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Grève féministe

Faisons du 8 mars le début d’une grève politique reconductible contre la réforme des retraites et son monde !

Dans la continuité de la journée de grève interprofessionnelle du 7 mars qui s'annonce massive, la journée internationale de lutte pour les droits des femmes et des personnes LGBTI doit servir de point d’appui pour construire un mouvement de grève reconductible et politique contre Macron et son monde.

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Cette année, le 8 mars prend place dans un contexte inédit de grève contre la réforme des retraites. Après cinq journées de mobilisation massive, il est désormais clair que les femmes et les LGBTI sont en première ligne de cette attaque. Mais, dans le feu de la grève, c’est aussi tout un système profondément inégalitaire qui commence à apparaître au grand jour. Une situation qui ouvre la possibilité d’inscrire le 8 mars dans la continuité de la journée de grève intersyndicale du 7 mars, et d’en faire le point de départ d’une grève reconductible et politique, pour gagner sur toute la ligne contre Macron et son monde.

Un mouvement politique qui soulève des enjeux centraux pour les femmes et personnes LGBTI

Dès le début du mouvement de grève contre la réforme des retraites, la question des inégalités structurelles entre les femmes et les hommes a ébranlé le projet du gouvernement. Le 24 janvier, après avoir annoncé une réforme « plus juste » pour les femmes, ce dernier était forcé d’admettre qu’elles seraient en fait parmi les plus pénalisées.

Dans le même temps, la mobilisation massive initiée le 19 janvier a mis en lumière non seulement un rejet unanime de cette réforme au sein de la population, mais aussi la question plus large des conditions de travail des secteurs les plus opprimés de la société. Sur les piquets et dans les manifestations, des travailleuses et travailleurs de la santé, du nettoyage, de l’aide à domicile ou encore de la logistique, ont rappelé que le report de l’âge de départ à la retraite est d’autant plus impensable que leur travail est déjà insoutenable.

Au micro de Révolution Permanente, Lucie, infirmière au CHU de Toulouse, racontait par exemple : « Moi, j’ai déjà dû arrêter de travailler à cause de maux de dos et je n’ai même pas 40 ans. Je ne sais pas comment je vais faire pour tenir jusqu’à la retraite. À 64 ans, c’est moi qui aurai besoin d’une infirmière ». Oumou, ex-gréviste d’ONET âgée de 60 ans, témoignait de son côté à la tribune du meeting de Du Pain et des Roses : « J’ai dû arrêter de travailler à cause de la maladie. Le nettoyage, ça ne vous laissera jamais indemne. On travaille pour gagner quelque chose, on ne travaille pas pour être malade ou mourir au travail. Il faut que ça s’arrête. ».

Très vite, il est ainsi devenu évident que la mobilisation en cours dépasse de loin la question de la réforme des retraites. Si celle-ci a été la goutte qui fait déborder le vase, c’est parce que nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à ne plus supporter l’exploitation au travail. Comme l’expliquait Maëva Amir, militante à Du Pain et Des Roses, à notre meeting à Paris VIII : « Cette contre-réforme cristallise la colère de la population, notamment dans les secteurs les plus pauvres qui sont souvent féminisés et racisés. La perspective de travailler deux ans de plus dans ces secteurs réveille une colère profonde pour ceux et celles qui, pendant le Covid, avaient continué à faire tourner le pays ».

Au cœur de cette colère, la question des salaires, des conditions de travail, du temps de travail, de l’absence de moyens pour les services publics. Ce n’est donc pas qu’une réforme, mais bien le système entier qu’il est possible de remettre en cause dans ce mouvement. Un système profondément inégalitaire, au service d’une minorité qui assigne à des milliers de femmes et de personnes racisées les tâches les plus pénibles et dévalorisées de la société, intensément précarisées ces dernières années, alors même que la crise sanitaire a prouvé leur caractère essentiel. En ce sens, le mouvement contre la réforme des retraites n’est pas seulement massif : il est aussi éminemment politique.

Un mouvement contenu sur un terrain strictement revendicatif par la stratégie de pression de l’intersyndicale

Malgré ce caractère éminemment politique, le seul objectif que se donne l’intersyndicale après cinq journées de mobilisation massive se cantonne au retrait de la réforme. Toute autre question est écartée du débat. Le 7 février, Laurent Berger annonçait déjà : « La CFDT n’a jamais été adepte des mots d’ordre fourre-tout. Si on veut que le gouvernement nous écoute sur l’âge légal, il faut qu’on reste sur cette revendication ». Une logique qui va de pair avec une stratégie de pression, limitant le mouvement à une série de journées de grève isolées.

