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Education Nationale

Gestion sanitaire catastrophique : les enseignants en grève dans plusieurs lycées franciliens

Depuis quelques jours, les débrayages se multiplient dans les collèges et lycées pour demander plus de moyens et des conditions sanitaires viables pour accueillir les élèves. Avec l’allègement des protocoles sanitaires la colère des personnels de l'Education Nationale semble s’étendre et s’intensifier.

Violette Renée

23 septembre 2020

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Crédits photo : Le Parisien

Retour a l’anormal et conditions sanitaires inacceptables pour préserver la « garderie du MEDEF »

Depuis la rentrée, les personnels de l’Education Nationale font face à des conditions sanitaires difficiles avec l’impossibilité de maintenir les distanciations sociales, l’absence de distribution de masques gratuites, et le manque de moyens même minimums. Une situation face à laquelle le gouvernement a choisi… d’assouplir les protocoles.

La semaine dernière, après l’allègement des protocoles sanitaires en entreprise en juin dernier sous la pression du patronat, les établissements scolaires du premier degré se voyaient à leur tour soumis à un allègement des règles de sécurité sanitaire. «  La priorité ce sont des gardes d’enfants pour que les parents puissent continuer à travailler  » avait annoncé vendredi 4 septembre Elisabeth Borne, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, sur France Info, et c’est cette priorité que le gouvernement entend défendre.

Jusqu’alors, lorsqu’un élève était testé positif la classe devait être fermée par l’ARS. Cette gestion par l’ARS était déjà problématique puisqu’elle donnait à celle-ci, en lien avec la DSDEN, le contrôle sur la possibilité de fermer ou non et le choix des personnes soumises à l’isolement, là où celui-ci devrait incomber aux personnels de terrain plus à même de savoir qui a pu être contaminé. En outre, les décisions n’étaient pas toujours appliquées. Or, depuis le 22 septembre il faut désormais faire comme si de rien n’était et attendre que trois cas soient testés positifs. Des protocoles allégés mais dont la mise en œuvre reste par ailleurs toujours opaque, avec des décisions arbitraires que dénoncent les personnels de l’éducation et qui inquiètent élèves et parents.

Bien que cet allègement ne concerne que les enfants de maternelle et primaire, des témoignages d’AED dans le supérieur vont dans le même sens : « on nous demande de ne pas communiquer les cas de contamination ! », ainsi que des témoignages de professeurs comme sur la page du collectif Les Stylos Rouges où une institutrice a été testé positive au Covid et ainsi a mis sa famille en cas contact… mais pas ses collègues avec lesquels elle a pourtant eu des contacts soutenus.

Des conditions de travail qui se dégradent donc alors même que depuis plusieurs années les professeurs dénoncent des conditions matérielles et psychologiques de plus en plus précaires sur leur lieu de travail, comme en a témoigné le suicide de Christine Renon dont le triste anniversaire fera l’objet d’une marche contre l’oubli samedi.

Face au manque de moyens, les enseignants se mobilisent

Face à cette situation, plusieurs établissements ont décidé de se mobiliser au travers de débrayages en utilisant le droit de retrait (souvent retoqués par l’administration) voire, plus récemment, par la grève. Dans le Val d’Oise les grèves ont débuté dès la rentrée : les professeurs du collège Voltaire de Sarcelles comme les enseignants du lycée Simone-de-Beauvoir de Garges-les-Gonesse ont lancé une grève reconductible dès le 31 août, ce qui a retardé la rentrée des élèves le jeudi et vendredi afin de dénoncer les sureffectifs et le manque de moyens. En l’absence de réaction de la rue de Grenelle, une trentaine de professeurs et de parents d’élèves avaient alors poursuivis le mouvement de grève la semaine suivante devant le ministère de l’Éducation nationale avec un message clair : «  on veut plus de moyens ».

A Bondy en Seine-St-Denis, 34 professeurs sur les 35 du collège Brossolette ont voté la grève mardi 22 septembre pour dénoncer l’impossibilité de respecter les règles sanitaires. Des professeurs interviewés par Le Parisien témoignaient ainsi hier : « Certains élèves avouent qu’ils portent le même masque depuis le déconfinement. Or, le même masque porté deux jours ne sert à rien, a fortiori si on l’a lavé 150 fois ». D’autres racontent que par manque de personnel, ce sont les professeurs eux-mêmes qui ont dû peindre les marquages destinées au respect des distanciations sociales pour les élève. En réaction, dans un courrier adressé au président du département, les travailleurs demandent la « nomination immédiate et durable d’agents de service ».

