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Harvey Weinstein inculpé pour deux nouvelles agressions le jour de l’ouverture de son procès

Le jour-même de l’ouverture du procès tant attendu d’Harvey Weinstein ce lundi à New York, l’ex-magnat de l’industrie d’Hollywood est inculpé à Los Angeles suite à deux nouvelles accusations d’agressions sexuelles.

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Crédits photo : AFP/Stephanie Keith

Un procès longuement attendu

Plus de deux ans se sont écoulés depuis les révélations du New York Times concernant les agressions sexuelles commises pendant une trentaine d’années par le producteur Harvey Weinstein et couvertes notamment par ses différentes entreprises (Miramax, Weinstein Company) au travers d’arrangement financiers pour acheter les silence des victimes. Suite à cette publication, plus de 80 femmes plus ou moins connues ou anonymes ont pris la parole et/ou porté plainte concernant des violences et harcèlements perpétrés par ce même agresseur. Parmi elles, Asia Argento, Angelina Joly, Gwyneth Paltrow, Rose McGowan, Eva Green, Rosanna Arquette, Léa Seydoux ou encore Cara Delevingne comptent parmi les plus célèbres.

C’est de ce scandale qu’est né le mouvement #MeToo, dont des milliers de femmes se sont saisies sur les réseaux sociaux puis dans la rue, révélant l’ampleur du harcèlement et des violences sexistes et sexuelles infligées par des hommes aux femmes et aux minorités de genre dans toutes les sphères de la société. Suite à une importante libération de la parole, le mouvement #MeToo et sa version française #BalanceTonPorc ont donné lieu à un profond renouvellement du mouvement féministe à l’échelle internationale. De ce fait, le procès Weinstein revêt aujourd’hui une grande importance pour de nombreuses victimes et pour l’ensemble des femmes qui se sont politisées sur ces questions. 

Alors que plusieurs dizaines de femmes se sont signalées comme victimes, le procès longuement attendu ne porte que sur deux accusations. En effet, les autres plaintes pour des faits qui se seraient également déroulés à New York ont été jugées trop anciennes pour faire l’objet d’un procès. Plusieurs victimes sont également tenues de ne pas témoigner suite à des arrangements financiers conclus avant et après l’affaire avec Weinstein et sa clique. D’après Le Point, ces derniers ont récemment négocié un accord visant à allouer 25 millions de dollars - pour régler le conflit « à l’amiable », soit acheter le silence - aux dizaines de femmes qui ont lancé une action en justice contre leur agresseur, ce qui peut lui permettre de ne pas reconnaitre ses torts les concernant.

Le procès qui est ouvert à New York concerne donc uniquement le viol en 2013 d’une femme, restée anonyme, dans un hotel à Manhattan ainsi que l’agression en 2006 de Mimi Hayeli qui était alors assistante de production. Quatre autres femmes dont les plaintes sont jugées trop anciennes sont également autorisées à venir témoigner lors du procès. Si les accusations de violences sexistes et sexuelles sont toujours difficiles à prouver en raison du manque de preuves aux yeux de la loi en particulier dans des situations de telle asymétrie de pouvoir, la défense de Weinstein qui n’hésite pas à se dépeindre comme un grand défenseur de la cause féministe va consister à démontrer que les rapports sexuels auraient chaque fois été consentis. L’issue du procès, qui devrait durer environ deux mois s’il n’est pas reporté, est donc relativement incertaine.

Le jour de son procès, Weinstein inculpé à Los Angeles pour deux nouvelles accusations

Alors que le procès de Weinstein s’ouvre, ce dernier est inculpé pour deux nouvelles accusations, cette fois en Californie d’après le Figaro : en 2013, il aurait violé une actrice et mannequin italienne près avoir forcé la porte de sa chambre d’hôtel et agressé sexuellement le lendemain même une autre femme dans un autre hôtel. Si la condamnation de cet homme d’affaire tout puissant est loin d’être garantie par la justice bourgeoise, il semble qu’il ne soit pas près de sortir de la tourmente.

Cela dit, cette affaire montre bien le régime d’impunité dont bénéficient comme toujours les puissants de ce monde, au moins pour un temps, même dans un climat de contestation largement médiatisé. Le délai entre les faits qui auraient été commis, pourtant dénoncés à plusieurs reprises et étouffés avant l’explosion du scandale, et leur prise en charge partielle par la justice révèle le caractère structurel de l’oppression patriarcale, qui dans cette affaire traverse non seulement le milieu du cinéma mais également les institutions judiciaires. En 2015, à titre d’exemple, la police a reçu un enregistrement où l’on entend Weinstein reconnaissant avoir attouché sexuellement la mannequin italienne Ambra Battilana Gutierrez et faisant pression sur elle. Weinstein aurait pu être arrêté à ce moment là si le procureur de Manhattan, Cyril Vance – connu pour avoir abandonné les poursuites contre DSK – n’avait pas décidé de ne finalement pas le poursuivre.

De ce fait, bien que le combat pour la condamnation de Weinstein soit légitime et nécessaire pour les victimes et du point de vue des enjeux féministes qu’il soulève, il serait illusoire d’attendre de la justice bourgeoise - qu’elle soit américaine ou française ou autre - une quelconque forme de justice sociale. Comme nous l’écrivions dans un article plus théorique sur la question de la justice, même si cette affaire permet de visibiliser les violences dont sont structurellement victimes les femmes : « le système pénal se base sur l’attribution de responsabilités individuelles à la cause des dommages. Par conséquent, de ce point de vue, l’oppression sexuelle ou de genre ne peut pas constituer un dommage ou un délit passible d’être puni par le droit pénal. Judiciariser l’oppression patriarcale a restreint sa définition, limitant les portées de la punition à une série de conduites incriminées aux quelques individus rendus responsables, isolément ». La fin de ces violences ne sera pas actée par les institutions qui les génèrent et les nourrissent en première instance, en protégeant les Weinstein et autres Polanski pendant que d’autres, bien plus nombreux et nombreuses, croupissent en prison pour bien moins que cela.


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