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Cheminots, usagers, même combat pour le service public ! – PARTIE 3

Explosions de grèves locales à la SNCF. Les cheminots à l’offensive !

Un an après le passage en force de la reforme ferroviaire par le gouvernement et la défaite des cheminots à cause de la stratégie de grève perlée, inefficace pour paralyser le rail, les cheminots n’en ont pour autant pas fini avec la lutte contre la casse du service public ferroviaire ! Dans la série d’articles sur les conséquences de la réforme ferroviaire, nous revenons sur l’actualité des luttes sociales à la SNCF.

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La situation catastrophique du rail

Comme chaque année dans la période estivale de départ en vacances, l’entreprise ferroviaire est sous les feux des projecteurs. Retards, pannes, incendies, guichets fermés ou surchargés, la saison ne fait que commencer et la SNCF est déjà sous pression, face aux usagers en colère.

Certains cheminots parfois le disent de manière amère aux usagers du rail, « nous vous avions prévenu l’an dernier ». Effectivement, les cheminots, qui se sont battus durant trois mois pendant le printemps 2018, avaient prévenu des conséquences de la reforme ferroviaire et ces derniers, comme toujours, ne s’y sont pas trompés. Depuis un an, jamais les médias n’avaient autant sortis de papiers annonçant des suppressions d’emplois, des fermetures de guichet, de gare, de boutique SNCF ou encore des suppressions de lignes. Ce n’est pas qu’une reforme ferroviaire, mais le massacre organisé du service public ferroviaire. Petit bout par petit bout, la SNCF supprime le moindre centimètre carrée de service public jugé pas suffisamment rentable.

Pourtant après le passage de la reforme ferroviaire, Guillaume Pepy, qui va quitter le navire qu’il a précipité au fond des océans, disait qu’il y aurait plus de trains, plus de services, plus de qualité. Mais c’est totalement le contraire qu’il se passe et tout le monde le remarque aujourd’hui, même les usagers favorables l’an dernier à la reforme ferroviaire, sont en train de déchanter tant la situation est catastrophique aujourd’hui.

Les associations d’usagers et les élus locaux, qui avaient des rapports plutôt diplomatiques avec la direction SNCF, se sont parfois radicalisés, et n’hésitent plus à multiplier les actions coup de poing, parfois allant jusqu’à descendre sur les voies, pour manifester contre une suppression de ligne ou encore des suppressions de trains aux horaires où les usagers en auraient besoin, pour ensuite justifier d’une baisse de la fréquentation pour supprimer la ligne ou la remplacer par un autocar.

La politique d’entreprise dans le viseur !

Les usagers du rail se rendent compte de plus en plus que les responsables ne sont pas les cheminots, qui font ce qu’ils peuvent malgré les choix de direction catastrophique. Depuis des mois la direction de la SNCF, qui s’est transformé en commissaire-priseur du rail, a multiplié les annonces de l’externalisation de plus en plus massive du service ferroviaire, vers les autocars, vers les buralistes pour les tickets, ou encore la surveillance des gares par des facteurs de La Poste. Pourtant les usagers eux sont loin d’accepter cela et se rendent compte que ces choix ont des conséquences direct dans leur trajet du quotidien et, ceux qui fréquente les gares durant les périodes estivales, ne comprennent plus pourquoi les cheminots disparaissent remplacés par des bornes automatiques. Dans le reportage de France 2 paru début juillet, on voit même des voyageurs en colère dans des files d’attente de plus de 4h, expliquant « On veut parler à des gens pas à des machines ».

Incontestablement, il y a un effet « gilet jaune » qui renforce la critique contre la direction de la SNCF. En effet ce mouvement, qui a démarré contre la taxe sur le carburant au démarrage en novembre 2018, a en réalité apporté beaucoup de critiques face à la gestion des services publics en général et notamment du ferroviaire. Car ces gilets jaunes des zones périurbaines connaissent mieux que les habitants des grands centres urbains, la désertification petit à petit du train dans leurs régions. Ils ont vu les gares, les écoles, les bureaux de postes ou encore les maternités, fermer au fur et à mesure, les laissant souvent se débrouiller pour faire des kilomètres en voiture, plutôt que d’utiliser le train. La taxe sur le carburant, n’était en réalité que la goute d’essence qui aura fait déborder le vase de la colère sociale. Le lien avec les gilets jaunes s’est fait très rapidement, la SNCF étant l’une des premières entreprises à avoir céder directement à la « prime gilet jaune » de décembre pour éviter la contagion entre gilets jaunes et cheminots.

Contre l’immobilisme des fédérations, les cheminots s’organisent localement

Depuis plusieurs mois, dans différentes régions, les cheminots ont décidé de contre-attaquer et de ne pas laisser leur outil de travail partir en fumée, malgré le passage de la reforme ferroviaire. Les équipes syndicales multiplient les appels à mobilisation localement, comme dans les Hauts-De-France, la région Occitanie, la région Rhône Alpes ou encore dans le Grand Est. Tous dénoncent les conséquences des choix politiques de la SNCF et du gouvernement, visant à détruire le service public dans leur région, avec des suppressions de guichets, des horaires de trains supprimés ou encore des conditions de travail de plus en plus dégradées.

