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Journée internationale pour le droit à l'avortement

IVG, transition PMA. Pour disposer de nos corps, luttons pour nos salaires et des moyens pour la santé !

IVG, transition, PMA : pour conquérir un droit réel à disposer de nos corps, attaqué sur fond de crise et d’inflation, il est urgent de construire un mouvement féministe à même d’imposer des augmentations de salaires et des moyens massifs pour les services publics.

Du Pain et des Roses

12 septembre 2022

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Les femmes et les personnes LGBTI en première ligne de la crise

« Fin de l’abondance et de l’insouciance ». C’est ce que Macron a promis dans son dernier discours au conseil des ministres. Face à la flambée des prix, la persistance de la guerre en Ukraine, les canicules et les incendies qui ont marqué l’été l’orientation du gouvernement est claire : faire payer les travailleurs.euses et les classes populaires, avec des contre-réformes qui vont s’abattre d’autant plus fort sur les plus précaires, notamment sur les femmes et les LGBTI.

Pour les 9,2 millions de personnes, dont plus de la moitié sont des femmes, qui vivent sous le seuil de pauvreté, les demandeurs·euses d’emplois et les millions de travailleur·euses qui peinent à boucler les fins de mois, on peut se demander exactement de quelle « abondance » Macron parle. Mais la rhétorique est connue, et il s’agit d’abord de nous faire accepter des « efforts » et des « sacrifices ».

Or ces derniers vont coûter d’autant plus cher aux plus précaires et aux plus discriminés des travailleurs, dont font partie les femmes et les personnes LGBTI+. Alors que mercredi Geoffroy Roux de Bezieux, patron du MEDEF, appelait sur France 2 à accélérer les contre-réformes, notamment la réforme des retraites, celle-ci va frapper durement les carrières hachées, qui concernent particulièrement les femmes, et les personnes trans, dont une partie importante est maintenue hors du marché du travail par les discriminations. De même, après la réforme de l’assurance chômage qui a touché de plein fouet les femmes qui occupent la majorité des emplois précaires et à temps partiel, la nouvelle « réforme du travail » voulue par Macron aura les mêmes conséquences, en pire.

En parallèle, après un début d’été marqué par le retour sur le devant de la scène de la crise dans la santé, la rentrée est marquée par le manque de moyens flagrant dans l’éducation nationale. Encore une fois, ce sont celles et ceux pour qui l’accès à la santé et à l’éducation est déjà le plus compliqué, et en particulier les personnes LGBTI, qui en paieront le prix fort. Les femmes qui travaillent dans ces secteurs seront durement impactées par ces coupes budgétaires, en particulier dans les emplois les plus précaires où elles sont majoritaires en tant qu’infirmières, sages-femmes, ATSEM ou encore AESH.

Une offensive patriarcale contre le droit à disposer de nos corps

Simultanément, pas un mois ne passe sans une nouvelle polémique LGBTI-phobe de la droite et de l’extrême droite. Dernière en date : une campagne transphobe contre le Planning Familial impulsée par l’extrême droite et reprise par les pseudo-féministes transphobes. Le gouvernement Macron n’est pas en reste. Il alimente et entretient ce climat nauséabond, avec par exemple les sorties homophobes de la ministre Caroline Cayeux ou en recevant à l’Assemblée nationale les militantes "femellistes" Dora Moutot et Marguerite Stern suite à leur tribune ouvertement transphobe.

Cette virulence que se permet l’extrême droite, et la complicité du gouvernement qui les alimente de la main droite pendant qu’il prépare son offensive contre les travailleurs.euses et les classes populaires de la main gauche, est particulièrement alarmante au vu de la situation aux Etats-Unis. Après des mois d’attaques des Républicains sur les droits trans, c’est le droit à l’avortement qui est interdit ou menacé dans tous les Etats.

Ces différentes attaques contre le droit à disposer de son propre corps sont liées : le document de la Cour Suprême qui faisait part de la volonté d’abroger l’arrêt Roe v. Wade (qui protège le droit à l’avortement) indiquait que certains juges voulaient aller encore plus loin et attaquer les bases légales du mariage homosexuel ou la légalisation de la "sodomie" (c’est à dire l’arrêt de la criminalisation effective de l’homosexualité). Cette offensive crée également un précédent juridique pour attaquer également d’autres droits reproductifs, comme l’accès à la contraception.

Or, face à ces attaques sur le droit à disposer de son corps, la seule chose que propose la gauche institutionnelle et le parti de Biden est d’attendre patiemment les élections de mi-mandat et de voter démocrates. Les mêmes démocrates qui sont au pouvoir actuellement et détiennent la majorité parlementaire, mais que l’interdiction effective de l’avortement dans plus de la moitié des États du pays n’a pas fait bouger.

Pourtant, des militant.es qui refusent d’attendre les bras croisés les élections de mi-mandat face à l’urgence de la situation. Après les marches radicales qui avaient réuni plusieurs milliers de personnes avant l’été, on peut citer des étudiant.es qui viennent de s’organiser en réseau national au travers des Etats-Unis avec le Graduate Students Action Network pour défendre le droit à disposer de son corps. Mais aussi des livreurs.euses d’UPS d’une section syndicale locale de New York qui ont déjà commencé la bataille dans la rue et dans leur syndicat pour qu’il porte ces revendications nationalement.

