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Interview d’Anasse, délégué de SUD-Rail Paris-Nord

Grève à la SNCF vendredi : « des centaines d’emplois devraient être créés, pas supprimés »

Les cheminots de Paris-Nord appellent à la grève : « Pour nous, ce sont des centaines d’emplois qui devraient être créés et non supprimés, des centaines de millions d’euros qui devraient être dépensés dans la maintenance des voies, l’achat de rames, de nouveau matériel, et la rénovation des gares ». Un rassemblement avec des cheminots de tous les corps de métiers, de différents secteurs et régions, ainsi que leurs soutiens, aura lieu vendredi 16 décembre à 9h45 à Gare du Nord, voie 19. Propos recueillis par Mar Martin

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Révolution Permanente : Que se passe-t-il vendredi prochain ?

Anasse : Suite à un projet national qui est décliné sur différentes régions et plus particulièrement sur la région Ile de France, le syndicat de SUD-Rail Paris-Nord et la CGT organisent un rassemblement vendredi 16/12 à partir de 9h45 voie 19 à Gare du Nord, pour faire un départ groupé afin d’envahir la réunion du comité d’entreprise qui se tiendra ce jour-là.

RP : Pourquoi Sud Rail a déposé un préavis de grève sur toute la région ?

A. : Il était important que Sud Rail marque cette journée sous couvert d’un préavis de grève afin que l’ensemble des cheminots prennent conscience de l’attaque multi-métiers qu’est en train d’organiser la SNCF. Le but n’étant pas d’être sur un objectif de reconduction du mouvement mais de faire grève afin de se rassembler tous ce jour-là, pour dénoncer les attaques que les cheminots vont subir avec ces réorganisations au programme.

C’est un appel à l’ensemble des cheminots, même s’ils sont en congés ou en repos, à converger à ce rassemblement. Le plus important est d’installer le meilleur rapport de force possible, au-delà du seul pourcentage de grévistes. Nous invitons également l’ensemble des usagers solidaires des cheminots qui sont les premiers impactés par toutes ces réorganisations que va apporter le passage du service public au privé. Comme on le voit ailleurs, dans la santé, l’énergie, à La Poste, etc.

RP : Peux-tu nous expliquer en quoi consiste les réorganisations ?

A. : La SNCF est en train d’attaquer de tous les côtés. Ce sont différents métiers en charge des voyageurs (contrôleurs, maintenance des voies, conducteurs, FRET, circulation, etc) qui sont visés. Elle qualifie ces projets de toutes sortes de noms : « Proxilien » pour les guichets, les « EAS » et « ANS » pour les contrôles et la conduite, les « Commandes centralisées régionales (CCR) » pour les aiguilleurs, et planifie également des suppressions d’emplois dans les technicentres.

SUD-Rail dénonce toutes ces suppressions d’emplois que l’entreprise préfère appeler « réorganisations ». Pour notre syndicat, celles-ci n’apporteront rien du point de vue de la régularité des trains, du confort des voyageurs, des fréquences de circulation, etc. Ces réorganisations sont la conséquence directe de la réforme du ferroviaire qu’on a dénoncé et contre laquelle on s’est battu en 2014. Cette réforme demande à la SNCF de faire des gains de productivité sur le personnel afin de préparer le passage du ferroviaire au privé. Pour la région Paris Nord ce sont des centaines d’emplois sur la totalité des métiers qui sont menacés. Sud Rail dénonce ces projets car derrière, ce que nous craignons pour les cheminots, ce sont ces réorganisations qui préparent un passage clef en main des établissements du public vers le privé, et qui menacent le statut des cheminots, leurs acquis comme par exemple le régime spécial de retraite, au profit d’un passage à la sécurité sociale avec un rallongement du départ à la retraite, etc.

On voit aujourd’hui que la SNCF prépare sa propre concurrence avec sa filiale Trans-Kéo (Kéolis), qui a déjà récupéré la future ligne Tram-Train qui circulera en 2017 d’Argenteuil jusqu’à Noisy. Cette même filiale récupèrera le tram T4 qui appartient aujourd’hui à Transilien, entre Bondy et Aulnay-sous-Bois. Notre crainte, c’est que demain la SNCF fasse basculer les lignes RER vers sa filiale de droit-privé Trans-Kéo avec l’intégralité des agents qui seront sur ces lignes-là. Nous l’avons vu depuis 2010 déjà au FRET avec la récupération des marchés par la filiale privée de la SNCF « VFLI », qui a contribué à la suppression de centaines d’emplois chez les agents du FRET. C’est pour ces raisons qu’au printemps 2016, les cheminots étaient massivement mobilisés contre la loi El Khomri, et également pour un décret SOCLE à hauteur de la règlementation du travail à la SNCF, ce qui aurait empêché ce passage à la concurrence. Car les cheminots doivent comprendre que lors du passage au privé, la règlementation du travail sera le décret SOCLE et non l’accord d’entreprise. La loi El Khomri, dont on disait qu’elle ne concernerait pas les cheminots, nous touchera en réalité de plein fouet avec l’inversion de la hiérarchie des normes, la facilitation des plans sociaux et l’augmentation du temps de travail.

RP : Qu’est-ce que t’inspires tous ces projets aujourd’hui ?

A. : Au lendemain de la COP 21, de l’accident de Brétigny qui a fait des dizaines de blessés et plusieurs morts, des incidents sur les caténaires qui ont paralysé le réseau en début de semaine, nous voyons que la SNCF est en train de mener une politique schizophrène. Il y a une volonté de laisser pourrir les choses, de profiter du mécontent de nos usagers pour pousser au passage à la concurrence, du public vers le privé. Pour nous, ce sont des centaines d’emplois qui devraient être créés et non supprimés, des centaines de millions d’euros qui devraient être dépensés dans la maintenance des voies, l’achat de rames, de nouveau matériel, et la rénovation des gares. Et non pas le choix de la facilité qui consiste à supprimer des lignes, et à les faire passer sur les autocars. On ne peut pas tolérer, en tant que cheminots et être-humains, de laisser faire une politique qui vise à mettre un pansement sur une jambe de bois avec la circulation alternée, avec l’augmentation des chauffeurs Uber, des autocars, des camions sur la route, qui impacte le réchauffement climatique, tandis que des trains qui ne polluent pas sont laissés au dépôt, et avec eux, des familles de cheminots dans la précarité, et des usagers qui devront habiter à proximité de leur travail faute de moyens de transports accessibles et sécurisés. Que fait l’Etat ? Que devient le grenelle de l’environnement ? Que devient la COP 21 ? Il faut absolument que cette journée de grève nous permette de marquer le coup et faire un premier pas, mais on ne peut pas en rester là. Il est évident que les attaques pleuvent de partout et qu’on ne pourra pas contrer les plans de la direction de la SNCF en faisant grève chacun son tour, un jour à Paris Nord, le lendemain à Périgueux, le jour d’après à Paris Est ou encore à Strasbourg, etc. Il faut qu’on commence à se préparer pour exiger et organiser une grève nationale, coordonnée et qui commence à poser les bases pour faire reculer définitivement la direction et lui faire avaler ses projets.

Pour tous les cheminots et leurs soutiens : Rassemblement vendredi 16/12 à 9h45 à Gare du Nord devant la voie 19


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