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Edito

Education Nationale : généraliser la grève pour imposer des protocoles sanitaires à la hauteur

L'importante mobilisation de ces deux derniers jours dans l’Education nationale offre une bouffée d’air dans un climat marqué par la reprise de la crise sanitaire et l'offensive sécuritaire du gouvernement. Outre les grèves massives, dans plusieurs établissements, les profs ont mis en place eux-mêmes un protocole sanitaire, avec l'aide des élèves et des parents. Un processus qui doit se généraliser et pourrait ouvrir des perspectives importantes.

Nathan Deas

4 novembre 2020

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Quelques jours après l’annonce d’un nouveau confinement light sans moyens supplémentaires pour l’Education Nationale, la rentrée des classes annonçait un accroissement des tensions. Cela n’a pas manqué. Lundi des dizaines d’établissements étaient confrontés à des débrayages, grèves, droits de retraits et assemblées générales. Ce mardi, rien que dans le 93, Sud Education dénombrait plus d’une cinquantaine d’établissements mobilisés. 

Outre un protocole sanitaire inconséquent, qui met en lumière l’absence de moyens structurelle dans l’Education Nationale, c’est l’hommage au rabais à Samuel Paty qui a mis le feu aux poudres lundi. La suppression du temps de concertation pour la mise en place des hommages adaptés a été perçue comme un nouveau signe de mépris de la part du gouvernement. Un épisode qui a réveillé la colère tenace contre Blanquer et le gouvernement, qui communique à tour de bras et se gargarise d’une mascarade de protocole sanitaire.

Au cœur de la dynamique, l’Ile-de-France qui compte des établissements particulièrement mobilisés dans des quartiers populaires, où le manque de moyens est profond, et le secondaire. Si Le Parisien parlait lundi de "grèves massives" c’est en effet une dynamique de fond qui s’est exprimée, avec de très nombreux lycées avoisinant les 80% de grévistes.

Mardi, de nombreux lycées se sont à nouveau mobilisés à l’image du lycée Elsa Triolet à Saint-Denis ou du Collège Delaune à Bobigny. Des mobilisations mêlant professeurs, mais aussi parfois parents d’élèves, qui ont convergé l’après-midi devant la Direction des Services Départementaux de l’Éducation Nationale où plus de 200 personnes étaient réunies. Côté lycéen, un appel à blocage a été suivi dans plusieurs lycées du pays, et ce malgré la forte répression, à coups de matraque et de gaz lacrymogène comme au Lycée Colbert à Paris ou Saint-Sernin à Toulouse.

Si ces mobilisations expriment une colère profonde dans l’Education Nationale, elles ont donné lieu à des phénomènes d’auto-organisations et à des initiatives particulièrement subversives. Ainsi, dans certains établissements, face à l’insuffisance totale des protocoles sanitaires proposés, les enseignants ont décidé de prendre eux-mêmes en charge la conception et la mise en œuvre de mesures sanitaires à la hauteur. Dans le lycée Charlotte Delbo en Seine-et-Marne, les professeurs ont ainsi décidé d’imposer hier la mise en place de demi-groupes. Une première réponse pour exiger un plan sanitaire à la hauteur, qui impliquerait des moyens supplémentaires.

Pour Blanquer comme pour le gouvernement ce début de mouvement est une véritable épine dans le pied. D’abord, on sait le rôle central joué par les écoles dans ce deuxième confinement, puisque leur ouverture conditionne la possibilité pour de nombreux parents d’aller travailler. Ainsi, cette mobilisation pourrait profondément mettre à mal la gestion pro-patronale du gouvernement. En outre, en dépit du black-out médiatique sur ce phénomène, le mouvement pourrait remettre sur le devant de la scène l’incurie des politiques publiques de ce gouvernement et le manque effarant de moyens accordés à l’Education nationale, comme à l’ensemble des services publics à commencer par l’hôpital.

Enfin, la mobilisation des enseignants et des lycéens constitue un premier phénomène de lutte de classe dans une situation marquée par l’atonie générale qui laisse au gouvernement tout l’espace pour mener son offensive pro-patronale et sécuritaire. Sans présager ni surestimer les potentialités de ce début de mouvement, celui-ci a déjà le mérite d’être le premier embryon d’une entrée dans la lutte pour un secteur important. Dans les nombreux lycées mobilisés, les professeurs sont entrain de montrer que seul le rapport de forces peut permettre de reprendre la main face à un gouvernement à l’offensive et d’imposer des mesures sanitaires à la hauteur. Une leçon fondamentale pour la période à venir.


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