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Ni una menos !

Féminicide en Argentine : un policier tue son ex-petite amie de quinze coups de couteaux

L’adolescente de 18 ans a été assassinée de plus de quinze coups de couteaux par son ex-partenaire, un policier qu’elle a dénoncé à plusieurs reprises. La police qui a ignoré ces plaintes réprime maintenant les amies et les membres de la famille qui réclament justice.

Carla Biguliak

12 février 2021

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Le corps d’Ursula Bahillo a été retrouvé lundi dernier, le 8 février, dans un terrain à Rojas, une petite ville de la province de Buenos Aires. Son assassin, Matías Martínez, policier qui l’avait harcelée pendant plusieurs mois par des violences psychologiques et physiques, des harcèlements et des persécutions, était assis dans une voiture près de son corps. Il avait appelé son oncle, également policier, pour lui dire qu’il avait « merdé ».

Martinez a eu d’autres plaintes pour violence conjugale d’une ex-partenaire et a même été dénoncé pour abus sexuel, sans aucune suite. La justice et la police ont toujours protégé Martinez.

Les appels à l’aide d’Úrsula

« Si un jour je ne reviens pas, cassez tout », a-t-elle écrit sur son Instagram quelques jours avant d’être assassinée. Úrsula savait qu’elle était en danger et elle ne s’est pas tue : ces jours-ci, on a
pu entendre les messages vocaux qu’elle a envoyés à de nombreuses amies, où on l’entend terrifiée dire : « il m’a dit qu’il allait me tuer. Je n’en peux plus. Il m’a presque cassé la main, je ne peux pas bouger mon poignet, je te jure (...) Je veux partir d’ici. J’ai tellement peur. Il m’a arraché tous mes cheveux, il m’a tabassé. (…) Je suis devant l’hôpital, dans la voiture, parce qu’il m’a dit que si
je sortais, il allait me tabasser devant tout le monde »
.

Elle a supplié ses amis de conserver soigneusement tout ce qu’elle envoyait, photos, messages, audios : « Si je suis assassinée, vous savez qui l’a fait ».

L’adolescente avait réussi à obtenir que Martínez soit placé sous une restriction périmétrique, qu’il a contournée en toute impunité à plusieurs reprises et de cette manière, il a abordé son ex pour
menacer sa vie. La dernière plainte qu’Ursula a déposée date du 5 février, 3 jours avant que Martinez ne la poignarde à mort.

Qui nous protège de la police ?

Malgré toutes les plaintes et les preuves présentées, Ursula est donc la énième victime de féminicide malgré de nombreux signalements . La mère de la jeune femme a expliqué au rassemblement devant le commissariat de police, combien de fois elle s’est heurtée à l’inefficacité des institutions,dont le commissariat des femmes, qui a refusé d’enregistrer la plainte parce que c’était un week-end.

Tout cela a généré beaucoup de colère et de douleur non seulement dans la ville de Rojas, mais aussi au niveau national. Il y a eu des manifestations aux quatres coins du pays, où l’on pouvait voir des pancartes avec des inscriptions comme « police complice » ou « qui nous protège de la police ?".

La manifestation qui a eu lieu au commissariat de Rojas a été violemment réprimée, et une des amies d’Úrsula, qui était seule et totalement désarmée, criant pour justice devant la police, a été blessée à l’œil par une balle en caoutchouc.

L’ordre de répression a été donné par le ministre kirchneriste Sergio Berni, responsable de la répression à Guernica, de la disparition et de la mort de Facundo Castro et célèbre pour avoir tenté de semer de fausses pistes afin de criminaliser les manifestants.

Féminicides en uniforme

En Argentine, la Correpi (Coordination contre la répression policière et institutionnelle) estime que « à la fin de 2020, une femme sur cinq assassinée dans un contexte de violence sexiste est également victime de la violence de l’État, généralement incarnée par une arme délivrée par la police ». Ainsi, ils soulignent que les féminicides commis par la police sont « la principale cause de mort des femmes aux mains de l’appareil répressif de l’État ». Le CELS (Centre d’études légales et sociales), sur la base de données recueillie au cours des vingt dernières années, dénonce que « près de 500 femmes ont été tuées, torturées ou blessées dans le cadre d’événements impliquant un usage particulier de la force par des agents des forces de sécurité ».

Selon les données de l’observatoire de la Casa del Encuentro, une association argentine contre la violence de genre, entre 2008 et 2019, il y a eu 187 féminicides perpétrés par la police ou des membres d’autres forces de sécurité et des forces armées. Cela signifie que « chaque mois, un membre des forces de sécurité tue une femme dans un contexte de violence sexiste ». Ils soulignent également que dans 21 % des cas, les fémicides « ont été dénoncés par la victime, même si certaines d’entre elles avaient des restrictions d’approche, mais ont quand même été tuées avec leur arme réglementaire ».

Ce féminicide décrit malheureusement parfaitement ce que le mouvement féministe dit lorsqu’il crie que « l’État est responsable ». Ce féminicide montre clairement que la police et le système judiciaire perpétuent et légitiment ces crimes et toutes les violences faites aux femmes.

La solidarité avec la famille et les amis d’Úrsula s’accompagne d’un rejet croissant de l’impunité policière. Une grande mobilisation se prépare pour mercredi prochain, le 17 février, dans les tribunaux de tout le pays, pour demander que justice soit rendue pour Úrsula et que son crime ne reste pas impuni, ni la répression dont ses amis et sa famille ont été victimes lors de la mobilisation à Rojas. Comme en 2015, nous accompagnons les camarades argentines qui réclament #NiUnaMenos et qui disent une fois de plus Basta ! à la violence machiste, aux féminicides à l’impunité policière, et crient une fois de plus que l’État est responsable.


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