Dans le même sens, toujours dans la cité scolaire de Bondy, Jérôme Martin, professeur d’histoire-géographie au lycée Renoir et délégué FO résumé les revendications pour RTL : « ce qu’on demande, c’est du renfort humain pour que les collègues agents puissent travailler dans des conditions satisfaisantes ».

A Verson en Normandie le collège Jacques Prévert connaît lui aussi une grève très suivie depuis mardi, avec 3 enseignants sur 4 en grève. Les personnels revendiquent l’ouverture de classes supplémentaires ainsi que l’embauche de personnels administratifs. Christophe Bel, professeur documentaliste au collège témoigne en ce sens pour l’Actu « Actuellement nous avons 655 élèves soit 44 de plus que l’an dernier mais nos moyens sont restés les mêmes. Nous nous retrouvons avec des classes de 29 élèves en 5e et 4e ». Des conditions déjà intenables hors période épidémique et qui sont aggravées par la crise sanitaire.

A Argenteuil, au Lycée Jean Jaurès, une grève a également eu lieu, racontée dans cette publication Facebook :

A Chennevières-sur-Marne dans le collège Molière, 81% des professeurs se sont mis en grève dès le mardi matin avec comme objectif de se rassembler devant l’inspection de l’académie rapporte 94.Citoyens. Les personnels (AED ou enseignants) dénoncent eux aussi des classes surchargées pour 94.citoyens : « Depuis la rentrée, nous avons dû accueillir 5 élèves supplémentaires, en 4ème et en 3ème, et nous arrivons désormais à 31 élèves en 3ème ». Mais aussi un manque cruel de personnel pour faire face au surplus de travail lié à l’épidémie :« De 11h30 jusqu’à 14h, tous les surveillants sont mobilisés pour gérer le passage des élèves à la cantine (4 services au lieu des 2 habituels pour limiter le brassage), pour désinfecter les tables entre chaque passage et pour surveiller la cour de récréation. Aucun ne peut donc circuler dans les couloirs pour vérifier que tout se passe bien aux intercours ni être présent à la vie scolaire : la sécurité des élèves n’est donc pas assurée ».

Au Lycée Jacques Feyder à Épinay sur Seine, une vingtaine de professeurs ont débrayé à 10h lundi 21 pour protester contre les conditions de travail de tous les personnels : agents, élèves enseignants. Dans cet établissement les élèves sont en effet accueillis dans des préfabriqués et les personnels ont dénoncé des conditions déplorables, où les élèves n’ont même pas de cours et s’entassent dans les escaliers pour passer leur récréation. Une lettre pour la Région a été rédigée. Et la liste est encore longue : le collège Cap-de-Gascogne à St-Seveur, le collège Plaisance à Créteil, le collège les Escholiers à Montpellier, le collège Descartes à Antony, etc…

La grève, seul moyen pour imposer des mesures sanitaires à la hauteur et faire face a la destruction orchestrée de l’éducation publique !

Face au silence que souhaite imposer le gouvernement devant la situation sanitaire qui se dégrade et son incapacité à la gérer la crise quand son objectif principal est l’ouverture pérenne des établissements scolaires, la grève reste le moyen le plus efficace pour monter un rapport de force et obtenir enfin des moyens sanitaires à la hauteur. A rebours de ces demandes minimales et vitales, l’initiation et la coordination de ces grèves, tel que cherchent à l’impulser, par exemple, les professeurs du lycée Jean Renoir de Bondy a la fin de leur communiqué.

En effet, l’extension de ces phénomènes et leur coordination permettrait d’imposer un rapport de force face au gouvernement et à la destruction orchestrée, à coups de grandes réformes, de l’Education Nationale, alors que le silence complice et l’absence de plan de bataille de la part des directions syndicales se fait chaque jour un peu plus ressentir. Il y a également urgence à arracher de moyens supplémentaires pour l’éducation en même temps que le refus de donner un centime à la police qui démontre une gestion autoritaire et non sanitaire de la crise ainsi qu’au patronat qui vient de récolter des milliards et des milliards sous forme d’aides publiques directes à travers les différents plans de relance Macron tout en licenciant a tour de bras.

Si l’école n’était pas uniquement considérée comme la garderie du MEDEF, un protocole à la hauteur et réaliste est relativement simple à mettre en place comme nous l’écrivions : « des solutions existent pour lesquelles nous nous battons : la gratuité des masques pour tous, élèves comme enseignants, la réduction des effectifs dans les classes, l’embauche massive de professeurs pour répondre aux besoins urgents en matière d’éducation, la rénovation des établissements les plus vétustes et l’augmentation du nombre de salles de classe dans les établissements ».


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