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Organisons une lutte unitaire

Face aux attaques de l’extrême-droite, Darmanin et l’État sont-ils des alliés ?

Ces derniers jours, les attaques violentes de l’extrême-droite se sont multipliées dans plusieurs villes. En réponse, certaines voix s’élèvent pour exiger une « réaction » de Darmanin. Celui qui trouvait Marine Le Pen « un peu molle » pourrait-il être un allié dans la lutte contre l'extrême droite ?

Le Poing Levé

9 décembre 2022

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Crédits photo : Capture d’écran Twitter

Ces derniers jours, plusieurs agressions d’extrême droite ont eu lieu dans différentes universités. Mercredi, lors d’une tournée des députés NUPES/France Insoumise Louis Boyard et Carlos Martens Bilongo à l’université Bordeaux Montaigne, une vingtaine de militants d’extrême droite, cagoulés et munis de barre de fer ont tenté de pénétrer dans la conférence. La section montpelliéraine des jeunes Insoumis a fait savoir que trois de ses militants s’étaient fait agresser, le même soir, par douze militants d’extrême droite aux abords de la fac Paul Valéry. Ces fascistes s’en étaient déjà pris à des militants du Poing Levé il y a quelques semaines.

En début de semaine à Lyon, l’extrême droite avait déjà agressé des militants de la France Insoumise alors que ceux-ci diffusaient des tracts. Hier soir, le bar où doit avoir lieu une réunion publique de la France Insoumise à Toulouse, en présence Carlos Martens Bilongo notamment, a été tagué avec des slogans du Rassemblement National. A Bordeaux aussi les nervis d’extrême droite avait préventivement tagué les lieux la veille de leur passage à l’acte. Nous renouvelons tout notre soutien à l’ensemble des personnes qui ont fait face aux violences de l’extrême droite.

Ces faits ne sont pas isolés et ne visent pas uniquement la France Insoumise. Ces dernières semaines, l’extrême droite, que ce soit l’UNI, la Cocarde ou divers groupuscules, ont tenté de perturber ou de faire interdire des réunions d’organisations syndicales ou associatives sur les universités. Ainsi à Aix-en-Provence une conférence sur l’apartheid israélien a été annulée sous pression de l’extrême droite, de même une conférence d’Amnesty International à Chambéry, ou encore une projection organisée par Solidaires Etudiant.e.s Lille, annulée par la direction de l’université. Il s’agissait en l’occurrence du film Generation Hate, documentaire d’infiltration au sein de la fachosphère lilloise dans leur bar La Citadelle. Ces derniers jours, devant une conférence à la fac de Jussieu, le GUD, diffusait un tract appelant à « rendre la vie impossible  » à la « vérole gauchiste ». Une phrase évocatrice pour l’organisation dont est issu l’assassin Loïk Le Priol qui a abattu le rugbyman argentin Frederico Aramburu en pleine rue de Paris.

L’extrême droite s’engouffre dans la porte ouverte par le gouvernement

Les thèmes mobilisés par les diverses organisations d’extrême droite qui essayent de s’imposer sur les facs sont les mêmes partout : la lutte contre le « wokisme », « l’islamo-gauchisme », les « antifas », « l’immigrationnisme et les féministes » (selon les mots du GUD). Si ces thèmes ont toujours été ceux de l’extrême droite, la nouveauté c’est qu’ils sont désormais employés quotidiennement à la télé, y compris par des ministres.

En février 2021, c’est l’ancienne ministre de l’Enseignement Supérieur, Frédéric Vidal, qui avait ouvert les vannes sur CNEWS en s’attaquant à « l’islamogauchisme dans les universités ». Dans la foulée, le ministre de l’Éducation Nationale avait organisé un colloque de lutte contre le « wokisme » à la Sorbonne. De même, avec la loi « séparatisme », le gouvernement renforçait encore l’hystérie anti-musulman sous couvert de laïcité, une offensive qui se poursuit dans actuellement dans les établissements scolaires de tout le pays.