Au-delà des symboles, un programme d’urgence pour un droit effectif à disposer de nos corps

Aux Etats-Unis, le parti démocrate se sert de l’avortement comme d’un levier à chaque cycle électoral - parfois en en faisant une question primordiale lorsqu’il craint de perdre le soutien de sa base de gauche, d’autres fois en l’oubliant pour attirer des électeurs plus modérés. En France, le gouvernement Macron cherche quant à lui à regagner en légitimité en promettant la constitutionnalisation de l’IVG. Une mesure plébiscitée par la gauche institutionnelle également, à qui Macron cherche à couper l’herbe sous le pied, mais qui est bien loin d’offrir les conditions nécessaires à un véritable accès à l’avortement en France.

En effet, le débat sur la constitutionnalisation tend à masquer la réalité de l’avortement en France, où il est encore loin d’être un droit effectif. D’abord, il existe encore une double clause de conscience pour les professionnels de santé qui constitue un obstacle majeur à l’accès à cette pratique, notamment en zone rurale et dans les quartiers les plus pauvres où il y a beaucoup moins de médecins par habitants. Ensuite, si l’allongement du délai légal à 14 semaines n’est entré en vigueur qu’en mars de cette année après de nombreuses années à être refusé au Parlement, il est aujourd’hui très difficile à mettre en place dans la plupart des centres en raison du manque de moyens.

A cela s’ajoute en effet le démantèlement des services publics et les attaques néolibérales constantes que subissent les hôpitaux et même les centres d’IVG depuis des décennies. Un rapport des ARS soulignait en 2019 que 8% des centres IVG avaient fermé en 2019, suscitant d’importantes inégalités territoriales pour accéder à l’IVG. De même, le problème des délais conduit 3000 à 5000 femmes à aller avorter à l’étranger chaque année. Une pratique réservée aux femmes qui ont les moyens, contraignant les femmes les plus précaires ou sans-papiers à avorter clandestinement, mettant leur vie en danger.

Cela montre qu’il ne suffit pas d’exiger l’inscription du droit à un accès à l’avortement dans la constitution, mais qu’il faut se battre en France pour le droit à disposer de son corps, à commencer par :

● le droit effectif à l’avortement libre, sûr, gratuit, sur demande et sans justification ;

● la PMA effective pour toutes et tous ;

● l’accès libre et gratuit aux mesures de transitions dans des conditions médicales et sociales dignes.

Surtout, il s’agit de rendre possible l’application de l’ensemble de ces droits dans la pratique pour l’ensemble de la population. Pour cela, il nous faut un programme d’urgence

● Les salaires doivent être augmentés de minimum 300 euros et indexés sur l’inflation, pour pouvoir faire face à l’augmentation des prix ;

● La régularisation des tous.tes les sans-papiers, l’accueil inconditionnel et sans distinction de nationalité de toutes les personnes migrantes ainsi que l’accès gratuit à tous les services de soins et d’éducation

● Des moyens massifs doivent être alloués aux services publics, en premier lieu aux services de santé et de l’éducation, et pas à la police ni à l’armée qui répriment nos luttes en France et à l’étranger ;

● Les services de santé publics et privés doivent être unifiés et entièrement nationalisés sous contrôle des soignants, pour que nos vies ne dépendent plus du profit des grandes entreprises et puissent être prises en charge par les travailleur.ses qui connaissent nos besoins et savent y répondre.

La nécessité d’une réponse féministe sur le terrain de la lutte de classes

Un tel programme ne peut être imposé que si nous parvenons à mettre en échec les plans du gouvernement et du grand patronat, en paralysant l’économie et en prenant nos affaires en main. Aux Etats-Unis les Démocrates, et en France la gauche institutionnelle, s’attellent à nous faire penser que notre force se résume à mettre un bulletin dans l’urne.

Mais les vagues de grève en Allemagne ou au Royaume-Uni contre l’inflation nous montrent la force potentielle de la classe ouvrière face aux attaques patronales et gouvernementales, tandis que la Generation U aux Etats-Unis, une nouvelle génération de jeunes précaires en grande partie LGBTI qui est à l’avant-garde de la lutte pour la syndicalisation et l’amélioration des conditions de travail, nous montre que la lutte contre les oppressions et la lutte contre l’exploitation sont liées.

Une alliance nécessaire qu’exprime aussi une syndicaliste d’UPS aux Etats-Unis qui se bat pour le droit à disposer de son corps : « Les conséquences de cet arrêt [Roe v. Wade] vont toutefois bien au-delà de la seule autonomie corporelle des femmes. La Cour suprême a cité [une décision anti-syndicale de 2015] pour justifier l’annulation de droits existants, et a signalé son intention d’éroder davantage les libertés civiles comme le droit à la contraception et au mariage homosexuel. Nous nous trompons nous-mêmes si nous ne pensons pas qu’ils s’en prendront ensuite aux droits fondamentaux des travailleurs ».

Dans le combat pour le droit à disposer de nos corps, nos alliés ne sont ni Biden ni Macron mais les grévistes des Etats-Unis, d’Angleterre, d’Allemagne… Et tous.tes les travailleurs.ses qui se préparent à exprimer leur colère en France en septembre : le 22 dans le secteur de la santé ou le 29 tous secteurs confondus. En lien avec ces mobilisations, il est nécessaire de s’organiser sur nos lieux de travail et d’études pour la journée internationale pour le droit à l’avortement du 28 septembre en étendant le mot d’ordre au droit à disposer de nos corps, et notamment aux revendications relatives aux droits des personnes trans. Alors que de violentes attaques sont à venir, il s’agit de commencer à créer ces alliances pour construire un mouvement féministe à même d’imposer des augmentations de salaires et des moyens massifs pour les services publics, qui sont nécessaires pour un droit effectif à disposer de nos corps.


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