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Plan de bataille

Grève reconductible : les raffineurs proposent un plan de bataille, l’intersyndicale doit suivre !

La branche pétrole de la CGT propose aux raffineurs un plan de bataille pour aller crescendo jusqu’à la grève reconductible. A quelques jours du 19 janvier, l’intersyndicale doit se saisir de ce calendrier pour construire le combat contre la réforme des retraites.

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Rarement une réforme aura été aussi peu soutenue par la population. Selon un récent sondage, 93% des actifs rejetteraient la réforme de Macron visant à repousser l’âge de départ à la retraite. Mais comme le dit le porte-parole du gouvernement Olivier Véran : « ce n’est pas parce qu’une réforme est impopulaire qu’il ne faut pas la faire ». Autrement dit, il ne suffira pas d’être massivement contre la réforme, il faudra leur faire retirer de force.

Une unité syndicale inédite depuis 12 ans… mais avec quelle stratégie ?

C’est ce rejet massif qui est à la base de l’unité syndicale que l’on observe aujourd’hui, dont on peut être surpris qu’elle aille jusqu’au secrétaire de la CFDT Laurent Berger, qui combattait farouchement la grève des raffineurs il y a quelques mois ou celle des contrôleurs il y a quelques semaines. Une unité au niveau confédéral qu’on n’avait « pas vue depuis 12 ans » comme le rappellent les dirigeants syndicaux en se référant au mouvement de 2010, déjà contre un report de l’âge de départ en retraite.

Ceux-ci ont annoncé le 10 janvier au soir, c’est-à-dire juste après les annonces d’Elisabeth Borne, une « première journée de mobilisation le 19 janvier » dans un communiqué signé par les huit syndicats représentatifs du pays : CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, UNSA, Solidaires, FSU. Il est important que cette première journée de grève et manifestation soit massive et combative pour qu’elle traduise la colère large qui existe actuellement.

Mais on sait qu’une journée ne suffira pas, pas plus que plusieurs journées d’action isolées les unes des autres. Or, en 2010 ou même en 2016, contre la loi Travail (une lutte sans la CFDT ici), c’est cette stratégie qui s’était imposée. Une stratégie d’addition de journées d’action espacées les unes des autres, que les dirigeants syndicaux appelaient des « temps forts » mais que ceux qui critiquaient cette modalité ont rapidement surnommé journées « saute-mouton ».

Le plan de bataille des raffineurs doit être le plan de tous

Sans attendre le soir du 19 pour ébaucher un plan de bataille, les raffineurs de la CGT-Pétrole ont proposé dans la foulée de l’intersyndicale un plan de bataille qui s’écarte de cette routine. Celui-ci est organisé en trois temps, 24h de grève le 19, 48h le 26 janvier, et 72h de grève à partir du 6 février, « date à laquelle il sera proposé aux salariés la grève reconductible » et l’arrêt des installations.

Le mouvement de grève d’octobre pour les salaires aura montré au pays la force que représente un bastion du mouvement ouvrier comme les raffineurs, mais également les possibilités qu’ouvre un mouvement reconductible en termes de rapport de forces. Dans le même temps, les raffineurs ont déjà fait savoir qu’ils n’entendaient pas se battre seuls, isolés des autres secteurs, et que le but n’est pas d’installer une « grève par procuration ». « On tire les leçons du passé, de la réforme des retraites de 2010, et on a besoin d’un élargissement du rapport de force » explique ainsi Benjamin Tange de la CGT Total

Justement, ce plan apparaît comme un point d’appui pour l’ensemble du mouvement ouvrier. En convoquant la question stratégique de la reconductible, les raffineurs montrent la voie pour gagner face au gouvernement. D’ailleurs, d’autres fédérations ont exprimé l’envie d’un plan combatif, à l’image de la fédération CGT de l’énergie évoquant elle aussi la nécessité de la reconductible sans en préciser les modalités.

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Les directions confédérales doivent suivre le plan des raffineurs !

