se fait immédiatement rabrouer.

Au même moment, ajoutant à la tension, l’agent tire violemment son fils par le bras. « Je lui dis monsieur ne touchez pas à mon fils, je demande à mon fils de s’installer sur le banc et demande à l’agent de m’expliquer les démarches que je dois faire » raconte-t-elle, avant d’être à nouveau rabrouée. « Ici c’est la police madame, je n’ai pas à vous répondre ». Alors que les agents continuent de malmener son fils, la situation se raidit à nouveau. « Là je ne comprends pas ce qui se passe. Je vois des policiers menotter et plaquer mon fils contre le mur. Je suis moi-même extirpée en arrière et plaquée contre le mur. Mon fils crie « lâchez ma mère », je lui demande naïvement de se calmer et de ne pas bouger tandis que j’entends un « ferme ta gueule » à son encontre. Une dizaine d’agents accourent sur moi, je promets de me calmer, les policiers s’écartent. »

Lâchée par les policiers, la mère de famille se voit immédiatement poussée vers la garde à vue. « Je sens une pression dans mon dos. On me pousse, donc je fais bloc. Et là on me pousse de force. Je me retrouve au niveau de la garde à vue où je vois mon fils menotté. Et c’est là que ça dérape. Je sens comme un coup de pied, je me retourne et vois un policier plus âgé, en uniforme. Je lui demande calmement ce qu’il essaye de me faire comprendre, s’il souhaite que je m’asseois sur le banc, auquel cas il suffit de le demander. » Mais toute la politesse du monde ne permettra pas d’apaiser la rage qui semble habiter le policier. « Là il lève la main, il dit ‘’ça va, c’est rien’’… et il me met une balayette. Je tombe à terre. Sans raison. Tout reflambe, mon fils est de nouveau saisi, j’entends distinctement « ferme ta gueule », « t’es qu’une merde », « sale noir ». Une violence... Le policier m’interpelle ‘’si vous continuez c’est garde-à-vue’’. Ce à quoi je réponds ‘’mettez moi en garde à vue comme ça je resterai avec mon fils’’. »

Racisme et humiliation en garde à vue

Julie est alors placée en garde à vue pour « rébellion ». Dès lors, ce sont de longues heures soumises à l’arbitraire policier qui vont se dérouler pour cette femme dont le fils est toujours en garde à vue. « On me présente un procès-verbal, et l’agent en profite pour me provoquer en glissant ‘’je pense qu’il y a un problème d’éducation’’. Je demande à appeler mon mari, ce qu’on me refuse. Je me sens mal, je demande à voir un médecin, je commence à faire une crise de tétanie. Les pompiers arrivent, mon pouls est à plus de 120. La médecine judiciaire passe mais je ne suis pas présentée. Je me sens toujours mal, car j’ai eu un accident du travail récemment dont la douleur a été réveillée par le plaquage, j’ai des problèmes sanguins et des migraines qui reviennent. »

A 18h30, l’officier de police judiciaire explique à Julie qu’il est désormais trop tard pour appeler le magistrat, et qu’elle passera donc la nuit en garde à vue. « J’insiste en expliquant qu’il y a urgence. Il se trouve que j’étais attendue pour le travail. Et là je me mets à pleurer. » Elle passera la nuit en garde-à-vue dans une cellule non désinfectée, et finira par être emmenée à l’hôpital, menottée. De son côté, son fils métis, mineur subira les violences et humiliations traditionnelles qu’il racontera à sa mère le lendemain. « Ils m’ont montré une vidéo où j’étais avec un ami et m’ont dit « ça m’étonne pas que tu finisses comme ça, tu traînes avec un noir plus noir que toi. » » raconte-t-il, tout en expliquant avoir essuyé insultes racistes et violences tout au long de son passage entre les mains des policiers.

Pour Julie, jamais confrontée jusqu’alors à la question des violences policières, le traitement qu’elle et son fils ont subi est clairement raciste. « Si c’était le papa, qui est blanc, qui était venu accompagner son fils je pense que cela ne se serait pas passé comme ça. » note-t-elle avant d’ajouter « Maintenant j’ai vu de mes yeux que ce qu’on entend est vrai. « Sale noir », « je t’emmerde », je l’ai entendu ». Après s’être vu prescrire 10 jours d’ITT, la mère de famille a décidé de prendre une avocate et de porter plainte en réclamant l’accès aux vidéos du commissariat qui pourraient permettre de dévoiler les violences subies ce jour-là.


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