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Ségrégation sanitaire

Gestion capitaliste de la pandémie. Amnesty dénonce le monopole occidental sur les vaccins

Des conséquences sont criminelles, avec un taux de mortalité exponentiel dans les régions touchées par ces inégalités d’accès aux vaccins. Devant un tel constat, c’est le capitalisme et ses logiques concurrentielles criminelles et de propriété privée qui doivent être remis en question.

Violette Renée

7 avril 2021

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Crédits photo : Simon Wohlfahrt / AFP

Le rapport d’Amnesty International 2020/2021 donne des chiffres sur l’inégalité d’accès aux vaccins entre les pays riches et les pays pauvres. La moitié des doses administrées dans le monde l’ont été auprès de 16% de la population mondiale (les pays au « revenu élevé » selon la Banque Mondiale). Quand seulement 0,1% des doses ont été administrées au 9% de l’humanité la plus pauvre (pays à « faible revenu »). Et pour cause, « plus de 90 pays ont adopté des restrictions à l’exportation touchant des articles tels que des fournitures médicales, des équipements de protection individuelle et des produits pharmaceutiques ou alimentaires » explicite le rapport. Un rapport OXFAM de décembre 2020 montre lui que dans les conditions de concurrence et de brevets qui sont les nôtres «  près de 70 pays pauvres ne pourront vacciner qu’un-e habitant-e sur dix contre la COVID-19 » quand le Canada avait une quantité de doses qui permet de vacciner 5 fois chaque citoyen…

De plus, le rapport révèle également des discriminations politiques à l’accès au vaccin comme c’est le cas en Israël où le régime Netanyahu exclu les cinq millions de palestiniens vivant sur les territoires occupés par l’armée israélienne en Cisjordanie et à Gaza. Cela est aussi visible au travers de discriminations ethniques, religieuses ou relatives à l’orientation sexuelle : « dans de nombreux pays, les minorités ethniques et les populations autochtones présentaient des taux d’infection et de décès disproportionnellement élevés, poursuit le rapport, […] Des personnalités politiques ou religieuses s’en sont prises aux groupes marginalisés, les accusant des répandre le virus  ». Les personnes musulmanes ou assimilés comme telles ont ainsi « été prise à parti dans certains pays d’Asie du Sud-Est  » ; le même sort a été réservé a des personnes LGBTI dans certains pays européens et africains.

Le rapport est accablant sur l’analyse de ses observations, notamment sous la plume d’Agnès Callamard, nouvelle secrétaire générale de l’organisation : « La pandémie a jeté une lumière crue sur l’incapacité du monde à coopérer de manière efficace et équitable. […] Les pays les plus riches ont établi un quasi-monopole sur les approvisionnements en vaccins dans le monde, laissant les pays avec le moins de ressources confrontés aux pires conséquences en matière de santé et de droits humains, et donc aux perturbations économiques et sociales les plus longues  ».

Amnesty appelle en ce sens à « œuvrer immédiatement pour accélérer la production et la livraison de vaccins pour tous : c’est le test le plus fondamental, même rudimentaire, de la capacité du monde à coopérer  ». Dans le même sens, une pétition lancée par People’s Vaccine Alliance a récolté plus qu’un million de signatures, qui appelle à « garantir de toute urgence l’accès aux vaccins, traitements et équipements médicaux anti-Covid vitaux, pour tous, partout dans le monde  ». Par les moyens de la suspension des brevets, du partage libre et ouvert des connaissances scientifiques, ceci éloigné des logiques de profit : « aucune logique de profit ne doit être autorisée pendant cette pandémie  ».

L’impossible coopération sous le régime des brevets, de la propriété privée intellectuelle… et du capitalisme !

Les inégalités et l’accaparement des vaccins par les pays riches est un constat brûlant dans la période. Et, malheureusement, ces phénomènes sont tout à fait « normaux » d’un point du vue du fonctionnement du capitaliste, où les pays sont en concurrence les uns contre les autres. Inévitablement les pays qui ont le plus de ressources, ont davantage accès aux médicaments et autres moyens matérielles nécessaire pour faire face à la crise. Mais même dans une situation de monopole sur les conditions sanitaires matérielles que connaissent les pays développés, la crise est gérée de façon criminelle. Quand l’on voit par exemple les Etats-Unis qui ont atteint le demi million de décès dûs au virus ou la France qui connaît une campagne de vaccination extrêmement lente.

La gestion capitaliste de la crise a fait faillite ; les capitalistes sont responsables de plus de 2,8 millions de morts dans le monde et de 130 millions personnes contaminées dans le monde. Car c’est justement ce fonctionnement concurrentiel par les brevets, qui favorise les intérêts des laboratoires privés, qui a ralenti la gestion de l’épidémie. La coopération des scientifiques à échelle mondiale aurait pu accélérer la découverte de vaccins, tout comme la libre circulation des brevets aurait pu accélérer grandement la vaccination. Aujourd’hui avec la propriété privée intellectuelle, nous sommes incapables de produire des vaccins au plus vite pour faire ralentir la circulation du virus. Au lieu d’agir en ce sens, les gouvernements préfèrent prendre des mesures coercitives et répressives pour faire face à l’épidémie.

Le dispositif COVAX qui avait été mis en place par l’OMS afin « d’assurer un accès équitable à la vaccination contre le Covid-19 dans 200 pays  » a été un coup d’épée dans l’eau par l’absence de la Russie et des États-Unis dans le dispositif, mais aussi par l’accaparement des doses par les pays riches et le refus des laboratoires de partager les brevets qui limite totalement la possibilité de produire des vaccins dans tous les pays !

En ce sens, les dispositifs des organisations internationales auront un impact très relatif sur la problématique. En réalité il devrait y avoir 0 profit sur les productions permettant de faire face à la pandémie, des masques, au gel, aux respirateurs jusqu’aux vaccins. Nous devons lutter pour la nationalisation des laboratoires sous contrôle des travailleurs car personne ne devrait devenir riche grâce à la pandémie, comme le PDG de Moderna qui est devenu milliardaire ! Mais ce n’est pas par le moyen d’appels à la philanthropie des capitalistes et gouvernants que nous pourrons entrevoir une sortie de crise, mais bien par la lutte pour la reprise et la gestion des outils par les travailleurs eux-mêmes. C’est à nous de gérer nos affaires !


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