Cette semaine encore, c’est l’ancien royaliste Darmanin, qui citait Jacques Bainville, figure du mouvement antisémite et monarchiste de l’Action Française, à l’Assemblée Nationale avant de présenter sa loi anti-migrant. Sous couvert de la défense des « valeurs républicaines », Emmanuel Macron lui-même fait désormais à la télé, dans la plus pure tradition de l’extrême droite, le lien entre délinquance et immigration, affirmant « la moitié des faits de délinquance viennent des étrangers ».

Malgré cela, suite aux agressions par les groupes d’extrême droite ces derniers jours, des interpellations au gouvernement se sont multipliées, notamment du côté de la France Insoumise, pour appeler le gouvernement et particulièrement Gérald Darmanin à les protéger face à l’extrême droite. De même, des demandes émergent pour que Yaël Braun-Pivet attaque en justice l’extrême droite au nom de l’Assemblée Nationale.

Cependant, ces interpellations sont condamnées à l’impuissance, et permettent à l’inverse à Darmanin de se délimiter (sur la forme) de l’extrême droite, pour mieux renforcer sur le fond la lutte « contre les extrêmes » et par là les aspects les plus autoritaires et répressifs de sa politique. Car, si l’on fait abstraction des allégeances politiques de la police et de ses connivences avec les groupuscules d’extrême droite (et c’est une grosse abstraction), ceux à qui la France Insoumise demande protection sont le carburant de l’extrême droite qui prend désormais confiance dans la rue. A l’inverse, dans la lutte contre l’extrême-droite, nous ne pouvons faire aucune confiance au gouvernement.

Comment lutter contre l’extrême droite ?

Si les militants d’extrême droite essayent de se victimiser, nous connaissons leurs méthodes, et ils l’ont rappelé cette semaine : intimidation, coups de pression, agressions physiques à coup de matraques, de gazeuse etc. Mais face à leur violence, la réponse ne se trouve pas dans l’institution policière. Y faire appel ne servirait en réalité qu’à justifier le renforcement de ses pouvoirs, qu’elle retournera le lendemain contre le mouvement ouvrier et le mouvement étudiant. Ainsi, faire escorter les tournées d’université de députés de gauche par la police, alors que ces derniers n’ont pas le droit d’y mettre les pieds sans l’accord des présidences, serait un dangereux précédent qui inviterait les directions de fac à renforcer la présence d’agents de sécurité privé et de policiers sur les campus. Les flics de Darmanin, qui tuent dans les quartiers, qui harcèlent les migrants, lacèrent les tentes, tabassent dans les manifestations et répriment les grèves ne seront pas nos alliés pour lutter contre l’extrême droite.

De la même manière, demander au gouvernement de dissoudre les groupuscules d’extrême droite, comme le font différents groupes de gauche, ne revient qu’à légitimer le mécanisme qui est régulièrement appliqué contre nos propres organisations : du Collectif Palestine Vaincra menacé de dissolution pour des commentaires Facebook laissés sur son compte, au Groupe Antifasciste Lyon et Environs, en passant par le Bloc Lorrain, en procédure de dissolution pour avoir écrit sa volonté d’« abattre le capitalisme ».

A Bordeaux, suite aux attaques de l’extrême-droite contre la conférence de la France Insoumise, les militants du Poing Levé ont immédiatement appelé à un rassemblement de toutes les organisations politiques, syndicales et du mouvement social. Une réponse large et unitaire mais surtout primordiale, car laisser un pouce de terrain à l’extrême droite serait un recul pour l’ensemble des organisations du monde du travail et du mouvement social.

Mais malheureusement, s’il est essentiel, de réagir immédiatement, de marquer de notre présence militante le fait que nos facs seront toujours fermées aux idées nauséabondes de l’extrême droite, faire des rassemblements ne suffira pas. Sur les facs, les organisations doivent se réunir et se préparer à organiser la riposte dans l’unité. Face aux menaces de l’extrême droite, il s’agit de mobiliser massivement les étudiantes et les étudiantes et d’assurer nous-mêmes la sécurité de nos événements publics.

L’ensemble des organisations doit faire front commun contre les attaques subies par l’extrême droite, mais également face aux lois anti-sociales et xénophobes portées par le gouvernement. Ne rien laisser passer. Préparons la riposte, pas de fachos dans nos facs !


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