De plus le préavis illimité déposé par la fédération SUD Rail en avril 2018 contre la réforme ferroviaire, est utilisé de plus en plus par des cheminots au bord du burn-out, ce qui montre leur mécontentement de manière individuel, en attendant certainement un sursaut massif.

La SNCF, qui refuse de communiquer sur la colère qui monte de plus en plus en interne, essaye par tous les moyens de gérer le manque de personnel et les conflits locaux sans faire de bruit. Pourtant, certains conflits atteignent parfois 90% à 100% des cheminots, notamment dans cette période estivale, qui perturbe de manière importante la circulation. C’était le cas par exemple la semaine du 4 au 8 juillet dans la région Occitanie, avec de nombreux trains supprimés. La SNCF va même jusqu’à mentir sur les raisons des retards, comme le 8 Juillet sur la ligne Toulouse-Agen, elle parlait d’incendie, alors que des cheminots accompagnés d’usagers et d’élus locaux, avaient décidé de bloquer la gare d’Agen pour dénoncer les nouveaux horaires de trains, causant plus de 4h de retards et des suppressions de trains.

La colère est donc de plus en plus intense, notamment lorsqu’on y ajoute les conséquences direct du management, poussant les cheminots vers la porte ou au suicide, avec quasiment un cheminot qui se suicide toutes les semaines, plus qu’à l’époque de France Telecom. Les démissions explosent, avec des départs de plus en plus importants de cheminots, n’acceptant plus la dégradation de leurs conditions de travail.

Mais la réponse ne peut être qu’à travers la grève massive. Pour l’heure, SUD Rail appelle les cheminots à se mobiliser dans un mouvement d’ampleur avant la fin de l’année 2019. Mais aucune réponse unitaire n’est prise nationalement, après la journée du 4 juin, pourtant sans perspective, mais qui a été relativement assez réussie.

Mouvement pour le climat, gilets jaunes, grèves locales : quelles perspectives pour les cheminots ?

Les journalistes et les politiques avaient d’ores-et-déjà scellé l’avenir du rail public en 2018, expliquant que la loi était votée et qu’il n’y avait plus rien à faire, saluant la privatisation.

Pourtant, depuis huit mois maintenant, une coordonnée a complètement enrayé la machine macroniste. Le mouvement des gilets jaunes a en effet rebattu les cartes de la lutte sociale, dénonçant radicalement la politique du gouvernement et notamment la casse des services publics. La colère que suscite la privatisation d’ADP (Aéroports de Paris) montre très bien l’effet gilet jaune, qui très certainement n’aurait pas existé avec autant d’intensité sans le mouvement social qui dure depuis novembre dernier, obligeant même les politiciens réformistes et de droite à se saisir de la question pour faire une alliance opportuniste, alors que nombre d’entre eux, à droite, lors de la bataille du rail, se disaient favorables à la réforme du ferroviaire.

La crise écologique, avec la multiplication des marches pour le climat qui ont rassemblé des milliers de jeune en France et des millions à travers le monde, témoigne de la prise de conscience importante des questions climatiques face aux décisions politiques du gouvernement. La suppression du train des primeurs, Perpignan-Rungis, suscite par exemple beaucoup de colère et d’indignation, dans cette période où le ferroviaire représente justement l’alternative écologique. Mais le Fret ferroviaire est décimé par la SNCF depuis des années maintenant sans grande réaction du public jusqu’à présent. C’est pourtant plus de 2 millions de camions sur les routes de France en plus, depuis que le fret ferroviaire est attaqué. La mobilisation et la médiatisation autour du train des primeurs, montre les premiers signes de ce changement dans la réflexion collective.

Le gouvernement et la direction SNCF sont donc pris en étau, alors qu’ils doivent passer à la phase d’application du Pacte Ferroviaire en 2020, entre casse du service public ferroviaire et gestion politique, dans la prochaine période d’élections municipales où la question des transports sera centrale. Le gouvernement devra donc voguer entre crise écologique, crise sociale encore ouverte et poursuite des réformes néolibérales.

À l’image de la grève des professeurs et des urgentistes, toutes deux parties spontanément depuis la base, avec le collectif Stylos Rouges pour ce qui est des enseignants et l’Inter-Urgences pour ce qui est de la santé, le gouvernement aura à craindre demain, que les grèves locales à la SNCF ne se transforme pas en mouvement d’ampleur issus de la base, en dehors des directions syndicales qui sont, en dernière instance, KO debout après la défaite de l’an dernier et complètement ignorées par le gouvernement Macron.

Le collectif Intergare créé durant la bataille du rail, qui a surpris par sa radicalité et sa politique offensive, notamment pour dénoncer les négociations et la stratégie de grève des directions syndicales, sera surement un point d’appui important pour les cheminots dans la prochaine période de lutte.

👉 Participez à la campagne de Révolution permanente :

N’hésitez à nous envoyer votre propre témoignage, que vous soyez cheminot ou usager, sur les conséquences de la réforme ferroviaire dans vos régions et métiers respectifs pour ce qui est des cheminots : [email protected]

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