En ce sens, dans son dernier communiqué, l’intersyndicale affirme la distinction qu’elle entend opérer entre la journée de grève syndicale du 7 mars et la date féministe du 8 mars. S’il est écrit que « l’intersyndicale appelle les personnels à se mobiliser le 8 mars, journée internationale de luttes pour les droits des femmes, pour dénoncer l’injustice sociale majeure de cette réforme des retraites envers les femmes », aucun appel à la grève n’est formulé.

Si le 7 mars on devrait donc « mettre le pays à l’arrêt » contre la réforme, le 8 se limite à un appel à une « mobilisation » pour « rendre visibles les conséquences » de la réforme sur les femmes. La secrétaire adjointe à la CFDT Marylise Léon est allée plus loin, déclarant au micro de RMC que le 8 mars sera « une journée de mobilisation, mais sans lien avec la veille ».

En déconnectant le mouvement de grève contre la réforme des retraites du mouvement pour les droits des femmes et des LGBTI, l’intersyndicale refuse à nouveau toute « politisation » du mouvement. Mais cette décision permet aussi d’éviter tout signe d’appel à la reconduction, refusant de répondre aux aspirations d’un nombre croissant de travailleuses et de travailleurs qui voient la nécessité de durcir le mouvement, alors que les travailleurs des transports, de l’énergie, de la pétrochimie ou encore les éboueurs appellent à la grève reconductible dès le 7 mars. À rebours de cette logique, il faut faire du 8 mars le début d’une grève politique et reconductible.

Les appels à la grève féministe : un point d’appui pour faire du 8 mars le début d’une grève politique et reconductible contre Macron et son monde !

Ces dernières années, une partie du mouvement féministe a remis au goût du jour la question de la « grève féministe » le 8 mars à l’échelle internationale. Pour un certain nombre d’organisations féministes, le 8 mars ne doit plus seulement être l’occasion d’une manifestation et d’actions symboliques, mais d’une grève effective où « la société s’arrête », pour faire valoir les droits des opprimé·es et en revendiquer de nouveaux.

Cette année, un appel à la grève féministe du 8 mars a ainsi été lancé et signé par de nombreuses organisations féministes, mais également par des organisations syndicales comme la CGT ou Solidaires, qui participent à l’intersyndicale contre la réforme. À l’initiative de la Coordination féministe, rassemblant de nombreux collectifs, un autre appel dont Du Pain et Des Roses est signataire, souligne la nécessité de construire un rapport de force par la grève. Ces appels sont progressistes en ce qu’ils inscrivent la journée du 8 mars dans la mobilisation contre la réforme des retraites, mais aussi parce qu’ils élargissent les revendications en posant la question de l’égalité salariale, de l’accès effectif à la santé pour nos droits reproductifs ou encore de la régularisation de tous les sans-papiers à l’heure où s’élabore la loi Darmanin.

Cependant, si une partie des directions syndicales affiche son soutien à des initiatives de mobilisation le 8 mars, tandis que Solidaires appelle à reconduire la grève après le 7 mars et a déposé un préavis de grève pour le 8 mars, l’intersyndicale dans son ensemble continue de refuser de formuler un appel clair à la grève reconductible et de construire cette perspective. Il faut un appel clair !

Une telle politique serait en effet délétère pour le mouvement des retraites et la journée du 8 mars, isolant les secteurs qui appellent à la reconductible et les fédérations syndicales qui ont déposé des préavis pour le 8 mars, à l’image de la CGT Éducation ou de la CGT Santé Action Sociale, qui élargissent les revendications à la retraite à 60 ans et mettent en avant des revendications féministes.

La nécessité d’un programme offensif

Puisque la journée internationale de lutte pour les droits des femmes et des LGBTI prend place au lendemain de la prochaine journée de grève nationale appelée par l’intersyndicale, la possibilité d’en faire une journée de grève massive contre le gouvernement est forte. Cela permettrait de dépasser la stratégie de l’intersyndicale en l’obligeant à élargir le cahier des revendications et à appeler à la reconduction du mouvement. Pour cela en vue des 7 et 8 mars, il est central que les militant·es féministes, LGBTI et antiracistes participent à faire peser au sein du mouvement des revendications qui dépassent le strict retrait de la réforme et défendent la perspective de la grève reconductible.