En revanche, les dirigeants confédéraux, eux, sont restés bien silencieux jusqu’ici. Interrogé à ce propos, Laurent Berger a seulement déclaré que « la CFDT du pétrole n’a pas appelé à bloquer les raffineries pour l’instant ». Avec un tel état d’esprit et les prises de position qui ont été les siennes contre la grève d’octobre, on peut s’attendre à ce que le patron de la CFDT ne veuille pas suivre un plan combattif, encore moins s’il émane des raffineurs.

Du côté de la direction confédérale de la CGT, la question du plan de bataille en reconductible reste toute aussi invisible. Alors que le plan des raffineurs émane d’un secteur oppositionnel au sein de la CGT (la Fédération de la Chimie) il est d’ailleurs peu probable que celui-ci ait les faveurs de la direction, et ce d’autant plus à quelques semaines du 53e congrès confédéral qui verra s’affronter différents candidats à la succession de Philippe Martinez.

Avec une intersyndicale sur laquelle pèse fortement la CFDT, et dont le communiqué commun ne mentionne même pas le retrait de la réforme à ce stade, il est ainsi tout à fait probable que le plan se limite finalement à des journées isolées, tout en permettant à chacun de « soutenir toutes les initiatives » ou « encourager tous les mouvements » comme l’a expliqué Catherine Perret, la secrétaire confédérale CGT en charge des retraites. Une posture qui ne mange pas de pain, mais ne construit pas une stratégie pour gagner.

A l’inverse de cette perspective, nous devons donc exiger des directions de nos syndicats qu’ils établissent un plan pour gagner et prennent position pour la construction de la grève reconductible. Un tel plan doit s’appuyer sur les dates que les raffineurs ont placé dans le paysage pour bâtir la reconductible. L’intersyndicale doit donc appeler à les rejoindre, et se mettre dans les pas d’un secteur qui peut jouer un rôle moteur pour battre le gouvernement.

Comment mener à bien ce plan ? Auto-organisation et unité de notre classe

Pour unifier les différents secteurs de notre classe autour d’une telle stratégie, discuter des dates ne suffit pas. D’abord, la construction d’un tel plan devrait mettre au centre la question de l’auto-organisation, pour que la grève appartienne aux grévistes, en développant au maximum de vraies assemblées générales décisionnaires et en les coordonnant entre elles partout où c’est possible. C’est dans la chaleur de ces assemblées que notre classe pourra se saisir du plan de lutte et briser les obstacles à la construction d’un mouvement dur.

Mais la question du programme de la grève sera également décisive. Pour unifier notre classe dans la bataille, il faut en effet des objectifs qui s’adressent à l’ensemble des secteurs, y compris les plus précaires. En partant évidemment du rejet pur et simple de la réforme, un programme permettant d’unifier les colères devrait revendiquer un objectif valant la peine de se battre, comme l’obtention de l’âge de départ à 60 ans, 55 ans pour les métiers pénibles, et un retour aux 37,5 annuités qui avaient cours avant la réforme Balladur de 1993.

Dans le même temps, pour entraîner non seulement les secteurs qui ont montré leur force dans les grèves de 2016 à 2020, mais aussi ceux qui ont fait leurs premières grèves au moment du Covid et de l’inflation, il sera central de lier la question des retraites à celle des salaires. L’inflation se maintient à un rythme élevé et provoquera d’autres grèves salariales qui rendent toujours actuels les mots d’ordre d’augmentation des salaires et leur indexation sur l’inflation.

L’ensemble de ces éléments permettrait de commencer à construire une véritable grève générale politique contre le gouvernement. La réforme des retraites est devenue la mère de toutes les attaques pour Macron, faisons de la bataille des retraites la mère de toutes les contre-offensives ! C’est en tout cas dans cette direction qu’il faut tirer si nous voulons non seulement résister, mais surtout gagner contre Macron et sa réforme. Et il faut le faire entendre aux directions du mouvement ouvrier.


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Gaëtan Gracia, CGT Ateliers de Haute-Garonne

Militant à la CGT Ateliers Haute-Garonne
Twitter : @GaetanGracia

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