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Violence de genre

Féminicide à Hayange : une 43ème victime des violences patriarcales

Dans la nuit du dimanche au lundi 24 mai à Hayange, Stéphanie Di Vicenzo, une femme de 22 ans, a été tuée de plusieurs coups de couteau en pleine rue. Son compagnon, âgé de 23 ans, est suspecté d’être responsable de ce meurtre, déjà connu par les voisins et la police comme étant un homme violent avec sa compagne. Ce 43ème féminicide de l’année 2021 révèle lui aussi l’incapacité de la police et de la justice d’endiguer les violences faites aux femmes.

Romy Devienne

26 mai 2021

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Crédits photos : Marche Blanche à Hayange en hommage à Stéphanie : Jean-Christophe Verhaegen / AFP

Stéphanie Di Vicenzo avait déposé une main courante le 14 janvier 2020 et une plainte le 3 novembre 2020, faisant état “de violences verbales, de harcèlement ou de menaces de mort” de la part de son conjoint. A cela s’ajoutent les témoignages des voisins du couple : “C’était une jeune femme très gentille, je la voyais très souvent. Mais lui, il était très violent. On avait dû appeler plusieurs fois la police parce qu’il lui tapait dessus”, “Quand elle était seule, elle était enjouée, souriante, mais quand il était là, elle était morose”, “Je pense qu’elle avait peur de lui”, “Elle m’avait dit qu’elle avait amené des affaires chez son papa au cas où il redevenait violent”, relayés dans un article de L’Obs.

Emma, une proche amie de la victime, témoigne de l’enfer que son amie à vécu pour RMC : "ça servait à rien, elle ne partait pas. On a tous essayé, tout le monde, je vous jure. Il lui faisait peur, elle avait peur, elle ne pouvait rien faire. Peu importe où elle aurait été, il l’aurait retrouvée. Et si ce n’était pas elle, c’était sa famille. Même quand elle allait travailler, elle avait peur : il faisait des menaces tout le temps. Il n’y a que quand il dormait qu’elle était tranquille et encore... Ce n’est pas une vie de vivre avec quelqu’un comme ça". Le meurtrier présumé venait de sortir de prison, incarcéré pour une affaire de délits routiers et poursuivait sa peine à domicile sous surveillance électronique. La plainte et la main courante déposées à son encontre par sa compagne n’ont pas empêchées le drame.

En dépit des témoignages de la victime et de son entourage auprès de la police, Christian Mercuri, le procureur de la République de Metz, affirme qu’il n’y a pas eu de “dysfonctionnement des services judiciaires dans cette affaire” car la police n’avait pas informé le parquet du dépôt de plainte et de main courante de la victime, même si d’après lui la plainte avait entraîné “la saisine de l’intervenant social du commissariat, entré en relation à plusieurs reprises avec Mme Di Vincenzo” qui n’avait “pas souhaité aller plus loin dans le cheminement”. Cependant, il est facile de voir que, menée jusqu’au bout ou non, n’assure aucune protection aux victimes,comme par exemple dans le cas du meurtre de Chahinez moins d’un mois auparavant, qui a été tuée malgré des mesures prises à la suite de ses plaintes. Des dysfonctionnements sont donc bien à déplorer dans les institutions de l’État, et ils ne pourront pas se régler, comme l’entendent Schiappa et le reste du gouvernement, avec plus de police ou autre campagnes quartiers sans relous. Par ailleurs, comme pour le féminicide de Chahinez, Eric Dupond-Moretti, Marlène Schiappa et Gérald Darmanin lancent une mission d’inspection pour faire “toute la lumière” sur ces deux affaires.

Cependant, il ne faut pas s’attendre à une remise en cause profonde de la prise en charge des violences patriarcales par le gouvernement. Il ne suffit pas de condamner les mesures prises par quelques policiers ou agents de justice mais bien de lutter contre tout ce système patriarcal qui a démontré que sa logique punitive n’a jamais permis d’empêcher les violences de genre. Ce n’est pas en intégrant les rangs d’une police qui a du sang sur les mains (ou sur l’interphone) comme le conseille Schiappa aux féministes, cette même police qui déclare que “s’il voulait la tuer, on ne pouvait rien y faire, il l’aurait fait de toute façon] suite au féminicide de Nathalie D, que l’on empêche de tels drames.

Au contraire, comme nous l’écrivions dans un précédent article : « il faut revendiquer comme mesure d’urgence l’éloignement effectif de l’auteur des violences et sa prise en charge par des professionnels, notamment de santé, afin d’éviter la spirale infernale de l’incarcération en tentant au mieux d’identifier les éventuels problèmes psychiatriques qui mènent à ce type de violences. A ce titre, le budget du ministère de l’Intérieur avoisine les 14 milliards d’euros pour la seule année 2021. Plutôt que le renforcement de l’appareil répressif d’État, qui a une nouvelle fois prouvé son inefficacité totale en matière de lutte contre les violences de genre, cet argent pourrait et doit servir à ouvrir des centres d’accueil et de soin pour les victimes, à embaucher le personnel formé et qualifié nécessaire à la prise en charge des auteurs de violence, à financer un revenu pour l’ensemble des victimes de violences. »


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