Sur le terrain du programme, le 8 mars est l’occasion de pousser des revendications à même d’entraîner les secteurs les plus précaires de notre classe, souvent féminisés et racisés, dans une bataille qui en vaillent la peine : pas pour le maintien du statu quo, mais pour passer à l’offensive dans l’intérêt de tous·tes les exploité·es et opprimé·es.

Avec Du Pain et Des Roses, nous revendiquons une retraite à 60 ans, 55 pour les métiers pénibles, sans condition d’annuités. De même, nous ne voulons pas d’une retraite calculée sur la base des bas salaires qui nous sont dévolus par un système profondément patriarcal et raciste. Nous exigeons une augmentation générale des salaires de 400e et leur indexation sur l’inflation, ainsi que l’égalité salariale entre toutes et tous. Cela implique le partage du temps de travail, pour que nous ne soyons plus contraint·es de travailler à temps partiel pendant que d’autres croulent sous la charge de travail. Dans les services publics, comme l’éducation, la santé ou la petite enfance, des moyens massifs en taxant le patronat doivent être investis pour créer de nouvelles structures et embaucher du personnel pour réduire la pénibilité, mais aussi pour que les tâches domestiques et d’éducation cessent de reposer sur les femmes ! Nous ne voulons pas non plus d’une retraite qui exclue de fait la prise en compte du travail particulièrement pénible qui est assigné aux personnes sans-papiers : nous devons également lutter pour leur régularisation immédiate.

Au-delà de la question des retraites, un tel programme est aussi nécessaire pour lutter contre les violences patriarcales et racistes. L’indépendance économique et l’accès à des services publics de qualité sont en effet un préalable pour pouvoir se sortir de situations de violences, qu’elles aient lieu au travail ou au foyer. Sur ce plan, nous revendiquons également la réquisition des logements vides pour les victimes de violences ou encore une éducation sexuelle et affective sous contrôle du personnel de l’éducation.

Ce programme est également à mettre en relation avec la revendication d’un droit à l’avortement libre et gratuit pour tous·tes. Quand bien même le gouvernement venait à faire inscrire ce droit dans la Constitution, cela ne garantirait en rien son effectivité sans que des moyens massifs soient alloués à la santé et à l’éducation, pour que tout le monde ait accès à la prévention, à la contraception et à une prise en charge digne de ce nom.

Et d’une stratégie à la hauteur : défendons la grève reconductible !

Ces revendications ne pourront pas être arrachées dans le cadre de la stratégie de pression de l’intersyndicale, mais bien par un rapport de force de l’ensemble des secteurs du monde du travail et des opprimé·e·s contre le gouvernement et le patronat. Comme le disait Adèle Haenel au meeting de Du Pain et Des Roses, « ce qu’on repousse avec cette réforme c’est tout un monde, c’est un monde de la bourgeoisie mortifère, un monde dont le projet c’est l’exploitation à l’infini et de plus en plus profonde de nos vies ».

Cela nécessite que la massivité dans la rue se transforme en forces militantes actives en allant chercher toutes celles et ceux qui hésitent encore à faire grève le 7 mars, ainsi que proposer des solutions concrètes telles que les caisses de grève pour répondre aux préoccupations légitimes des travailleuses et des travailleurs. Cela nécessite de les convaincre également de se réunir en assemblées sur leurs lieux de travail ou d’étude quand cela est possible, ou bien de venir dans les assemblées interprofessionnelles ou de villes déjà existantes. C’est la condition pour que les travailleuses et les travailleurs, la jeunesse et les quartiers populaires, prennent en main la grève qui est la leur, en élaborent le contenu revendicatif et contrôlent ses modalités d’action, mais aussi trouvent collectivement des solutions aux problèmes concrets posés par la grève.

La jeunesse, les militant·es féministes et antiracistes ont un rôle important à jouer de ce point de vue pour élargir la grève. Ils et elles peuvent participer à s’adresser aux secteurs qui ont des difficultés à se mobiliser, venir renforcer les opérations de tractage ou les actions qui se mettent en place dans plusieurs secteurs. Avec Du Pain et Des Roses, nous vous invitons à vous organiser avec nous et à manifester avec nous le 8 mars pour militer en ce sens, et construire les journées de grève à partir du 7 mars pour faire plier Macron et son monde !

Assemblée ouverte de Du Pain et Des Roses à Paris ce jeudi 2 mars 18h30 au Lieu-Dit, 6 rue Sorbier, Paris 20ème.


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